Cargo Sous Terrain est un projet original, audacieux, moderne, créatif, attractif, sans doute écologique et, comme toute innovation, nimbé d’incertitudes et d’inconnues. Le Conseil fédéral aurait été bien mal inspiré de lui faire barrage. Sa décision de créer les bases légales nécessaires au lancement de ce concept inédit de transport de fret par le sous-sol est parfaitement logique. Il permet ainsi à ses promoteurs, très majoritairement privés, d’apporter la preuve que leur système est réaliste, réalisable, efficace et acceptable pour les collectivités publiques et les populations concernées.

Dans un premier temps, Cargo Sous Terrain ambitionne de raccorder les grands centres de distribution du pays situés autour de Härkingen (SO) à la métropole zurichoise sur une ligne entièrement enterrée longue d’environ 70 kilomètres. Ce serait la première étape d’un réseau plus étendu, qui irriguerait aussi le bassin lémanique, la région de Bâle et la Suisse centrale.

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Il s’agit de construire une voie ferrée souterraine réservée au transport automatisé de marchandises. Son but est de séparer l’acheminement de nourriture et de produits divers des réseaux routiers et ferroviaires habituels, qui seraient ainsi délestés d’une bonne partie du trafic lent. La présence au sein de l’association CST d’acteurs économiques majeurs (grands distributeurs, banques, assurances, entreprises logistiques) donne un crédit supplémentaire à ce projet.

Mais il y a encore loin de la coupe aux lèvres. Les obstacles à surmonter sont nombreux. Le premier tronçon est devisé à 3 milliards de francs. Or, pour ce genre de réalisation, il n’est pas inhabituel – c’est un euphémisme – que la facture gonfle. Comme il faudra creuser le sol se poseront des questions d’ordre écologique, environnemental et phréatique. Il faudra accepter le risque de longues procédures, négocier avec les communes et des propriétaires privés, procéder à des expropriations, verser des indemnités.

Le Conseil fédéral insiste sur la nécessité de conserver la majorité du capital en mains suisses, mais des investisseurs étrangers, notamment français et chinois, font ou ont promis de faire partie de l’aventure. Or, l’une des inquiétudes soulevées lors de la phase de consultation est de savoir qui passera à la caisse si, pour une raison X ou Y, le projet est abandonné en cours de route. Bonne question, merci de l’avoir posée: ce risque ne peut en effet être écarté. Quoi qu’il en soit, et si captivant soit-il, ce projet ne sera jamais prêt en 2030 comme l’espèrent ses promoteurs.