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La grande bataille sur les «juges étrangers» a commencé

Alors que l'UDC plébiscite son initiative «d'autodétermination», un comité rassemblant 137 parlementaires fédéraux s'est formé pour la combattre

Magdalena Martullo Blocher à l'assemblée des délégués de L'UDC, Unteraegeri, 25 août 2018. — © Keystone / ALEXANDRA WEY
Magdalena Martullo Blocher à l'assemblée des délégués de L'UDC, Unteraegeri, 25 août 2018. — © Keystone / ALEXANDRA WEY

C'était ce week end la grande rentrée politique des partis: pas moins de quatre d'entre eux - l'UDC, le PBD, les Vert'libéraux et les Verts - étaient réunis en assemblée générale. Mais si les trois objets soumis en votation le 23 septembre prochain ne suscitent guère les passions, tous les regards se braquent déjà sur l'échéance 25 novembre, date du scrutin sur l'initiative de l'UDC pour la primauté du droit suisse face aux «juges étrangers», dite «d'autodétermination».

A propos de ce congrès: L'UDC raille ses adversaires politiques

A Unterägeri dans le canton de Zoug, l'UDC n'avait même pas organisé de débat contradictoire. Ses 400 délégués ont ainsi plébiscité sans surprise leur propre initiative à l'unanimité. Le plus grand parti de Suisse avait mobilisé tous ses ténors actuels: Magdalena Martullo - la fille de Christoph Blocher -, Thomas Matter, Roger Köppel et autres Gregor Rutz.

«Au pays de Guillaume Tell»

Pour l'UDC, de son propre aveu, l'enjeu est «énorme», et même doublement. Sur le plan du contenu d'abord: cette initiative touche à la souveraineté du pays, le principal cheval de bataille du part. Sur le plan stratégique ensuite: une victoire en novembre prochain placerait l'UDC sur une orbite idéale à dix mois des prochaines élections alors que ce parti risque d'être privé des thèmes de l'Europe et de l'immigration.

D'emblée, Thomas Matter a fait appel aux mythes. «Nous autres Suisses du pays de Guillaume Tell, nous continuons de refuser de saluer le chapeau du bailli Gessler». Pour lui, cette initiative «ne concerne ni les droits de l'homme ni la sécurité du droit». C'est la démocratie directe qui est en danger. «Voulons-nous que l'étranger décide à notre place?», a-t-il interrogé.

De son côté, sa collègue Magdalena Martullo a mis l'accent sur le fait que la prospérité n'est due qu'à l'autodétermination, et non «au Conseil fédéral et au parlement, qui sont même plus mauvais qu'à l'étranger». «Cette initiative permet à la Suisse d'adapter, de renégocier et même de résilier si nécessaire des accords internationaux», a-t-elle souligné.

Un appel à la société civile

Ce n'est pas un hasard si en ce même samedi, les détracteurs de l'initiative ont annoncé que 137 membres des deux Chambres fédérales avaient formé un comité de combat interpartis. En fait, ce comité n'est pas nouveau. Il s'était formé à l'occasion de l'initiative de l'UDC de mise en oeuvre contre les étrangers criminels en février 2016 sous l'impulsion de Hans Stöckli (PS/BE) et il a été réanimé. «Cette initiative promet l'autodétermination, mais son titre est fallacieux. En fait, elle attaque frontalement les droits humains, la démocratie et l'état de droit. Elle menace la protection des minorités par la Cour européenne des droits de l'homme», affirme-t-il.

«Notre comité est un appel à toute la société civile de se mobiliser, car cette campagne s'annonce très émotionnelle. Elle sera assurément difficile à gagner», avertit Hans Stöckli. A l'évidence, les deux camps sont prêts pour la bataille.

Notre éditorial de mars 2018: «Juges étrangers»: se libérer des mythes