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Comme les régies publiques, les institutions subventionnées devront privilégier le recrutement de chômeurs résidents
Genève élargit sa préférence cantonale à l’embauche
Emploi Comme les régies publiques, les institutions subventionnées devront privilégier le recrutement de chômeurs résidents
A Genève, toutes les entreprises qui reçoivent une aide de l’Etat devront jouer le jeu de la préférence cantonale. Le conseiller d’Etat MCG Mauro Poggia, chargé de l’Emploi, a annoncé vendredi l’entrée en vigueur d’une nouvelle directive obligeant les organismes subventionnés à annoncer leurs places vacantes en primeur à l’Office cantonal de l’emploi (OCE).
Destinée à favoriser la réinsertion des personnes sans emploi dans le canton de Suisse qui détient le record de chômage (5,3% en octobre, soit 12 382 chômeurs), la mesure est déjà en vigueur au sein de l’administration cantonale et des régies publiques (transports publics, hôpitaux universitaires, Services industriels, aéroport). Les organismes concernés doivent recevoir les demandeurs d’emploi proposés par l’OCE (au maximum cinq personnes correspondant au profil) et, à compétences égales, privilégier leur embauche face à un travailleur résidant en France voisine ou dans un autre canton. Si la procédure n’aboutit pas à un engagement, elles devront en communiquer les motifs à l’OCE.
250 employeurs concernés
D’ici à lundi, quelque 250 entreprises ou associations concernées, parmi lesquelles les EMS, mais aussi des organisations internationales telles que le CICR, recevront une lettre les informant de leurs nouvelles obligations. Cette directive, unique en Suisse, doit «donner les moyens aux demandeurs d’emploi locaux d’être compétitifs sur un marché du travail de plus en plus agressif», affirme Mauro Poggia. La mesure s’inscrit dans la politique de préférence cantonale revendiquée par le MCG en réaction à l’augmentation des travailleurs frontaliers dans le canton. Selon le ministre, qui préfère parler de préférence aux chômeurs, «les réticences idéologiques contre cette politique s’estompent». Dans un climat marqué par le vote du 9 février contre l’immigration, les pouvoirs publics s’empressent de signaler à la population qu’ils se soucient de l’emploi.
Geste symbolique ou véritable incitation? Charles Barbey, nouveau directeur de l’OCE depuis août, parie sur un effet boule de neige au sein des entreprises. Au cours des dix derniers mois, les régies publiques soumises à l’obligation de privilégier l’emploi local ont embauché trois fois plus de chômeurs inscrits à l’OCE que ceux qui étaient assignés par l’office, souligne-t-il.
Pour le professeur d’économie de l’Université de Genève Yves Flückiger, «il est impossible de mesurer l’impact de cette directive, mais elle a le mérite de signaler à la population que le gouvernement prend en compte la situation des chômeurs». Le spécialiste met en garde contre les risques d’un «effet pervers» si ces nouvelles règles venaient à allonger les procédures de recrutement ou conduire les chômeurs à accumuler les entretiens sans embauche. L’efficacité de cette mesure, au final, dépendra de la capacité de l’OCE à sélectionner les bons candidats. Après deux mouvements de grève successifs, l’office fait d’ailleurs l’objet d’une réorganisation destinée à réduire le nombre de dossiers traités par les conseillers en personnel et améliorer le suivi des demandeurs d’emploi.
Prochaine étape, pour Mauro Poggia: inciter les entreprises privées à embaucher local. «Les employeurs ont compris qu’une trop grande ouverture avait un effet néfaste», dit l’élu, évoquant la possibilité, à l’avenir, de favoriser sur les marchés publics les entreprises qui engageront des chômeurs en fin de droit.