Christina Kitsos: La participation des communes à la politique d’hébergement d’urgence est une avancée historique que je salue. Elle va nous permettre d’améliorer sensiblement la prise en charge des personnes sans-abri. Au lendemain du vote, nous avons immédiatement entamé des discussions avec mes services ainsi qu’avec les associations partenaires pour organiser l’ouverture de 200 places supplémentaires. Elles devraient intervenir graduellement encore en avril, même si j’ai conscience que c’est ambitieux. Dès lors que les communes soutiennent financièrement ce dispositif, il m’apparaît indispensable de les renseigner clairement, notamment sur la répartition de la prise en charge entre le service social de la ville et les associations, sur les coûts des différentes structures et le profil des bénéficiaires. Ce vote est également une marque de confiance et de reconnaissance de l’expertise de la ville depuis plus de vingt ans.
Remonté par ces personnes se retrouvant à la rue, le conseiller d’Etat chargé de la cohésion sociale, Thierry Apothéloz, a brandi la menace d’un projet de loi urgent et la transmission de la facture de prise en charge des sans-abri si un accord n’était pas trouvé entre la ville et les communes. Comment avez-vous pris cette déclaration?
Comme une déclaration tardive. Pendant tous les débats autour de la LAPSA, je me suis battue pour y intégrer une clé de répartition financière, ce qui n’a pas été retenu. Cela nous aurait permis d’éviter ces fermetures. Nous courrions en effet le risque qu’un accord entre les communes prenne trop de temps. Le canton aurait dû jouer son rôle.
Vous êtes actuellement à l’œuvre pour obtenir cette clé de répartition, est-ce le fait d’un manquement du canton?
Oui, ceci aurait dû figurer dans la LAPSA. Aujourd’hui, je prends mon bâton de pèlerin pour trouver une solution avec les communes et pérenniser les dispositifs.
Avec le soutien de l’ACG, accordé en urgence, une solution est trouvée pour 2022. Va-t-on ouvrir et fermer des places au gré des saisons et des discussions financières à l’avenir?
Grâce à l’accord trouvé et aux 6,2 millions débloqués, l’objectif est d’avoir 500 places pérennes, toute l’année. Cela contribuera grandement à la qualité de l’accueil et de la prise en charge des différents publics. Les personnes sans-abri ont besoin de stabilité pour se réinsérer dans la société. Les professionnels du terrain pourront ainsi se concentrer sur l’accompagnement des personnes plutôt qu’investir du temps et de l’énergie dans la recherche de lieux et les déménagements répétés. Il faut aussi répondre aux besoins spécifiques des différents publics, comme ceux présentant des addictions, ou les personnes âgées. Aujourd’hui, cette prise en charge n’est pas suffisamment développée par le canton. Les personnes qui sont éligibles à des droits sociaux devraient bénéficier d’un suivi individuel de l’Hospice général et ne pas se retrouver dans nos dispositifs d’urgence. Derrière chaque personne, il y a un drame personnel mais aussi une faillite des politiques publiques pour prévenir ces situations. Face à ces échecs, les villes sont souvent le dernier rempart contre les inégalités et les injustices.