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Eveline Widmer-Schlumpf lâchée par Christophe Darbellay

Plutôt que de soutenir dans l’immédiat «leur» conseillère fédérale, les partis du centre, à commencer par le président du PDC, envisagent d’attaquer un siège PLR à la prochaine occasion.

La conseillère fédérale Eveline Widmer-Schlumpf durant une conférence de presse, le 21 octobre 2015. — © Keystone
La conseillère fédérale Eveline Widmer-Schlumpf durant une conférence de presse, le 21 octobre 2015. — © Keystone

Le centre s’effrite sous les pieds d’Eveline Widmer-Schlumpf. En reconnaissant que l’UDC a droit à deux sièges au Conseil fédéral, le président du Parti démocrate-chrétien (PDC), Christophe Darbellay, procède envers la conseillère fédérale à un lâchage qui ne dit pas son nom.

Christophe Darbellay ne réclame pas ouvertement le retrait de la ministre des finances. Mais il ne témoigne d'aucune volonté ni d'aucun intérêt à maintenir la politicienne grisonne dans le contexte actuel, si l’on en croit l’interview qu’il a accordée au Matin Dimanche.

Lorenz Hess, le vice-président du Parti bourgeois démocratique (PBD), a réagi avec colère à cette attitude sur les ondes de la RTS La Première. Le moment choisi par Christophe Darbellay pour sa déclaration en faveur des deux sièges UDC est "incompréhensible", proteste-t-il en substance, "car les discussions entre partis du centre sur leur collaboration pour les quatre prochaines années en sont encore à leur début. »

Le vice-président du PBS a pourtant donné lui-même l’impression dans la presse dominicale que la conseillère fédérale était abandonnée par les siens, faisant voir que l’objectif n’était pas de « fonder rapidement un club de soutien à Mme Widmer-Schlumpf.» Il s'est efforcé dans la journée de dimanche de rectifier cette interprétation: « Elle a toujours toutes ses chances, si elle décide de se présenter. »

Base éparpillée

Les responsables du PDC, du PBD et des Vert’libéraux se sont rencontrés cette semaine en Suisse centrale. Mais à défaut d’une alliance au centre, dont Eveline Widmer-Schlumpf aurait bien besoin, il en est plutôt ressorti que l’élection du Conseil fédéral devait être traitée indépendamment d’un éventuel accord entre ces partis.

"Le PBD ne donne ne pas vraiment l’impression d’une formation qui cherche des appuis et qui serait à la veille d’un grand combat », a souligné Christophe Darbellay dans l’interview déjà citée. Celui qui a été l’un des artisans de la non-réélection de Christoph Blocher (2007) relève que l’éparpillement du centre est l’une des causes du résultat de dimanche dernier.

Il se projette du coup au-delà de l’échéance immédiate : «Le centre retrouvera un deuxième siège au Conseil fédéral lorsqu’il en aura acquis la légitimité. » Il pourrait alors viser un des sièges du Parti libéral-radical (PLR), lors d’une prochaine vacance, ajoute le président du PDC, sans doute soucieux de protéger à court terme le siège de son propre parti au gouvernement.

Retrait samedi?

Une semaine après les élections fédérales, le sort d’Eveline Widmer-Schlumpf continue donc de faire l’objet de toutes les spéculations. Le Sonntags-Blick prédit qu’elle annoncera son retrait samedi prochain lors du congrès du PBD. Et cela même si une majorité pour sa réélection reste possible au parlement après le scrutin de dimanche.

La politicienne grisonne a été ébranlée par les résultats dans son canton, où l’UDC a engrangé plus du double des suffrages de son propre parti, avance l'hebdomadaire zurichois. Sur le plan national, seul le fait que les partis du centre resserrent les rangs autour d’elle pourrait la pousser à se maintenir. Or, comme on vient de le voir, c’est loin d’être le cas.

Les prises de position en faveur des deux sièges UDC tendent pour l'heure à se multiplier. C'est le cas pour l'organisation faîtière de l'économie suisse, par la voix de son président Heinz Karrer.  Celui-ci s'est prononcé "pour le retour à la formule magique" dans la NZZ am Sonntag. Bien sûr, l'UDC  doit « s’engager en faveur de la concordance et d’un travail constructif », mais Heinz Karrer ne semble pas douter que ce parti soit à même de présenter un candidat crédible. Sans vouloir citer de nom pour autant.

Le grand obstacle reste la position de l'UDC sur les relations avec l'Europe. Heinz Karrer constate néanmoins que "plusieurs responsables de l’UDC ont déjà dit qu’ils pouvaient se rallier à l’idée d’une clause de sauvegarde dans la mise en œuvre de l’initiative « contre l’immigration de masse». Une telle clause préserverait les intérêts de l’économie, tout en permettant de freiner l’immigration lorsque celle-ci serait extraordinairement forte.

Cette clause de protection devrait être imposée unilatéralement par le Conseil fédéral, si les négociations avec l’UE ne permettent pas d’aboutir à un accord, estime le président d’Economiesuisse. Le Conseil fédéral entendra mercredi un premier rapport du négociateur en chef Jacques de Watteville, après ses entretiens à Bruxelles.