A Genève, le tram du Grand-Saconnex est accepté d’un poil
Votations
AbonnéPar 89 voix de différence, les Saconnésiens acceptent le projet d’extension de la ligne 15, central pour l’avenir de la mobilité genevoise mais «démesuré» aux yeux des référendaires

C’est l’histoire d’un tram important, devisé à 193 millions de francs, dont le destin est ballotté par quelques poignées de citoyens. Alors que 824 signatures avaient suffi à faire aboutir un référendum communal contre le projet, 89 voix seulement ont fait pencher la balance ce dimanche en faveur du «oui». Cela correspond à 51,5%, alors que 2898 votes ont été enregistrés, soit un taux de participation de 38,8%.
Le vote portait sur une transaction foncière liée au projet d’extension de la ligne 15, qui doit à l’horizon 2025 devenir une ligne transfrontalière à destination de Ferney-Voltaire, en passant par les Nations et le Grand-Saconnex. Dans un secteur où 85% des déplacements vers le centre-ville se font en voiture, le «tram des Nations», avec ses 5,5 km de nouvelle ligne, ses 10 stations et sa cadence de 6 minutes, doit permettre d’effectuer un transfert modal vers les transports en commun.
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Verrée de réconciliation
Le comité référendaire, principalement composé de citoyens et d’associations de quartier, craignait la perte de végétation due au projet (160 arbres coupés, mais que la commune promet de replanter à double) ainsi que la fermeture de plusieurs axes routiers, qui selon eux créeront des problèmes de circulation dans les autres rues du Grand-Saconnex. Didier Duret, mandataire du comité référendaire, n’est pas amer malgré le résultat serré: «Notre objectif a été atteint: on a joué à plein notre rôle de lanceur d’alerte, ce qui a permis à tous les citoyens de s’informer et de s’exprimer sur un objet d’importance majeure pour la commune. Nous avons mis en évidence les failles du projet.»
Après une campagne devenue tendue au fil des semaines, Didier Duret «invite les autorités communales à stopper les attaques contre les citoyens soutenant le non», et annonce l’organisation d’une «verrée de réconciliation» mercredi prochain. «Nous voulons apaiser le débat», assure le référendaire, qui continue d’espérer une modification du projet: «Si le canton est ouvert à l’idée de nous écouter, nous sommes également ouverts. Les arbres ne sont pas encore coupés, et la problématique de préservation des espaces arborés dépasse le Grand-Saconnex. Ce n’est pas en replantant à double que l’on règle le problème.»
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Début des travaux en 2023
Quant au comité du oui, composé des Vert·e·s, du PS, du Centre, de Pro Vélo et de l’ATE, il se «réjouit» de ce vote dans un communiqué de presse: «Ce vote démontre que la population saconnésienne s’est approprié ce projet. Nous espérons qu’il sera possible, comme cela a été convenu, que les travaux de construction puissent débuter dès l’ouverture de la route des Nations, c’est-à-dire dès la fin de l’année 2023. […]. Si un nombre important d’éléments patrimoniaux et végétaux seront préservés, nous ne nous réjouissons pas de la coupe d’un certain nombre d’arbres. Cette décision a été prise après concertation et après une pesée des intérêts en faveur de ce projet efficace, avisé et harmonieux.»
Le Conseil administratif, de son côté, a décidé de ne pas s’exprimer de vive voix, en raison des tensions de la campagne. Il a toutefois envoyé un communiqué de presse, dans lequel il «se réjouit particulièrement que l’intérêt général à long terme de la population ait été perçu à travers ce choix démocratique. […] Vis-à-vis de la population qui a exprimé lors de ce vote des craintes absolument respectables en matière d’impact paysager, le Conseil administratif s’engage a minima à ce que les compensations promises soient effectivement réalisées, ainsi qu’à assurer comme de coutume un suivi strict du chantier afin d’identifier et d’exploiter toutes les possibilités d’optimisation qui pourraient encore survenir.»
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Pour rappel, même s’il avait connu une autre issue, ce vote n’aurait pas enterré le «tram des Nations» pour autant. Considéré comme un projet d’importance régionale et financé en partie par la Confédération, il aurait pu être passé en force par les autorités, en activant la loi fédérale sur l’expropriation.