Le Conseil fédéral ouvre la porte au mariage pour tous
Droit de la Famille
La présidente de la Confédération, Simonetta Sommaruga, souhaite adapter le Code civil à la réalité du XXIe siècle. Elle met plusieurs options sur la table afin d’ouvrir le débat
Le Conseil fédéral ouvre la porte au mariage pour tous
Réforme Plusieurs options sur la table pour adapter le droit de la famille au XXIe siècle
Simonetta Sommaruga a fait du droit de la famille une de ses priorités. Moins de trois ans après le dépôt d’un postulat de sa collègue de parti Jacqueline Fehr (PS/ZH), la cheffe du Département de justice et police a présenté un rapport qui propose un large catalogue de mesures pour adapter la législation aux nouvelles réalités de la famille. Le texte de 56 pages doit avant tout permettre d’ouvrir le débat. «Le Conseil fédéral ne veut pas imposer ses solutions depuis en haut», souligne la Bernoise. Il ouvre la porte au mariage pour tous ou au pacte civil de solidarité (pacs) à la française, des instruments susceptibles de mettre la loi en phase avec la Suisse d’aujourd’hui.
Lorsque le Code civil a été créé, en 1907, le mariage était un passage quasi obligatoire. C’est sur lui que se fondaient les familles, en tant que communautés de parents et d’enfants. Le concubinage était interdit dans de nombreux cantons et a été poursuivi pénalement jusque dans les années 1970. Les divorces ont longtemps été très rares, faisant l’objet d’une forte réprobation sociale. L’homosexualité a été poursuivie pénalement jusqu’à l’entrée en vigueur du Code pénal, en 1942.
En une vingtaine d’années, le développement du concubinage, la banalisation du divorce, la multiplication des familles recomposées et la volonté des couples homosexuels d’obtenir les mêmes droits que les autres ont changé la donne. «Quel que soit notre avis sur ces changements, nous devons adapter le cadre légal, souligne la présidente de la Confédération. Il faut pouvoir regarder la réalité en face.»
Le Conseil fédéral ne donne pas de préférences sur les différents scénarios. A la fin du rapport, il propose trois pistes prioritaires. Première d’entre elles: le partenariat enregistré, introduit en 2007 et réservé aux couples du même sexe, pourrait être assimilé au mariage sur le plan du droit. En 2013, le législateur l’a rapproché sur le plan juridique de l’union entre un homme et une femme en appliquant le même régime en matière de droit du nom. Comme les époux, les partenaires enregistrés gardent leur nom, à moins qu’ils n’optent pour un nom commun.
«Fortes résistances»
Pour le gouvernement, le plus «simple», sur le plan juridique, serait d’ouvrir le mariage aux couples homosexuels, comme l’a fait la France avec le mariage pour tous.
Une démarche dans ce sens a été initiée par le parlement. Le 20 février dernier, la Commission des affaires juridiques du Conseil national a donné suite à l’initiative parlementaire «Mariage civil pour tous» du groupe vert’libéral. Le projet est encore très loin d’aboutir, comme le reconnaît Simonetta Sommaruga en insistant sur «les fortes résistances» qui existent à ce sujet.
La proposition des vert’libéraux s’oppose frontalement à l’initiative du PDC «Pour le couple et la famille – Non à la pénalisation du mariage», qui devrait être soumise au peuple en 2016. Le texte propose d’inscrire dans la Constitution fédérale que le mariage soit réservé à l’union d’un homme et d’une femme. Un oui du peuple et des cantons enterrerait pour longtemps l’idée du mariage pour tous.
Le Conseil fédéral évoque également la possibilité d’introduire un pacs à la sauce helvète – une proposition immédiatement dénoncée par l’UDC. En France, quatre couples hétérosexuels sur dix choisissent cette formule. Simonetta Sommaruga a insisté sur le fait qu’il n’était pas question de réguler la situation des concubins. Une clause de rigueur pour protéger les personnes qui se retrouveraient dans le besoin suite à une séparation pourrait être envisagée.