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Les femmes seront mieux protégées contre les violences conjugales

Le Conseil fédéral adopte une série de mesures pour lutter contre les violences domestiques, parmi lesquelles le port du bracelet électronique

La conseillère fédérale Simonetta Sommaruga défendra son nouveau dispositif devant le Parlement. — © ANTHONY ANEX / KEYSTONE
La conseillère fédérale Simonetta Sommaruga défendra son nouveau dispositif devant le Parlement. — © ANTHONY ANEX / KEYSTONE

Ce n’est pas le premier paquet de mesures que la Suisse adopte pour lutter contre les violences domestiques. Sauf que, après une courte accalmie, les chiffres sont repartis à la hausse. En 2016, la police a enregistré 17 685 infractions commises dans la sphère privée, un chiffre en hausse de 13% par rapport à 2014. L’an dernier, dix-neuf personnes dont dix-huit femmes sont décédées des suites de tels actes. On recense également 52 tentatives d’homicide.

«Inacceptable», a lancé la conseillère fédérale Simonetta Sommaruga, venue présenter à la presse la loi sur l’amélioration de la protection des victimes de violences. D’autant plus que les statistiques n’incluent que les actes de violence dénoncés à la justice.

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Port d’un bracelet électronique

Mesure phare: l’instauration d’un bracelet électronique pour les auteurs de violences. Mais le Conseil fédéral a atténué son projet initial soumis à consultation. La surveillance ne sera pas active sept jours sur sept et 24 heures sur 24. Un tel dispositif permettrait à la police d’intervenir immédiatement en cas d’irrespect d’une interdiction d’approche, mais il a été jugé trop lourd à gérer par les cantons, surtout en termes de ressources humaines et financières.

De plus, la surveillance électronique n’est pas sans défauts: la précision de localisation est variable selon les systèmes et les interruptions du signalement peuvent être fréquentes. Enfin, même une intervention rapide ne protège pas forcément la personne menacée.

Surveillance passive

Le message adressé au parlement se contente donc de proposer une surveillance passive, qui pourra être confiée à la police ou à une entreprise privée. C’est-à-dire que le bracelet électronique servira a posteriori à vérifier que les mesures d’éloignement, qui peuvent aujourd’hui déjà être décidées, ont été appliquées.

Le Conseil fédéral croit cependant en l’efficacité de cette solution. Il estime que l’auteur de violences, sachant que toute violation sera enregistrée, se conformera très vraisemblablement aux mesures d’éloignement prises à son encontre. La surveillance passive accroîtra aussi la capacité de la victime à fournir les preuves d’une telle violation.

Plusieurs garde-fous

La pose d’un bracelet électronique, au poignet ou à la cheville, est une mesure qui porte considérablement atteinte à la sphère privée. Raison pour laquelle le Conseil fédéral y ajoute plusieurs garde-fous. Un tribunal pourra ordonner ce type de surveillance uniquement s’il est requis et proportionné. Le juge devra faire une pesée d’intérêts, estimer le risque et s’assurer que d’autres moyens moins intrusifs ont échoué ou apparaissent insuffisants. La durée de la mesure sera également limitée à six mois, renouvelables. Enfin, les données enregistrées serviront uniquement de preuve si la victime se manifeste pour dénoncer une violation de l’interdiction d’approche.

Les associations de soutien aux femmes victimes de violences seront probablement déçues du projet sur d’autres points. Le Conseil fédéral renonce en effet à obliger l’auteur de violences à suivre un programme de prévention, malgré une forte demande des milieux concernés, et laisse aux juges le soin de trancher cette question. Il a également décidé de ne pas édicter de normes pénales punissant expressément le harcèlement obsessionnel. Il estime que les dispositions déjà en vigueur sont suffisantes et il invite les cantons à coordonner leurs méthodes d’approche de cette problématique.

Procédure facilitée

Parmi les autres mesures visant à améliorer la protection des victimes de violences, le Conseil fédéral a encore décidé de supprimer certaines entraves procédurales. Ainsi, la victime qui porte une affaire de violence, de menaces ou de harcèlement devant le tribunal ne devra plus assumer les frais de procédure. La communication entre les différents services impliqués sera facilitée.

Enfin, sur le plan pénal, la décision de poursuivre une procédure ne dépendra plus exclusivement de la volonté de la victime, qui peut, dans certains cas, être mise sous pression par le prévenu, explique le Conseil fédéral. Cette décision incombera aux autorités. La suspension de la procédure ne sera possible que si elle permet de stabiliser ou d’améliorer la situation, mais elle sera exclue en cas de soupçons de violences répétées. Le nombre de procédures pénales pourrait ainsi considérablement s’accroître.

Transmis maintenant au parlement, le dispositif prévu sera encore rediscuté et probablement modifié sur certains points avant d’entrer en vigueur. Quel qu’il soit au final, il n’empêche pas les cantons d’aller au-delà.