Ignazio Cassis suscite à nouveau la polémique. En déplacement en Afrique australe, plus précisément en Zambie, il tweetait ce lundi: «Visite des installations de Mopani Copper Mines. Impressionné par les efforts en faveur de la modernisation des installations et de la formation des jeunes.» Son partage donne immédiatement lieu à une levée de boucliers.

La raison: le filon de cuivre est exploité par le géant anglo-suisse Glencore, dont les activités sont fortement critiquées par les défenseurs des droits de l’homme et de l’environnement. L’entreprise partage également en ligne sa joie de recevoir le conseiller fédéral, ce qui ne fait qu’enfler la controverse. Mais cette visite à une firme helvétique est-elle vraiment surprenante de la part du chef du Département fédéral des affaires étrangères (DFAE)?

Une des mines les plus décriées du monde

«Non, c’est parfaitement normal», répond Jean-Marc Crevoisier, porte-parole du département. «Ignazio Cassis a pris la décision d’aller en Zambie. Une fois là-bas, il paraît logique de se rendre sur le site de Glencore, qui emploie 16 000 personnes sur place et dont le siège est en Suisse.» Il cite en outre les 4,4 milliards d’investissements de l’entreprise dans cette mine depuis l’an 2000 et souligne que les émissions nocives de l’exploitation sont aux limites imposées par l’Organisation mondiale de la santé (OMC).

«Je ne remets pas en question le fait qu’un ministre voyage et qu’il rende visite à des firmes helvétiques lors de ses déplacements», rétorque Manon Schick, directrice d’Amnesty International Suisse. «Mais la mine de Mopani est l’une des plus décriées du monde, tout comme l’est son exploitant. Comme toute première visite sur le continent, la symbolique me reste en travers de la gorge.» Régulièrement accusé d’atteinte à l’environnement, d’évasion fiscale ou encore de corruption, le groupe basé à Zoug a remporté un Public Eye Award de l’entreprise «la plus irresponsable» en 2008.

La communication d’Ignazio Cassis en question

«Se rendre en Afrique, visiter cette mine et ramener des informations sur le sujet est une bonne chose, cela montre que c’est à l’agenda», tempère un politicien de gauche proche du sujet. Le problème avec Ignazio Cassis réside plutôt dans le manque de distance de sa communication.» Le premier tweet du ministre, lors de son premier voyage en Afrique, aurait pu s’orienter davantage vers la coopération internationale, résume-t-il.

Cette polémique montre une chose, se réjouit le comité d’initiative pour des multinationales responsables, «la sensibilité sur le sujet va crescendo». Déposée en 2016, l’initiative qui exige que les entreprises domiciliées en Suisse respectent également les droits de l’homme à l’étranger a été catégoriquement refusée par le Conseil fédéral. Le Conseil national a toutefois accepté un contre-projet en juin. «La pression augmente et les soutiens aussi», commente le comité. Les chiffres parlent pour lui: 14 000 drapeaux aux couleurs de l’initiative ont été vendus en Suisse au cours de ces six derniers mois.