Malgré les tentatives de l’UDC, la Suisse ne réintroduira pas le contrôle systématique aux frontières. L’armée n’aura pas à prêter main forte aux garde-frontières. Le Conseil des Etats a repoussé lundi une motion d’Alex Kuprecht (UDC/SZ) exigeant du Conseil fédéral qu’il réagisse dans l’urgence en mettant en place des contrôles stationnaires. La session extraordinaire sur la migration demandée par les élus UDC aura débouché sur un très vif débat, opposant la présidente de la Confédération, Simonetta Sommaruga, aux sénateurs de la droite nationale.

Avec le moratoire sur l’asile, le contrôle systématique aux frontières et l’engagement de l’armée figurent parmi les mesures que l’UDC réclame depuis l’été, face à l’afflux de réfugiés en Europe. Les attentats de Paris ont redonné des arguments à la droite, qui accuse la présidente et ministre de la Justice de ne plus rien maîtriser et de menacer la sécurité du pays.

Pour le sénateur schwytzois Alex Kuprecht, «le système Dublin/Schengen s’est effondré, plusieurs Etats ont pris des mesures d’urgences en remettant en place des contrôles systématiques». Si le Conseil fédéral n’agit pas rapidement la Suisse risque de remplacer l’Allemagne et l’Autriche pour devenir la nouvelle cible d’une migration non contrôlée, a-t-il averti. Pour les garde-frontières, pour les polices cantonales, la situation devient insupportable, selon lui. Et de demander de les soulager avec l’aide de la sécurité militaire.

En réalité, c’est le procès de la politique d’asile menée par Simonetta Sommaruga que le conseiller aux Etats schwytzois a tenté de mener. Dans son viseur, les coûts de l’asile, les faibles chances d’intégration, le risque de faire exploser les chiffres de l’aide sociale et les charges pour les communes. Et d’accuser le Conseil fédéral de ne plus avoir la situation en mains.

De quoi s’attirer une cinglante réplique, sur le fond, quoique très diplomatique dans la forme, de la part de la conseillère fédérale. Car l’Europe, a-t-elle rappelé, a dû faire face cette année à une situation extraordinaire aussi bien à cause de la vague migratoire sans précédent, mais aussi des attentats des islamistes radicaux. «Citez-moi un seul pays qui puise se vanter d’avoir la situation en mains face au terrorisme, a lancé Simonetta Sommaruga, et dites-moi pourquoi nous ne pouvons toujours pas maîtriser la guerre en Syrie».

Mais a-t-elle contre-attaqué, «pensez-vous que les autorités de ce pays, que le Conseil fédéral soit assez idiot pour ne rien entreprendre afin de faire face à la situation»? De citer les états-majors sur l’asile ou la sécurité mis en place et qui livrent chaque jour leurs évaluations. Or ces spécialistes estiment que la situation à laquelle est confrontée la Suisse n’est en rien comparable avec celle que connaissent nos voisins Allemands, Autrichiens ou Français. Il n’y a donc pas lieu de surréagir avec l’engagement de l’armée.

Certes, Alex Kuprecht s’est repris. Il ne demande pas un contrôle des quelque 700 000 personnes qui franchissent chaque jour la frontière nationale ni des 1800 km de frontières. Mais alors «qu’est-ce que vous entendez par contrôle systématique si on n’inspecte qu’une personne sur dix? Avant l’accord de Schengen, les garde-frontières ne pouvaient vérifier que 3% des passages», a relevé la ministre insistant sur le renforcement des contrôles mobiles et dans les trains.

Par ailleurs, Simonetta Sommaruga a rappelé qu’en matière d’asile la révision de loi décidée par le parlement mais combattu par l’UDC, avait précisément pour but d’accélérer les procédures. Et ainsi de permettre un renvoi plus rapide des requérants déboutés.