Le Conseil fédéral veut opposer un contre-projet direct à l'initiative RASA
9 février
Le gouvernement joue la montre. Il recommande le rejet de l'initiative populaire RASA qui souhaite biffer le vote du 9 février 2014. Mais il compte y opposer un contre-projet direct. Il a désormais six mois pour en articuler le contenu

Le Conseil fédéral aura attendu le dernier moment pour trancher. Un an après le dépôt de l’initiative populaire RASA (Raus aus der Sackgasse, ou Sortons de l’impasse), il a décidé de rejeter le texte tout en y opposant un contre-projet direct, c’est-à-dire une modification constitutionnelle. Défendue par un parterre d’intellectuels, l’initiative RASA veut biffer purement et simplement l’article 121a de la Constitution, ce qui reviendrait à annuler au niveau du texte fondateur le vote du 9 février 2014.
Pour mémoire: Le texte de l’initiative «contre l’immigration de masse», que l’initiative RASA veut biffer de la Constitution
Le Conseil fédéral évoque des raisons «tenant au fonctionnement démocratique» pour justifier son rejet de l’initiative RASA. Il ne serait pas juste de revenir sur le résultat d’un vote populaire dans un laps de temps si court. Il estime aussi que la migration doit être mieux contrôlée par des mesures ciblées et en «mettant pleinement à profit le potentiel de main-d’œuvre indigène». Mais il partage le but principal des initiants: «Le Conseil fédéral est d’avis, comme les auteurs de l’initiative, que la Suisse a besoin de relations stables et favorables avec l’UE et que le maintien des accords bilatéraux revêt une importance essentielle», écrit-il. Il se positionne ainsi en faveur d’un contre-projet direct.
Prochaine étape à fin avril
Le gouvernement n’a pas encore défini le contenu du contre-projet. Il a six mois pour soumettre son message au Parlement, jusqu’au 27 avril. Il joue la montre, indiquant qu’il souhaite attendre la fin des débats au Parlement sur la mise en œuvre de l’initiative «contre l’immigration de masse» avant de se pencher sur la teneur d’un contre-projet direct.
Plusieurs pistes sont d’ores et déjà sur la table. Elles vont d’une correction de l’article 121a actuel (on bifferait les termes de contingents et de quotas) à une primauté de l’Accord sur la libre circulation des personnes en matière de migration, en passant par un ancrage des bilatérales dans la Constitution ou encore un nouvel article dit de la concordance, proposé par le think tank Foraus.
Lire aussi: La proposition de contre-projet de Foraus
Les contours du contre-projet dépendront bien entendu du projet de loi de mise en œuvre de l’initiative «contre l’immigration de masse» tel qu’il sortira des délibérations du Parlement cet hiver. Par la suite, les initiants de RASA peuvent encore retirer leur initiative si le contre-projet adopté les satisfait. Dans notre édition de mercredi, le professeur Andreas Auer, l’un des instigateurs de l’initiative pose ses conditions: «Elle (ndlr: l’initiative RASA) ne peut être retirée qu’à deux conditions. Premièrement, que les accords bilatéraux soient maintenus comme approche centrale des relations entre la Suisse et l’Union européenne (UE), alors qu’ils sont directement menacés depuis le vote de février 2014. Deuxièmement, que la sécurité du droit soit rétablie, par une clarification durable de nos relations avec l’UE. Le flou actuel est catastrophique, il bloque les grands projets de recherche et dissuade les entreprises de s’établir.»
A noter encore qu’un contre-projet direct signifie une modification constitutionnelle, et donc le passage au vote d’une proposition soumise à la double majorité (peuple et cantons).