Une courte majorité de 59 députés (sur 115) a validé le budget 2016 du canton, jeudi en début d’après-midi, après dix heures de débats entamés mardi à 16 heures, débats tantôt houleux, idéologiques, politiciens mais rarement d’un bon niveau. 29 députés, UDC, socialistes, popistes et verts s’y sont opposés et 21 se sont résolus à s’abstenir, pour éviter de sombrer dans la crise qu’aurait provoquée le rejet du budget.

La copie livrée en septembre par le Conseil d’Etat à majorité socialiste a été malmenée par la majorité PLR-UDC du parlement, qui avait dans un premier temps refusé d’entrer en matière, qui a ensuite corrigé, à sa sauce, «les chiffres faux» du gouvernement, selon le député Andreas Jurt. Elle a revu à la baisse les rentrées fiscales et à la hausse des charges insuffisamment estimées (pour les hospitalisations extérieures ou pour les subsides des primes maladie). Elle a coupé dans de nombreux domaines, sans véritable ligne, pour contenir le déficit à 11,6 millions, identique à celui du gouvernement.

Le débat parlementaire, très polarisé, parfois marqué par des piques politiciennes ou personnelles, a quelque peu adouci la recette bourgeoise, débouchant sur un déficit de 14,4 millions, qui permet de pousser un ouf de soulagement, mais qui ne satisfait personne. La droite a été battue dans trois domaines qui lui tenaient pourtant à cœur: les montants prévus pour l’hôpital cantonal, l’Université et les institutions pour handicapés, qu’elle voulait rabotés, ont été maintenus. La gauche a perdu dans ses revendications pour augmenter la masse salariale de la fonction publique ou donner davantage de moyens pour les subsides maladie. Le débat est parfois parti dans tous les sens, on a même vu le ministre PS Laurent Kurth prier le groupe parlementaire socialiste d’être raisonnable.

L’essentiel est sauf. Neuchâtel a un budget bricolé pour une année 2016 décisive pour le canton, avec trois scrutins populaires annoncés: de soutien au programme de mobilité en février, puis de réforme du parlement avec une circonscription électorale unique et une réduction à 90 députés, et enfin pour changer complètement de stratégie spatiale pour l’hôpital cantonal. «Refuser le budget aurait donné un signal catastrophique avant d’aborder ces dossiers clé», a noté Laurent Kurth.

S’il a su surmonter ses divergences pour appuyer le programme de mobilité, le parlement neuchâtelois a fait étalage de son incapacité à trouver des consensus en matière financière et d’organisation de l’Etat. Avec son idéologie propre, chaque groupe politique tire la couverture à soi, avec une telle intensité qu’elle menace à tout moment de céder. Elle eût pu exploser mardi en fin de soirée, lorsque les débats ont dérapé. Il y a eu davantage de sérénité jeudi matin, et les groupes ont quelque peu relâché la pression pour s’éviter une crise. Le bricolage budgétaire dit beaucoup d’une classe politique neuchâteloise divisée, qui manque cruellement de leaders capables de prendre de la hauteur.