Gianna Luzio, la femme dans l’ombre des ténors du PDC
Politique
La nouvelle secrétaire générale du PDC est une Grisonne maîtrisant les quatre langues nationales qui veut d’abord jouer un rôle de «médiatrice» au sein du parti

Depuis octobre dernier, le PDC a une nouvelle secrétaire générale: Gianna Luzio (38 ans) a succédé à Béatrice Wertli. Mariée, sans enfant, cette Grisonne a grandi à Savognin dans un environnement plurilingue. Elle suit l’école primaire en romanche, puis l’école secondaire en allemand, tout en se familiarisant avec le français et l’italien. «Un cadeau que d’apprendre toutes ces langues», dit-elle dans ce sourire qu’elle a presque toujours aux lèvres.
S’il fallait choisir un homme ou une femme incarnant la Suisse plurilingue, ce serait donc elle, assurément. Pas étonnant dès lors qu’elle se retrouve à un poste clé dans un parti souvent appelé à jouer les arbitres. «La Suisse a plus que jamais besoin d’un centre fort. Il y a déjà trop de partis qui se plaisent à polariser et à affirmer leur profil plutôt qu’à trouver des solutions consensuelles», assène-t-elle.
Lire aussi: La douce brise du PLR et le vent agité du PDC
Un rôle de médiatrice
A la lumière des projecteurs, Gianna Luzio préfère l’ombre des coulisses. Elle aurait pu, elle aurait dû se destiner à une carrière politique active. Elle vient d’une famille PDC: son père et son grand-père ont tous deux siégé au Grand Conseil grison. En 2006, elle est même élue députée suppléante dans ce même parlement. Le tremplin idéal pour plonger dans l’arène politique.
Mais après des études de géographie et d’économie, elle est happée par les arcanes de la politique, là où se préparent certes les grandes décisions, mais très loin des tribunes où l’on déclame les slogans. Elle est engagée à la Délégation des finances des Chambres et au Secrétariat d’Etat à l’économie (Seco). En 2013, elle passe au Département fédéral de l’intérieur (DFI), où elle devient l’une des conseillères spécialistes du conseiller fédéral Alain Berset.
C’est dire qu’elle a eu le temps non seulement de se forger un solide réseau dans la capitale fédérale, mais aussi d’acquérir une bonne connaissance des dossiers. Pourtant, elle reste très prudente lorsqu’on lui demande de prendre position sur des questions pointues. «Je conçois mon rôle comme médiatrice au sein du parti en tant que secrétaire générale», précise-t-elle. Dans l’immédiat, sa priorité est de restructurer et professionnaliser les structures du parti – qui emploie une vingtaine de collaborateurs – après plusieurs départs aux postes clés. Entre le président Gerhard Pfister et elle, les rôles sont donc très clairs: le premier occupe la scène médiatique, tandis qu’elle coordonne les activités dans l’ombre des ténors.
Elle assume son féminisme
Gianna Luzio ne parle pas volontiers d’elle-même. «C’est une femme discrète, chaleureuse, très à l’écoute des autres», dit-on dans son entourage. «Une femme déterminée, qui sait ce qu’elle veut», ajoute-t-on. Elle assume le terme de «féministe». En 1993, alors qu’elle n’a que 13 ans, elle raconte qu’elle a vécu intensément – avec toute sa classe qui suit l’événement en direct à la télévision – le psychodrame qui débouche sur l’élection de Ruth Dreifuss au Conseil fédéral. Après la démission d’Elisabeth Kopp, la Suisse retrouvait enfin une femme au gouvernement. «J’ai été aussi émue que fière.»
Reste à savoir dans quelle mesure le PDC participera à la grève des femmes du 14 juin prochain. Cela fera l’objet d’une discussion au sein des femmes PDC avec leur présidente Babette Sigg. «En matière d’égalité, il reste beaucoup à faire en Suisse, non seulement sur le plan des salaires, mais aussi pour une meilleure conciliation des vies professionnelle et familiale des femmes et des hommes», souligne Gianna Luzio.
Lire également: Egalité, le combat de toutes et de tous