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Impôts des couples: le PDC veut faire revoter la Suisse

Le gouvernement suisse a fourni des statistiques erronées lors d’un vote sur une initiative PDC. Le parti porte plainte et demande que le peuple soit rappelé aux urnes

Affiches de propagande à Berne, janvier 2016. — © Lukas Lehmann/Keystone ©
Affiches de propagande à Berne, janvier 2016. — © Lukas Lehmann/Keystone ©

Ce lundi, le PDC a déposé une plainte contre le Conseil fédéral dans plusieurs grands cantons, dont Zurich et Vaud. L’objet du litige: le résultat de la votation de 2016 sur l’initiative du parti de la famille intitulée «Non à la pénalisation du mariage». Celle-ci visait à corriger le désavantage fiscal subi par les couples mariés par rapport aux couples de concubins dans la même situation économique.

Acceptée par la majorité des cantons, l’initiative avait échoué d’un cheveu devant le peuple (50,8% de non). Or, ainsi que l’Administration fédérale des contributions (AFC) l’a reconnu vendredi dernier, le gouvernement s’est appuyé sur de fausses informations pour mener campagne contre l’objet: en lieu et place des 80 000 couples annoncés comme étant concernés par un désavantage fiscal, il y en avait en fait plus de 450 000.

«Notre initiative aurait été acceptée par le peuple»

La secrétaire du PDC, Béatrice Wertli, a connu un week-end agité. «Nous avons eu trois jours pour déposer un recours selon le délai légal. C’était presque impossible», dit-elle. Le PDC y est toutefois parvenu et exige désormais un nouveau vote. «Le rejet de notre initiative est le fruit d’une désinformation scandaleuse, s’indigne le parti. Vu le score très serré de 2016 et à la lumière de ces nouveaux chiffres, nous sommes convaincus qu’une majorité de la population se prononcerait aujourd’hui en faveur de notre initiative populaire.» Le petit nombre de couples concernés par un changement législatif avait en effet représenté un argument central pour les opposants au texte.

Cette monumentale bourde statistique pourrait avoir des conséquences historiques. D’avis de juriste, et ainsi que le PDC l’exige, il serait en effet envisageable de rappeler les habitants aux urnes sur le même objet, ce qui n’est encore jamais arrivé au niveau fédéral. Aucune explication précise n’a par ailleurs pu être fournie quant à l’origine exacte de cette bévue, si ce n’est que l’administration n’a «pas tenu compte des couples mariés à deux revenus avec enfants».

L’erreur est d’autant plus surprenante que cette configuration est particulièrement représentée dans le pays. Dans l’embarras, le conseiller fédéral Ueli Maurer a ordonné un examen externe des méthodes de travail de l’unité responsable. Le gouvernement n’a toutefois pas encore pris position sur le recours du PDC. Ce dernier n’est «pas dénué de chances», selon plusieurs juristes.

«L’union d’un homme et d’une femme»

Depuis l’échec de l’initiative du PDC, le Conseil fédéral a lui-même adopté un message sur l’élimination de la pénalisation du mariage afin de «mettre fin à une controverse qui dure depuis plusieurs décennies et supprimer la charge supplémentaire contraire à la Constitution qui pèse sur les couples mariés concernés». Celui-ci est compatible avec l’initiative du PDC.

«Si l’objet était accepté au parlement, notre recours deviendrait obsolète, concède Béatrice Wertli. Mais, en attendant, nous préférons saisir toutes les options disponibles. Cela fait trente ans qu’on attend la suppression de cette inégalité de traitement! On ne sait pas si on peut faire confiance aux Chambres.» Comme il appartient aux cantons d’organiser les votations, c’est vers ces derniers que se sont tournés les recours du PDC.La résolution de ce casse-tête par l’intermédiaire du projet du Conseil fédéral pourrait éviter au PDC la répétition d’une polémique. Si l’erreur de calcul de la Confédération a vraisemblablement pu influencer la campagne au détriment du parti de la famille, le rejet de son initiative avait en effet également été mis sur le compte d’un autre facteur: sa définition résolument conservatrice du mariage comme étant «l’union d’un homme et d’une femme». La gauche et plusieurs organisations de défense LGBT s’étaient vertement opposés à l’initiative qualifiée de «rétrograde», qu’elles accusaient de vouloir faire rentrer cette définition traditionaliste dans la Constitution. Or, si un nouveau vote était convié, il devrait porter sur le même texte.