Personne ne conteste la nécessité de mieux rémunérer les médecins de famille. En revanche, la proposition du Conseil de fédéral d’octroyer un supplément de 10 francs par consultation chez le généraliste et de raboter les prestations des spécialistes pour compenser fait des mécontents: les hôpitaux et les médecins spécialistes. La faîtière des médecins de famille se montre satisfaite.

Le ministre de la Santé Alain Berset est intervenu exceptionnellement dans la fixation des tarifs médicaux (TarMed) car les parties (médecins, assurances et hôpitaux) n’arrivaient pas à s’entendre. L’ordonnance révisée doit entrer en vigueur le 1er octobre.

Le projet d’ordonnance prévoit que les généralistes et les pédiatres puissent à l’avenir facturer 11 points de plus pour toute consultation au cabinet médical. Cela représente 200 millions de francs par année. En contrepartie, le point tarifaire pour des prestations techniques sera réduit de 9%. Cela concerne surtout les radio-oncologues, les radiologues, les pathologistes, les gastro-entérologues et les ophtalmologues.

Dès le lancement de la consultation qui se terminait cette semaine, les hôpitaux sont montés aux barricades. Selon la faîtière H +, le projet n’est pas correct: les médecins en hôpitaux et les médecins de famille ne sont pas traités sur un pied d’égalité. Les premiers ne peuvent pas toucher le supplément, même s’ils dispensent les mêmes soins de base.

Cantons inquiets

Les coupes linéaires des prestations techniques dans 14 des 4500 chapitres du TarMed ne répondent qu’à des «motifs politiques». Le manque à gagner devrait s’élever à 100 millions de francs, selon H +. Rien qu’à Fribourg, le canton évalue la perte à 3,3 millions de francs.

A l’instar de ce canton, plusieurs autres craignent que les hôpitaux publics n’aient d’autre choix que de se tourner vers le canton pour obtenir une compensation du manque à gagner. L’amélioration de la rémunération des généralistes risque alors d’être financée par les pouvoirs publics, tandis que les assurances maladie ne déboursent «pas un kopek».

Une position relayée par la conférence des directeurs cantonaux de la santé (CDS), pour qui la révision actuelle doit inclure les hôpitaux. Le fait que de plus en plus de patients n’ont plus de médecin de famille et se rendent directement au service des urgences de l’hôpital en cas de «pépin» plaide en ce sens.

Médecins pas convaincus

Les principaux intéressés ont également réservé un accueil très mitigé au projet. La FMH conteste surtout la réduction de 9% des prestations des spécialistes. Le Conseil fédéral n’a fourni aucune explication convaincante pour motiver ce taux et le choix des traitements visés. Cette mesure entraînera une baisse de la rémunération des salariés, notamment du personnel non médical.

Un point de vue partagé par l’Association des Médecins dirigeants d’hôpitaux de Suisse (AMDHS) et celle des médecins assistants et chefs de clinique (ASMAC). Les coûts de certaines interventions ne seront plus couverts.

Par ailleurs, la FMH souligne que le prix de la consultation chez le médecin de famille ne sera pas entièrement compensé par la réduction du prix des prestations techniques mais par les patients eux-mêmes. Notamment les jeunes qui vont occasionnellement chez le médecin et qui n’atteignent pas la franchise.

En revanche, les prestations techniques qui coûteront, elles, moins cher et qui sont en général prises en charge par les caisses maladie pourraient permettre à ces dernières de faire des économies.

L’Association Médecins de famille Suisse se félicite, elle, de la révision. Mais, comme tous les milieux concernés, elle appelle de ses vœux une révision d’ensemble du TarMed. Celle-ci est attendue pour fin 2015 pour autant que les partenaires tarifaires se mettent d’accord.

Assureurs sous pression

Les caisses maladie ne sont pas non plus enchantées. Pour Curafutura, les modifications ne devraient pas seulement se limiter aux prestations techniques mais aussi concerner certains actes médicaux. Selon elle, il importe surtout que les partenaires reprennent la main afin de trouver en toute autonomie une structure tarifaire pour le TarMed.

Parmi les partis politiques, le PS craint que la réduction dans le domaine des prestations techniques ne touche au final le personnel des hôpitaux et ne conduise à des programmes d’économie.

A droite, on regrette l’intervention de l’Etat dans la fixation des tarifs médicaux. Il n’est pas question que le salaire garanti par l’Etat finisse par devenir une solution au problème, écrit l’UDC. Le PLR exige, lui, la stricte neutralité des coûts alors que le PDC milite pour une structure tarifaire différenciée selon les régions.