La Confédération justifie sa campagne sur l’AI
polémique
Les affiches placardées ces jours dans le cadre de la nouvelle campagne de l’assurance invalidité ont fait réagir plusieurs organisations de défense des handicapés. La Confédération se défend en faisant valoir que les slogans visent à briser les tabous.
L’assurance invalidité assume totalement le côté provocateur de sa nouvelle campagne. Les slogans affichés ces jours visent à briser les tabous, a fait valoir jeudi la Confédération. Il s’agit de montrer que «Les handicapés veulent travailler. Ils n’ont pas forcément une rente AI».
«Vous ne verrez jamais les handicapés au travail». Ce slogan, parmi d’autres, a été placardé dans les rues de Suisse depuis le début de la semaine. Il est désormais accompagné du complément «Tant que nous jetterons leurs CV à la poubelle». Par de telles phrases, l’assurance invalidité (AI) affirme vouloir s’attaquer aux préjugés auxquels sont confrontés au quotidien les personnes atteinte dans leur santé. Des spots télévisés seront diffusés à partir de la semaine prochaine.
Les propos affichés n’ont pas manqué de faire réagir une série d’organisations de défense des handicapés, qui craignent une instrumentalisation et des effets contreproductifs. Désireuse de remettre les pendules à l’heure, l’Office fédéral des assurances sociales (OFAS) a justifié son action lors d’une conférence de presse jeudi. Ces slogans, basés sur le principe du «teasing» (une première phase destinées à interpeller les passants, suivie dans un deuxième temps d’une phase d’explication), visent à susciter la discussion, le but final étant de faciliter l’intégration des personnes handicapées dans le monde du travail comme ambitionné par la 5e révision de l’AI. Or, a assuré le responsable AI à l’OFAS Alard du Bois-Reymond, «il reste encore beaucoup à faire pour changer les mentalités.»
«La société doit être sensibilisée», a renchéri Alex Oberholzer, qui travaille au département communication de l’AI et souffre lui-même d’un handicap. Les enjeux économiques et politiques – réticences des employeurs à engager des handicapés, surtout en temps de crise; pression sur les coûts; assainissement des assurances sociales – obligent, selon lui, l’AI à agir, y compris par une campagne de ce genre.
La démarche de l’OFAS a aussi reçu le soutien du représentant du Centre pour la vie autonome, un mouvement qui a participé au référendum contre la 5e révision de l’AI. Peter Wehrli s’est dit agréablement surpris: «Pour une fois, je dois féliciter l’AI d’avoir le courage de prendre le taureau par les cornes.» A ses yeux, il n’y a pas d’autres moyens pour confronter les gens aux clichés sur les handicapés.
Ces affiches font partie d’une campagne de communication et d’information plus large visant à appuyer la transformation de l’AI d’une assurance de rente en une assurance de réinsertion. Un budget de 6 millions de francs au total est prévu pour quatre ans, soit environ 1,5 million par année, a expliqué Alard du Bois-Reymond.
Le responsable AI a par ailleurs justifié le calendrier actuel par la nécessité de rester souple au regard des débats que la première partie des slogans a d’ores et déjà suscités. Les passants pourront découvrir la seconde partie de ces slogans dès maintenant, alors que sa révélation était prévue initialement la semaine prochaine. Pour M. du Bois-Reymond, le recours à la provocation ne remet pas en cause le sérieux de l’AI et son mandat politique.
Quant à la lettre de protestation envoyée par les autorités de Genève au nouveau chef du Département fédéral de l’intérieur Didier Burkhalter, elle ne l’émeut guère. Il s’agit, d’après lui, d’un cas isolé parmi les cantons, qui s’inscrit dans le contexte politique et électoral genevois.