A ce sujet: Transparence politique: Fribourg donnera le cap
La surprise est d’autant plus grande que le Grand Conseil et le Conseil d’Etat appelaient tous les deux à refuser l’objet. Déposée il y a trois ans avec 7000 signatures, il s’agit de la première initiative cantonale lancée par les sections jeunesse des partis de gauche dans l’histoire du canton de Fribourg. Un coup gagnant. «Nous avons prouvé avec ce résultat que nous ne sommes pas seulement là pour faire du bruit, mais que nous, les jeunes, représentons une véritable force de proposition, relève Sami Lamhangar, coprésident des Jeunes socialistes fribourgeois, euphorique. C’est surtout une magnifique victoire pour la démocratie.»
Comptes à publier
Finalement défendue par l’ensemble des forces de gauche, l’initiative oblige les partis politiques ainsi que les comités de campagne à publier leurs comptes, en particulier les dons reçus de la part d’entreprises ou de personnes physiques, à la seule exception, pour ces dernières, des versements inférieurs à 5000 francs par année. «La droite a parlé de voyeurisme, nous avons parlé de transparence», analyse Benoît Piller, président des socialistes fribourgeois.
De côté de la droite, qui s’opposait à l’initiative, on affiche une certaine fatalité. «Nous prenons acte de la décision du peuple, souligne Sébastien Dorthe, président du PLR fribourgeois. Nous nous montrerons transparents, nous n’avons rien à cacher. Mais nous resterons néanmoins vigilants, afin que la loi d’application soit simple et efficace et ne se transforme pas en la création d’une machinerie bureaucratique.»
Non-campagne
La droite demeure néanmoins un peu incrédule. Cette défaite survient après une drôle de non-campagne. L’initiative a été longtemps oubliée, toutes les forces des partis se portant sur l’élection complémentaire au Conseil d’Etat et sur les votations fédérales. PDC, PLR et UDC ne se sont lancés que très tardivement dans la bataille, avec une conférence de presse commune à seulement deux semaines du scrutin.
«Notre parti s’est fortement engagé contre «No Billag», confirme André Schoenenweid, président du PDC fribourgeois. On ne s’est pas occupé tout de suite de cette initiative. Nous continuons de penser que ce n’est pas à l’Etat de contrôler les partis. Mais il faut reconnaître que notre époque est marquée par un besoin de transparence.» L’homme estime également que les récents scandales de CarPostal et du directeur de la Raiffeisen ont pu pousser les électeurs à souhaiter davantage de contrôle sur la vie publique.
Schwyz dit également oui
Signe des temps, ce dimanche, la population de Schwyz a également accepté une initiative similaire sur la transparence politique, lancée aussi par les Jeunes socialistes. Le score beaucoup plus serré (50,3% de oui) n’en demeure pas moins une surprise et une victoire de la gauche dans un canton réputé pour son conservatisme. En 2013 et 2014, la population de Bâle-Campagne et d’Argovie avait refusé des textes similaires.
Fribourg et Schwyz deviennent les quatrième et cinquième cantons à disposer d’une réglementation sur la transparence politique, après Genève, Neuchâtel et le Tessin. Les deux votations cantonales de ce week-end sont très encourageantes pour l’initiative fédérale sur le même thème qui a été déposée à la fin de l’année passée. Le Conseil fédéral l’a rejetée et a indiqué qu’il n’allait pas lui opposer de contre-projet. Pourtant, la Suisse demeure l’une des dernières démocraties occidentales à ne pas avoir légiféré sur la question, ce qui lui vaut d’être régulièrement montrée du doigt au niveau international par le Groupe d’Etats contre la corruption (Greco).
La population suisse pourrait être appelée à voter sur cette initiative fédérale déjà l’année prochaine, en 2019.