Christian Varone: «J’ai pris cette pierre parce qu’elle était jolie»
ARRESTATION
De retour de Turquie, Christian Varone s’est expliqué vendredi devant la presse. Il affirme ne pas se souvenir en détail de l’aspect de la pierre qu’il a ramassée
La haute silhouette de Christian Varone trace des allers-retours entre le vestibule et la salle boisée de la maison de commune de Savièse. Rentré mercredi soir de Turquie où il avait été arrêté et incarcéré pour avoir emporté dans ses bagages une pierre ayant une probable valeur archéologique, le commandant de la police valaisanne paraît tendu. Sous les plafonds bas, une trentaine de journalistes s’entassent, impatients.
Christian Varone s’installe derrière les micros pour «donner, enfin, ma version des faits». Devant lui, quelques fiches tapées à la machine. «Ce que je vais dire n’est que la stricte vérité et est exactement similaire à ce que j’ai dit au juge turc qui m’a auditionné», commence-t-il. Au cours de la demi-heure que durera la conférence de presse, il parlera à de nombreuses reprises de son «intégrité» et de son «honnêteté».
Pourtant, Christian Varone élude les questions qui portent sur la pierre qu’il avait mise dans ses bagages. «Celle-ci se trouvait au bord d’une route carrossable importante près de Side, je n’ai à aucun moment pensé qu’il pouvait s’agir d’une pièce d’une quelconque valeur. Pour moi, celles-ci doivent être dans un musée ou au moins sur un site archéologique, pas abandonnées au bord d’une route.»
Son avocate en Turquie affirme qu’il s’ agit en fait d’un morceau de marbre provenant d’une colonne romaine. Les journalistes insistent pour que Christian Varone décrive ce que son frère appelait un «caillou» dans la presse. «Je peux seulement vous dire comment je l’ai trouvée», répond Christian Varone. «Elle était sale, ne portait pas d’inscription et devait faire une vingtaine de centimètres. Je pouvais la soulever à une seule main. Je l’ai ramassée parce que je l’ai trouvée jolie.» Jolie, cela ne veut-il pas dire qu’elle avait quelque chose de remarquable? «Peut-être quelque chose dans sa forme mais je ne m’en souviens plus, il faudrait que je la revoie», s’échappe-t-il encore.
Il affirme n’avoir eu aucune connaissance de l’existence de la loi turque sur les biens naturels et culturels, selon laquelle sortir des objets archéologiques du pays est une infraction pénale. «Je ne savais pas que j’enfreignais la loi.» Quelqu’un dans la salle suggère qu’en tant que policier, il devait savoir que l’importation de tels objets est interdite en Suisse. «Je n’ai jamais imaginé que cette pierre avait une quelconque valeur», répète Christian Varone.
Comme à son habitude, il adopte la position humble et discrète d’un homme aux principes solides, voire héroïques. Alors que les jours précédents son frère expliquait que c’était le fils de Christian Varone qui avait emporté cette pierre en souvenir, le père de famille assume aujourd’hui l’entière responsabilité de l’événement. «Je ne veux pas que ma famille y soit mêlée d’une quelconque manière.» Il refuse fermement d’évoquer ses conditions de détention, présente ses excuses à la Turquie et promet de réfléchir à une collaboration culturelle avec ce pays par l’intermédiaire du Département Fédéral des Affaires Etrangères.
«Je suis libre sans aucune condition et sans qu’aucune caution n’ait été demandée», explique-t-il. Il n’a pas eu accès au dossier le concernant et ne sait pas si sa libération équivaut à un acquittement. Il dit attendre un acte écrit qui précisera s’il est inculpé ou pas.
«J’ai avant tout organisé cette rencontre avec la presse pour remercier toutes les personnalités politiques, économiques ou sportives, turques et suisses, qui m’ont apporté leur soutien», conclut-il. Et quand un journaliste évoque à demi-mot l’aide d’un entrepreneur valaisan pour sa libération, il répond que si quelqu’un avait payé quoique ce soit en sa faveur, il le saurait, le juge ayant précisé qu’il était libre «sans condition» et sans versement d’une caution.