A Genève, le référendum contre l’aide d’urgence a abouti
Précarité
Opposés au fonds cantonal d’indemnisation de 15 millions de francs pour les plus démunis, l’UDC et le MCG ont déposé lundi leur référendum, muni de 7017 signatures. Au même moment, les autorités dressaient le bilan de l’aide alimentaire fournie durant l’été

Les opposants au fonds d’urgence cantonal sont parvenus à leurs fins. Lundi matin, l’UDC et le MCG ont déposé un référendum muni de 7017 signatures, soit 30% de plus que le nombre requis de 5320 paraphes, contre le projet de loi du Conseil d’Etat qui prévoit d’indemniser, à hauteur de 15 millions de francs, les travailleurs précaires ou sans statut légal frappés par la crise du Covid-19 et ne bénéficiant d’aucune aide fédérale ou cantonale. Une réponse définitive est attendue pour mi-octobre, mais, sauf surprise majeure, le référendum devrait aboutir.
Hasard du calendrier, le canton et la ville de Genève présentaient aujourd’hui même un bilan de l’aide alimentaire fournie durant l’été. Organisées aux Vernets durant la crise du Covid-19, les distributions de vivres ont été décentralisées à partir du 15 juin. Depuis, 60 000 paniers ont été délivrés dans sept communes, sous la houlette des Colis du cœur. Chaque semaine, quelque 8420 personnes en situation de forte précarité en ont bénéficié. Face aux besoins, le canton a décidé de poursuivre les distributions, mais sur trois sites uniquement, l’un en ville de Genève, l’autre à Carouge. Le troisième lieu doit encore être validé.
L’aide alimentaire se poursuit
Pour le conseiller d’Etat Thierry Apothéloz, chef du Département de la cohésion sociale, la nécessité de poursuivre l’aide alimentaire illustre le niveau de précarité dans lequel se trouvent certains habitants. «Dans l’attente d’une mise en œuvre de la loi visant à indemniser les pertes de revenus liées aux mesures de lutte contre le Covid-19, frappée d’un référendum, l’aide alimentaire d’urgence intervient comme une action face aux conséquences économiques et sociales de la pandémie», a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse.
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Autrement dit une mesure provisoire, dans l’attente d’un fonds d’urgence désormais sur la sellette. «Pas question de favoriser ouvertement le travail illégal ou non déclaré»: c’est avec ce slogan que les opposants au projet ont fait campagne cet été afin de donner la possibilité aux Genevois de voter. «Début juillet, le démarrage a été très lent, mais ces trois dernières semaines la machine s’est emballée, souligne André Pfeffer, député UDC à l’origine du référendum. Nous avons reçu beaucoup de soutien dans le milieu professionnel, à commencer par le Groupement genevois d’entreprises du bâtiment et du génie civil, mais aussi au sein du PLR.»
«Une question de principe»
Pour le MCG, l’UDC et une partie de la droite, l’Etat ne doit pas combler les manquements d’employeurs peu scrupuleux qui ont licencié leur femme de ménage au cœur de la crise, les projetant ainsi dans la précarité. L’argument d’urgence absolue émis par le canton reste à leurs yeux peu pertinent. «C’est une question de principe, martèle André Pfeffer. L’Etat veut indemniser des travailleurs non déclarés à hauteur de 80% sans justificatifs de revenus, en se basant sur leur simple bonne foi. Cela va à l’encontre du bon sens, des entreprises responsables, mais aussi des travailleurs précaires pour qui les problèmes de fond vont perdurer.»
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Quid des personnes dans le besoin qui ont fait la queue durant plusieurs heures aux Vernets pour recevoir un colis de produits de première nécessité d’une valeur de 20 francs? «Ces personnes doivent être aidées», concède André Pfeffer, pour qui la distribution de chèques alimentaires constitue une bonne solution. A ses yeux, le fonds d’urgence est un aveu de faiblesse de la gauche: «L’Etat aurait dû forcer les employeurs défaillants à assumer leurs responsabilités, idem pour les propriétaires peu scrupuleux qui profitent de la détresse des sans-papiers en pratiquant des sous-locations abusives. Au lieu de ça, il préfère distribuer l’argent des contribuables sans vérification.»