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Le Conseil d'Etat genevois recourra à de sévères garde-fous pour redresser les finances cantonales

Un premier projet de budget avait été refusé par le Grand Conseil en septembre 2003. Le gouvernement présente une nouvelle version, au déficit moindre. Le trou est tout de même de 392 millions, mais devrait se réduire lors des exercices suivants, selon un plan financier quadriennal qui implique un frein aux dépenses.

Moment très attendu jeudi à la salle de l'Alabama de l'Hôtel de Ville: l'ensemble du Conseil d'Etat genevois (à l'exception de Micheline Spoerri en déplacement à Berne) a présenté sa deuxième mouture de budget 2004. Mais aussi son plan financier quadriennal pour sortir le canton de la spirale infernale des déficits. Il a par ailleurs annoncé le dépôt futur d'un projet de frein à l'endettement.

Après plus de six mois de travaux nécessaires en raison du refus par le Grand Conseil du premier projet de budget, le gouvernement a réussi à réduire le déficit à 392 millions de francs. Président de l'exécutif cantonal, le Vert Robert Cramer juge soutenable l'effort exigé. «Ce budget n'a rien de clinquant, il ne répond pas à des slogans», prévient-il. Un député de la droite parlementaire est plus ironique: «Quand on songe qu'il se situait à 550 millions en septembre, c'est la preuve que le Conseil d'Etat avait une grande marge de manœuvre. Notre rejet du budget d'alors était donc totalement justifié.»

Une dette qui augmente de un milliard en un an

En 2004, les charges courantes s'élèvent à 6,385 milliards et les revenus à 5,993 milliards. La progression des charges est de 0,9% par rapport aux comptes 2003. Quant aux revenus, ils progressent de 124 millions (+2,1%). La dette progresse d'un milliard en un an pour culminer à 12,5 milliards.

Réduction des charges de personnel

Vu «la situation très préoccupante des finances publiques genevoises», la ministre des Finances Martine Brunschwig Graf dit être dans l'obligation d'agir sur la masse salariale de l'Etat. Les dépenses de personnel sont donc au cœur du plan d'austérité du gouvernement. Par rapport aux comptes 2003, celles-ci augmentent de 39,1 millions. Ce sont 23 millions de moins que dans la première mouture de budget.

Comment arrive-t-on à ce résultat? L'indexation, qui ne sera plus semestrielle, mais annuelle, est plafonnée à 0,1%. De plus, le paiement de l'annuité et de la prime de fidélité sera divisé de moitié. Enfin, si l'Etat créé 99 postes supplémentaires à l'Instruction publique pour faire face à la croissance démographique, mais aussi 50 postes pour la police et 19 pour le Palais de justice, il supprime 20 postes dans les autres départements. Martine Brunschwig Graf justifie ces mesures: «On aurait pu être plus brutal, mais il importe de préserver l'équilibre social.»

Investissements à la baisse

Les dépenses d'investissements diminuent de 55 millions. Cela n'empêche pas Genève d'être confronté à un casse-tête: soit le canton investit sans retenue et la dette s'envole, soit il freine son développement. De fait, en regard de l'an dernier, les investissements baissent de 102 millions. Leur taux d'autofinancement passe certes de -55,3% à -33,7%, mais demeure inquiétant. Accentuée par le boulet que représentent les pertes enregistrées par la Fondation de valorisation des actifs de la Banque Cantonale de Genève, l'insuffisance de financement atteint la somme vertigineuse de 915 millions. Par ailleurs, le gouvernement a tranché dans les subventions et dans les dépenses générales.

Recettes fiscales en demi-teinte

Genève bénéficie en partie du lent redémarrage de la conjoncture. Par rapport au premier budget 2004 de septembre, les recettes sont en tout cas évaluées à la hausse pour 68 millions. Les personnes physiques rapporteront 100 millions de plus alors que l'impôt sur le bénéfice des entreprises et le capital diminuera de 45 millions.

Plan financier quadriennal et frein aux dépenses

Le plan financier quadriennal présenté par le Conseil d'Etat promet de vives disputes politiques. Concrètement, l'objectif est d'atteindre l'équilibre budgétaire en 2007 en comptant sur une hausse des recettes fiscales de 4,1% en moyenne. Mais d'ici là, l'Etat enregistrera encore 290 millions de déficit en 2005 et 160 millions l'année suivante.

La limitation de la croissance des dépenses à 1,5% est sans nul doute la mesure la plus impressionnante, quand on sait qu'elles ont augmenté de 6% en moyenne au cours des trois dernières années. Mais le plan prévoit aussi de limiter la progression de la masse salariale à 1,6% et de geler les effectifs. Quant à la dette, le Conseil d'Etat espère qu'elle n'ira pas au-delà de 13,5 milliards. Un objectif que plusieurs députés jugent trop optimiste.

Les investissements seront plafonnés. Le gouvernement n'entend toutefois pas se contenter de ce plan quadriennal. Hormis son projet d'évaluer toutes les prestations de l'Etat comme l'a fait avant lui le canton de Berne, il entend aussi instituer un frein aux dépenses qui pourrait ressembler au modèle valaisan: soit mettre en place un mécanisme menant aussi bien à l'équilibre du budget et des comptes, mais aussi des investissements.