Tandis que le chanvrier valaisan Bernard Rappaz entame ce lundi son 75e jour de grève de la faim à l’Hôpital de Genève, où les médecins refusent de le nourrir contre son gré malgré les injonctions du Tribunal fédéral (TF) et du Tribunal cantonal valaisan (LT du 06.11.2010), le débat enfle entre éthiciens et juristes.

Dans 24 Heures de samedi, Alex Mauron, directeur de l’institut d’éthique biomédicale de l’Université de Genève, déclare que les médecins «n’ont pas à faire le jeu du pouvoir judiciaire». Le jugement du TF, «assez étrange et incohérent», exprime «la protection un peu panique de l’Etat, comme si la crédibilité de la justice était attachée au destin d’un seul homme». Dans Le Matin Dimanche, l’avocat genevois Marc Bonnant critique aussi l’arrêt du TF: les juges ont estimé que la crédibilité de la justice l’emporte sur «le droit sacré de mourir». La Fédération des médecins suisses a «pris très courageusement position» en rejetant cette décision, qui exprime «une vengeance collective» et la rigidité de juges «jaloux de leurs prérogatives».

Le même journal revient sur l’état de santé de Bernard Rappaz, qu’une photographie montre amaigri. Sa rédactrice en chef (valaisanne) Ariane Dayer s’indigne de la mort désormais possible du chanvrier; son avis est à l’opposé de celui de Marc Bonnant: «La liberté de mourir? Quelle liberté quand on est prisonnier? Pourquoi établit-on mille surveillances pour éviter que les détenus ne se suicident si c’est pour laisser celui-là le faire?» Pour elle, c’est aux instances valaisannes – politiques, religieuses – d’agir. Jusqu’ici, aucune ne l’a fait. Le Grand Conseil se prononcera sur la demande de grâce du chanvrier le 18 novembre, pas avant.