En 2016, aux Etats-Unis, le monde découvrait comment Facebook pouvait être utilisé pour influencer une élection. Trois ans plus tard – et une amende de 5 milliards de dollars infligée à la compagnie par l’Organisation américaine de protection des consommateurs –, le réseau social tient à montrer qu’il prend les choses au sérieux. Jusqu’en Suisse.

Depuis août, informe le nouveau communicant de Facebook Suisse spécialement dépêché à Berne ce mercredi - qui ne souhaite pas être nommée «pour des raisons de politique interne» - la compagnie permet aux utilisateurs helvétiques, même dépourvus de compte, de se pencher sur l’activité publicitaire des partis. Le site espère ainsi «inciter à la transparence». Celle-ci demeure toutefois partielle: contrairement au reste de l’Union européenne, les formations politiques suisses ne sont en effet pas obligées de signaler leurs dépenses publicitaires.

La transparence a encore du chemin à faire

«La démarche est volontaire, confirme le porte-parole domicilié à Berlin, mais la plupart des partis ont accepté de divulguer leurs informations. Sauf l’UDC.» En l’absence du premier parti de Suisse, les informations sur la campagne fédérale en ligne sont lacunaires. Tout de même, l’outil intitulé Facebook Ad Library permet de constater que le PLR est de très loin le plus prolifique sur Facebook, avec pas moins de 3500 campagnes ciblées différentes. Viennent ensuite – très loin derrière – les autres grandes formations politiques, qui comptent entre 10 et 60 campagnes, pas plus.

Mais le nombre de réclames ne fait pas tout, puisque la visibilité de chacune dépend aussi de l’argent investi. Or le système disponible en Suisse ne permet que d’accéder à une fourchette de montants: «moins de 100 francs», par exemple. Pour l’UE, Facebook affiche pourtant les chiffres précis investis par chaque formation. Pourquoi cette différence? «Nous avons discuté du modèle à mettre en place avec les autorités suisses, explique le porte-parole de Facebook. Après cette rencontre, nous avons opté pour la version «light» du logiciel.» Nous n’aurons pas plus de détails. Dans ces conditions, difficile de se faire une idée précise des sommes en jeu.

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Outre cette nouvelle fonction, Facebook ne s’arrête pas là pour protéger l’intégrité des élections, précise le porte-parole. La firme combat par exemple les fake news, dont elle limite la visibilité et analyse le contenu en partenariat avec des agences de presse. Ces dernières rédigent de courts textes accrochés aux articles concernés pour distinguer le vrai du faux. «Mais en Suisse nous n’avons pas encore trouvé de partenaire de la sorte», ajoute l’employé du groupe. Facebook supprime également les faux comptes suisses, souligne-t-il. Depuis où cette opération est-elle effectuée? Le communicant l’ignore. Pas en Suisse.

Opération séduction bleue

Après plusieurs années difficiles en termes de réputation et une avalanche de questions sur la capacité de la firme à gérer sa créature, Facebook a décidé d’agir. En ce qui concerne la sécurité des données tout d’abord, en investissant 3,7 milliards de dollars dans ce segment en 2019. Sur sa transparence ensuite, comme le montre cette nouvelle communication proactive auprès des journalistes.

D’habitude très réservée, la firme américaine cherche manifestement à se montrer plus accessible. D’autant qu’en Suisse elle investit. Fin septembre, la multinationale annonçait qu’elle allait doubler le nombre d’employés dans ses bureaux de Zurich, pour passer de 80 à 160 personnes. Ce mercredi, le porte-parole de la firme articulait même un nombre proche du triplement des effectifs.