Un «mépris pour la Genève locale et internationale»: dans une tribune parue vendredi dans nos colonnes, un comité de six acteurs politiques et économiques genevois dénonce le projet de transfert du département «Actualité» de la RTS à Lausanne à l’horizon 2024. Un déménagement qui toucherait 200 personnes. Pascal Crittin, directeur de la RTS, répond aux critiques du comité.

Lire l’opinion du comité: Démantèlement de la tour SSR: mépris pour la Genève locale et internationale

Le Temps: Le comité craint un «démantèlement de la tour SSR» à Genève, que répondez-vous?

Pascal Crittin: Il n’y a pas de démantèlement. La tour n’est pas à vendre. J’ajoute encore que le thème n’est pas à l’ordre du jour de la prochaine réunion du conseil d’administration de la SSR contrairement à ce qu’on a pu entendre.

Un déménagement du département «Actualité» à Lausanne a pourtant été annoncé pour 2024…

C’est l’un des scénarios envisagés, mais aucune décision n’a été prise pour l’instant. L’objectif est de maintenir deux sites équilibrés entre Genève et Lausanne en cassant la stricte séparation entre télévision et radio qui découle d’une vision ancienne des médias. Nous voulons créer une cohérence d’activités entre les différentes entités rédactionnelles thématiques (sport, jeunesse, info, culture, magazines, etc.). La frontière entre la télévision et la radio tend à disparaître. Dans cette optique, les deux sites doivent être capables de produire de la radio, de la télévision et du digital. Encore une fois, plusieurs scénarios sont possibles, nous prendrons position cet automne.

La SSR a un mandat de service public à honorer mais doit se transformer. C’est ce que nous comptons faire avec la réorganisation

Pascal Crittin

Dans cette nouvelle équation, Genève ne risque-t-elle tout de même pas d’être lésée? Le comité souligne qu’aucune compensation ou garantie n’a été donnée à ce jour…

Je comprends l’émotion que nos réflexions suscitent, mais il ne faut pas penser de manière unilatérale. Les équilibres sont en train d’être étudiés. Certaines activités pourraient être rapatriées de Lausanne à Genève. Nous tenons à garder une part importante des activités à Genève et surtout à travailler sur ses spécificités. L’une des pistes est de développer à Genève un centre média dédié à la Genève internationale. Nous communiquerons prochainement à ce sujet. De manière générale, les bureaux régionaux vont demeurer. La RTS n’est pas que genevoise ou lausannoise mais romande et même nationale, avec un ancrage dans tous les cantons romands. Cet ADN va perdurer, contrairement à ce que prétend le comité. Je reste d’ailleurs ouvert à la discussion et compte leur répondre.

Les Genevois ont rejeté massivement l’initiative «No Billag»; un transfert, ne serait-ce pas une drôle de manière de les remercier?

J’ai entendu les revendications de nombreux citoyens durant la campagne. Ils n’ont pas voté pour que rien ne change. Ils veulent un service public plus moderne, innovant, efficient. La SSR a un mandat de service public à honorer mais doit se transformer. C’est ce que nous comptons faire avec la réorganisation qui induit, certes, un changement historique, mais porte aussi une vision d’avenir.

A ce propos, où en est le projet de campus à l’EPFL?

Le bâtiment a été mis à l’enquête publique, les services compétents testent sa constructibilité au maximum de ses capacités, soit 800 à 900 personnes. Quant aux activités qu’il va abriter, les réflexions sont en cours. Nous attendons de connaître le sort des six initiatives parlementaires qui veulent fixer les lieux de production de la SSR dans la loi. Les commissions du National et des Etats ont déjà refusé les textes, mais ils doivent encore être traités en plénière. Ces initiatives sont extrêmement contraignantes, elles figent le service public dans une vision des années 60.

Ce projet d’investissement va-t-il permettre de réaliser les 100 millions de francs d’économies requis par la direction?

Le bâtiment de la RTS à l’EPFL est un investissement amorti sur 40-50 ans. D’autres pistes d’économies sont envisagées dans le cadre du projet de réorganisation. Nous devons notamment réduire de 25% nos surfaces d’occupation au niveau suisse, et la RTS y contribuera. Selon les scénarios privilégiés, certaines surfaces de la tour pourraient être louées pour limiter l’impact des économies sur l’offre et l’emploi.