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Le Conseil d'Etat neuchâtelois accusé de friser la propagande

Les libéraux et les radicaux s'en prennent au document émis par le gouvernement en vue du scrutin cantonal du 28 mars

La tension est vive à Neuchâtel, dans la perspective des votations cantonales du 28 mars. Mercredi, lors de la session du Grand Conseil, libéraux et radicaux ont déposé une interpellation concernant le contenu de la brochure Vot'info, qui sera envoyée ces prochains jours aux citoyens avec leur matériel de vote. Motif de leur colère: «Le Conseil d'Etat ne fait pas de l'information, il publie un pamphlet, à tel point qu'il aurait pu rebaptiser ce document Vot'intox.

Désaccords

Comportant 23 pages, la traditionnelle brochure émise par le gouvernement avant chaque scrutin résume les positions de toutes les parties, concernant les trois objets et les deux contre-projets qui seront soumis au peuple. Problème: le Conseil d'Etat et une majorité du Grand Conseil ne sont pas d'accord. Alors que le premier appelle les citoyens à tout refuser en bloc afin d'éviter de «péjorer gravement les finances publiques», la majorité bourgeoise du parlement soutient les deux contre-projets.

Selon les libéraux et les radicaux, le Conseil d'Etat n'aurait pas dû «préciser son opposition à tous les objets et les raisons de celle-ci», mais «avoir l'élégance de s'abstenir d'exprimer son opposition, qui était par ailleurs déjà largement connue». Ils regrettent également de ne pas avoir pu développer eux-mêmes leur argumentaire pour défendre les deux contre-projets adoptés par une majorité du Grand Conseil. «Le Conseil d'Etat a résumé la manière dont nous les avons conçus, indique Damien Cottier, président du groupe radical. Mais la brochure ne contient pas un mot sur le fond, sur notre volonté de baisser les impôts pour tous.»

Pris à partie, le président du Conseil d'Etat, Thierry Béguin, réfute toute critique: «Nous voulons bien que cette campagne exacerbe certaines passions, mais nous n'acceptons pas le terme de pamphlet. Ou alors il faut le démontrer, ce qui n'a pas été le cas.» Si le ton général et la mise en page sont discutables (la position du gouvernement attire l'œil grâce à un fond vert), libéraux et radicaux n'ont pas su mettre en évidence d'éléments précis pouvant être remis en cause. Hormis, peut-être, l'impact sur les communes de l'initiative fiscale de la Chambre du commerce et de l'industrie (CNCI), la Chambre et le gouvernement continuant à avancer des chiffres différents (LT du 24.02.2004).

«Un mauvais procès»

Concernant le bien – fondé de la prise de position de l'exécutif, Thierry Béguin considère que c'est «un mauvais procès. Nous ne menons pas une campagne active, juge-t-il. Nous nous exprimons quand nous en avons l'occasion. Le Conseil d'Etat n'est pas une collection d'ectoplasmes. Il ne reste pas inerte.»

Pour le constitutionnaliste Jean-François Aubert, il n'existe pas de règles constitutionnelles précises concernant les possibilités du Conseil d'Etat à mener campagne: «C'est une question de doigté. Mais une chose est sûre: le gouvernement n'est pas le porte-parole du Grand Conseil. Quand une loi est adoptée, il doit veiller à son application. Mais avant cela, il a le droit de donner son avis.» Jean-François Aubert estime que, dans un cas comme celui là, le Grand Conseil devrait pouvoir rédiger lui-même le texte appelé à paraître dans Vot'info. «C'est important, car chacun a le droit de donner son opinion. On peut imaginer que, dans le futur, cette tâche soit attribuée au bureau du parlement.»