Pour les cantons romands, «Berne joue au Picsou»
Coronavirus
S’ils comprennent et soutiennent le durcissement des mesures sanitaires, plusieurs gouvernements cantonaux ne cachent pas leur colère face à «la pingrerie» de la Confédération, qui n’a pas augmenté le montant des aides financières

Dans les cantons romands, le sentiment qui prédomine après les annonces du Conseil fédéral est la colère. Malgré l’assouplissement des conditions pour les cas de rigueur, beaucoup estiment que l’aide n’est pas à la hauteur de la crise. «Nous sommes stupéfaits de voir que la Confédération a choisi de fermer les commerces non essentiels sans octroyer aucun franc supplémentaire, a ainsi déploré la présidente du Conseil d’Etat, Anne Emery-Torracinta, en conférence de presse. Lors de la consultation, nous nous étions clairement opposés à toute fermeture sans aides préalables.»
Pour l’heure, seuls 80 millions de francs sont disponibles pour le canton. Bien en dessous des besoins estimés par la cheffe des Finances, Nathalie Fontanet. Selon elle, il faudra environ 340 millions de francs pour indemniser, durant les 6 premiers mois de 2021, les quelque 4000 entreprises qui répondent aux nouveaux critères des cas de rigueur. «Berne joue au Picsou, mais les travailleurs que nous n’aidons pas aujourd’hui seront à l’aide sociale demain, lâche furieuse la magistrate. Genève va assumer ses responsabilités et indemniser ceux qui doivent l’être avec des aides à fonds perdu et des prêts, dans l’attente d’une aide de la Confédération.»
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«Des effets d’annonce»
Le son de cloche est similaire à l’autre bout du Léman, en Valais. S’il comprend les nouvelles mesures sanitaires, liées au variant anglais, Christophe Darbellay, le président du gouvernement, est déçu par les mesures économiques annoncées, qu’il qualifie «d’effet d’annonce». «La Confédération reste pingre et attend les dommages économiques de la troisième vague pour voir ce qu’elle peut faire. Elle débloque moins d’argent que certains pays européens qui ont peu de moyens, mais qui s’endettent», appuie-t-il, énumérant les mesures mises en place au printemps et qui n’existent pas aujourd’hui, comme la simplification des RHT ou les crédits covid. Le démocrate-chrétien poursuit: «Les gens ont besoin d’argent à fonds perdu, très rapidement. Quant aux entreprises qui ne sont pas soumises au principe des cas de rigueur, elles auront peut-être déjà disparu quand les aides arriveront. C’est inadmissible.»
Moins en colère, mais tout aussi critique, Jacques Gerber, ministre jurassien de la Santé et de l’Economie, s’étonne également que Berne n’augmente pas le montant des aides dont «on sait déjà qu’elles ne suffiront pas». L’élu PLR se félicite néanmoins de l’assouplissement des conditions qui va «dans la bonne direction» et permettra une plus grande efficacité. Il en appelle enfin à une stratégie à long terme. «Il faut mettre sur pied un dispositif de soutien financier planifié jusqu’à la fin 2021, plaide-t-il. On sait qu’il y aura des difficultés durant toute cette année. Il est essentiel d’avoir un cadre fixe et arrêter de venir tous les deux mois devant les médias présenter une modification du système d’aide, ce qui plonge l’ensemble de l’économie dans l’incertitude.»
A noter encore que le gouvernement vaudois communiquera officiellement ce jeudi matin lors d’une conférence de presse où sont annoncés quatre conseillers d’Etat.