Éducation
La fermeture des établissements scolaires ordonnée par le Conseil fédéral ne rime pas avec «vacances». En attendant que des méthodes concrètes soient mises en place, petit tour de ce qu’il convient de faire pour encourager son enfant à étudier

Les écoliers étaient nombreux à afficher de larges sourires à la sortie des classes lorsque, vendredi dernier, le Conseil fédéral a annoncé la fermeture des établissements scolaires pour six semaines. La mesure ne rime pourtant pas avec «grandes vacances», et sauf annonce contraire, l’année scolaire doit poursuivre son cours. A distance. Au Département vaudois de la formation, de la jeunesse et de la culture (DFJC), un groupe de travail a été mis en place afin d’y réfléchir. «Notre pari est d’ouvrir une plateforme en ligne cantonale suffisamment simple d’utilisation pour que les enseignants continuent à travailler avec leurs élèves. Le défi c’est qu’en cas d’absence physique, le contact entre eux puisse être le plus possible maintenu», dévoile pour l’heure Serge Martin, directeur général adjoint du DFJC.
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Des tâches propices aux exercices
Oui, mais… Dans l’attente qu’une telle plateforme numérique voie le jour et soit peut-être adoptée par d’autres cantons, les familles suisses se voient contraintes de s’organiser pour que les travaux demandés par les enseignants soient réalisés, et pour occuper les enfants qui n’ont peut-être pas encore reçu de programme spécifique.
Alors, des initiatives émergent, à l’instar de celle de Kakoro Lingua qui met gratuitement à disposition des vidéos d’apprentissage des langues, et les différents départements cantonaux responsables de la jeunesse dressent des listes vers des ressources pédagogiques sur leurs sites internet respectifs. Néanmoins, Serge Martin rappelle qu'«il existe une multitude de sites éducatifs et pédagogiques auxquels les élèves ont déjà accès. Mais les visites sur ces sites ne donnent aucune garantie que les élèves progresseront de manière structurée dans leurs apprentissages, selon une méthodologie appropriée. Il ne suffit pas de cliquer seul sur des liens pour apprendre. L’interaction avec les enseignants reste nécessaire.»
La structure, nous y voilà. Si se retrouver du jour au lendemain avec un ou plusieurs enfants à domicile est déjà un changement en soi, recréer l’école à la maison constitue un pas supplémentaire.
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Nicolas Rihs, enseignant à l’établissement Elisabeth de Portes à Borex (VD) et père de famille, distingue deux problématiques: occuper l’enfant avant de recevoir du travail, puis continuer le travail scolaire une fois les consignes reçues. «Dans le premier cas, les activités de tous les jours peuvent être propices aux exercices. En cuisine, on peut proposer à l’enfant de faire la lecture de la recette, ou lui demander de calculer de combien de sucre il a besoin. Ensuite, pour ce qui est du travail, je dirais qu’il faut définir un cadre aussi clair qu’à l’école. Les élèves ont l’habitude de vivre des périodes de 45 minutes, ils savent quand ils commencent et quand ils vont s’arrêter. Durant les temps d’étude, l’adulte devrait rester à proximité, disponible, même si l’enfant fait sa fiche seul car, s’il bloque et doit attendre que l’adulte revienne, il va se déconcentrer. […] Evidemment, il faut faire preuve de patience, et avec ses propres enfants, c’est plus difficile… A l'école, la relation d’enseignant-élève ne se négocie pas. A la maison, il faut essayer de la mettre en place.»
Un cadre et un peu de créativité
Poser un cadre clair et le formuler d’entente avec l’enfant, c’est aussi ce que préconisent Ariane Salamin et Vincent Quartier, tous deux psychologues spécialistes de l’enfance et de l’adolescence. Il s’agit, pour les parents, de ne pas se mettre trop de pression, tout en établissant un «contrat» quant aux horaires et à l’usage des écrans. Les fiches d’exercices peuvent être imprimées et l’ordinateur réservé au visionnage de vidéos et à quelques activités interactives. «L’idéal reste de discuter avec l’enfant de comment on va s’organiser: s’habiller le matin, essayer entre 9h et 11h de travailler selon ce que l’école demande. Tout dépend de la disponibilité que l’on peut dégager. Chaque parent fera au mieux, mais il ne faut être ni trop ambitieux ni laisser toute la place aux écrans», détaille Vincent Quartier.
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Le spécialiste suggère notamment, concernant les adolescents, de présenter cette nouvelle temporalité comme un challenge et une période intéressante pour développer des projets personnels créatifs. Un ton positif que partage Ariane Salamin: «Rappelons que, selon la situation familiale, il peut être compliqué d’accompagner l’enfant si les parents ne sont pas francophones, s’ils travaillent. C’est là que les initiatives solidaires entrent en jeu. Mais j’irais vraiment dans l’idée de rassurer: tout ce qui sera mis en œuvre sera bien. Plus les parents se feront du souci, plus la concentration sera compliquée, plus l’autorité sera mise en question. Il faut se demander: comment le fait-on ensemble?»