Une cristallisation parmi d’autres divergences majeures que traverse ce secteur à Genève. Bataille d’avis juridiques, tensions entre les tenants d’une centralisation et les partisans d’une politique de proximité traversent la FASe depuis sa création. Les questions ouvertes par ce transfert de charges attisent d’anciennes revendications.
«Ça coince sur les compétences», résume Xavier Magnin, président sortant de l’Association des communes genevoises. Car l’ACG demande en contrepartie du transfert une meilleure gouvernance. «L’idée est de mettre en place un système équivalent à celui existant pour l’animation parascolaire, soit un groupement intercommunal, mais avec tous les partenaires, précise Xavier Magnin. Or, le canton n’a pas encore l’air prêt à lâcher», poursuit-il.
Crispations entre autonomie et centralisation
Un groupement intercommunal, l’idée n’est guère enthousiasmante pour la Fédération des centres de loisirs (FCLR), qui n’y voit pas un signe d’indépendance. Elle demande d’ailleurs depuis longtemps une plus grande autonomie des centres, gérés sous la forme associative. «Sur le terrain, on a trop souvent entendu qu’à la fin, c’est celui qui paie qui commande», réagit Pascal Thurnherr, président de la FCLR. Selon Joëlle Libois, à la tête de la Haute école de travail social, prendre exemple sur l’animation parascolaire c’est «oublier» que celle-ci «n’a pas de dynamique associative».
Ces oppositions ne sont pas nouvelles. Dans son rapport sur l’animation socioculturelle publié en mai, la Cour des comptes relève que «les relations de confiance entre les différentes parties prenantes, nécessaires pour le bon fonctionnement de ce processus, ne sont pas toujours garanties, notamment en raison de tensions autour de l’autonomie des centres. En outre, les outils de gestion de projet […] sont encore trop perçus comme des moyens de contrôle plutôt que comme des outils de connaissance et d’apprentissage».
Témoignage d’une confiance plus que fragile, les délégués du personnel des centres ont décidé de se retirer du conseil il y a dix ans, lors de l’engagement de coordinateurs par la FASe. Ces derniers ont un pouvoir d’intervention lors d’engagements de nouveaux collaborateurs. Ils sont invités à participer aux colloques d’équipes. Quatre avis juridiques contradictoires, sollicités tantôt par le secrétariat général de la FASe, tantôt par la FCLR, n’ont pas réussi à les mettre d’accord sur la question de savoir qui est l’employeur de qui, et selon quelles responsabilités.
Suites politiques
Du côté de la FASe, on craint que le potentiel retrait du canton entraîne une «perte de cohérence» et l’arrivée «de 45 approches différentes». «Ce n’est pas qu’une question financière, expose Yann Boggio, secrétaire générale de la FASe. Il y a clairement des besoins locaux à satisfaire, mais nous devons tous être garants d’une certaine cohésion à l’échelle du canton et du maintien du partenariat entre les parties de la fondation», poursuit-il. Pour Xavier Magnin, une certaine centralisation est nécessaire à la FASe: «Lorsqu’une demande émane de la Confédération, un outil comme la FASe est indispensable. On l’a notamment vu lors des mesures sanitaires, ou lorsqu’il a fallu un interlocuteur concernant la déradicalisation des jeunes». La FCLR annonce quant à elle qu’elle lancera un référendum si elle n’obtient pas des garanties formelles quant au maintien de l’autonomie et de la représentation associatives dans la future gouvernance.
Sollicité, le Département de la cohésion sociale indique que le canton souhaite, lui, garder une participation financière de 6,5% environ sur le budget de la FASe. Ceci afin de continuer à participer au conseil de fondation, mais également pour financer les projets de portée cantonale. Le conseiller d’Etat Thierry Apothéloz est très concerné par ce sujet, puisqu’il a siégé plus de douze ans au sein du conseil de fondation de la FASe comme représentant des communes et a été membre du comité de la FCLR.