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Face aux critiques, le Conseil fédéral défend son aide à l’Ukraine

Alors qu’un institut allemand de Kiel classe très mal la Suisse en comparaison internationale, le gouvernement accorde un nouveau paquet d’aide de 140 millions et estime que les cantons et la population civile ont su répondre présent

«Face au drame ukrainien, c’est toute la Suisse qui a répondu présent. Oui, elle en fait assez», a déclaré le conseiller fédéral Ignazio Cassis, accompagné d’Alain Berset, mercredi 22 février devant la presse. — © PETER SCHNEIDER / keystone-sda.ch
«Face au drame ukrainien, c’est toute la Suisse qui a répondu présent. Oui, elle en fait assez», a déclaré le conseiller fédéral Ignazio Cassis, accompagné d’Alain Berset, mercredi 22 février devant la presse. — © PETER SCHNEIDER / keystone-sda.ch

Une année après le début de la grande offensive lancée par la Russie en Ukraine, le Conseil fédéral a dressé un premier bilan de son engagement et approuvé un nouveau paquet d’aide de 140 millions, dont 26 sont destinés à la Moldavie. A l’occasion de sa conférence de presse, le président de la Confédération, Alain Berset, a une nouvelle fois condamné l’agression russe, «qui constitue une violation claire et grave de la charte de l’ONU et du droit international», tout en réitérant son appel «à un retrait des troupes russes de la totalité du territoire de l’Ukraine».

Depuis le 24 février 2022, la Suisse a débloqué environ 1,3 milliard de francs pour des mesures d’aide: plus de 270 millions dans le cadre de la coopération internationale, et 1 milliard pour l’accueil des réfugiés ukrainiens. En Ukraine, quelque 18 millions de personnes ont actuellement besoin d’aide en raison de la guerre. Dans son nouveau paquet, la Suisse prévoit d’agir là où elle dispose d’un savoir-faire spécifique, soit par exemple dans la construction d’abris pour les écoles, la réparation des dommages causés aux hôpitaux et à l’infrastructure énergétique, dans le déminage humanitaire ou encore la fourniture d’un soutien psychosocial.

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«Oui, la Suisse en fait assez»

Mais la Suisse est-elle si généreuse qu’elle le prétend? Ces derniers jours, une étude d’un institut allemand pour l’économie mondiale de Kiel a semé le doute. La Suisse n’y figure qu’en 32e position sur 40 pays examinés. Selon ces chiffres, elle ne consacrerait que 0,03% de son PIB à l’Ukraine, loin derrière le Danemark (0,47%), les Etats-Unis (0,37%), l’Allemagne (0,36%) ou la France (0,31%). Cette statistique a piqué au vif le ministre des Affaires étrangères, Ignazio Cassis. «Elle est déjà dépassée avec notre nouveau paquet d’aide», s’est-il agacé. Il a encore précisé que la Suisse était un pays fédéraliste et que, dans ce contexte, les données de cet institut ne pouvaient être qu'incomplètes. «Cette statistique ne prend pas en compte l’aide des cantons et de la société civile», a encore déploré Ignazio Cassis. Or, la Chaîne du Bonheur a récolté 130 millions de francs et la Croix-Rouge suisse 50 millions. Cela sans parler des particuliers, qui hébergent toujours quelque 25 000 personnes ayant fui l’Ukraine, que le conseiller fédéral a chaleureusement remerciés. A la troisième question posée par un journaliste à ce sujet, le Tessinois a clos le débat. «Face au drame ukrainien, c’est toute la Suisse qui a répondu présent. Oui, elle en fait assez.»

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Si Ignazio Cassis s’est un brin irrité, c’est qu’il s’est beaucoup démené pour mettre sur pied avec succès, en juillet dernier, la Conférence pour la reconstruction de l’Ukraine. Ce sont là des efforts diplomatiques impossibles à chiffrer, mais qui ont soudé 41 pays et 18 organisations internationales, qui se sont accordés sur le cadre des principes devant guider cette reconstruction.

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Une ligne conservatrice sur la neutralité

Ce mercredi, le Conseil fédéral a aussi été interpellé sur la réexportation de munitions à la suite de demandes venues d’Allemagne, du Danemark et d’Espagne. A ce sujet, aussi bien Alain Berset qu’Ignazio Cassis sont restés sur leur ligne, très conservatrice malgré les critiques venues de l’étranger. C’est toujours non à toute exportation d’armes, qu’elle soit directe ou indirecte, au nom de la neutralité. «D’éventuelles réexportations ne correspondent pas au cadre de notre neutralité. De plus, elles n’apporteraient pas une aide militaire décisive à l’Ukraine», a justifié Ignazio Cassis. Alors que ce mardi, la Commission de sécurité du Conseil national a trouvé un compromis sous l’impulsion du PLR et du PS, le Conseil fédéral attend désormais la décision du plénum des deux Chambres.

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Alors que la guerre en Ukraine semble s’enliser, le Conseil fédéral veut encore croire en ses efforts diplomatiques. Ce mercredi soir, Ignazio Cassis s’est envolé pour New York où il participera à une séance du Conseil de sécurité de l’ONU. Quant à Alain Berset, il est resté prudent lorsqu’on lui a demandé s’il envisageait de rendre visite à son homologue Volodymyr Zelensky: «Pourquoi pas, mais seulement si une telle visite fait sens», a-t-il répondu. En sous-entendant clairement qu’actuellement, ce n’était pas le cas.