La volonté humanitaire et politique est restée constante, restait à s’assurer des moyens logistiques et matériels. C’est désormais acquis. Charles Juillard et son gouvernement ont confirmé, ce mardi, l’offre d’asile faite par le canton du Jura à deux frères ouïgours de 33 et 45 ans, Bahtiyar et Arkin Mahnut, détenus à Guantanamo depuis près de huit ans, reconnus innocents et «libérables» par les Etats-Unis en 2003. La balle retourne dans le camp du Conseil fédéral, mis devant ses responsabilités, qui autorisera ou non l’accueil en Suisse des deux Ouïgours.
Visiblement, à voir la sérénité affichée par Charles Juillard, la décision jurassienne a été aisée à prendre. Les dossiers fournis par la Confédération donnent l’assurance au Jura que l’éventuelle venue des Ouïgours ne lui posera pas de problème financier, sanitaire ou de sécurité. Le Jura, par le biais de l’Association d’accueil des migrants, certifie qu’il est possible de recevoir, puis intégrer les deux hommes, cordonniers de profession, parlant chinois mais disposés à apprendre le français.
«L’obstacle de la prise en charge levé, il appartient au Conseil fédéral de véritablement décider s’il veut recevoir ces deux détenus en Suisse ou non», lance Charles Juillard. Qui s’est appliqué à mettre en exergue, à plusieurs reprises, l’esprit «d’ouverture, de solidarité et d’accueil humanitaire de la Suisse et du Jura», sans nier le casse-tête économico-diplomatique de la Suisse, prise en étau entre une promesse faite aux Etats-Unis et l’importance d’un accord économique à signer avec la Chine, qui affirme que les deux Ouïgours sont des terroristes.
Les regards se tournent désormais vers Berne et le Conseil fédéral, à qui le gouvernement jurassien a adressé sa réponse par courriel ce mardi matin. «J’ai toujours souhaité une décision dans les délais les plus brefs, mais ce n’est pas au Jura de dicter son agenda au gouvernement fédéral», relève Charles Juillard. Qui se prépare déjà à accueillir les deux Ouïgours, «à leur offrir un autre avenir, serein, pour leur permettre simplement de se reconstruire et revivre».
Le ministre jurassien a encore précisé que, s’ils sont transférés en Suisse, les deux ex-détenus seront mis au bénéfice d’un permis B, et pas considérés comme demandeur d’asile. Ils seront hébergés dans un appartement, pourront compter sur un traducteur et les services de l’Etat pour s’intégrer. Ils seront libres de leurs mouvements sur territoire helvétique, mais devront demander un visa pour en sortir. Et Charles Juillard de lancer un appel à ses concitoyens, «pour accueillir deux êtres humains et pas des bêtes de foire».