Le Jura ne se dotera pas d’un fonds climat, du moins pas dans l’immédiat. Le parlement cantonal a enterré le projet en seconde lecture ce mercredi, refusant l’entrée en matière par 31 voix contre 29. Comme le 30 mars dernier, le vote s’est déroulé à bulletins secrets, à la demande de la droite et du centre. Une procédure qui témoigne de la teneur émotionnelle du débat, marqué par des passes d’armes entre la gauche et la droite.

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Ce fonds aurait dû financer la mise en œuvre du Plan climat cantonal – en cours d’élaboration – ainsi que des mesures pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Sa création nécessitait de modifier la loi cantonale sur l’énergie ainsi que celle sur l’imposition des véhicules routiers. Il était prévu qu’un montant maximum de 10% de la taxe automobile l’alimente à hauteur de 2 à 3 millions par an, selon le principe du pollueur payeur.

Superflu et complexe pour la droite

Le PDC, le PLR et l’UDC se sont opposés à cet outil, jugé superflu et complexe à gérer d’un point de vue administratif. Un fonds pour le climat «dépouillerait» aussi selon eux le parlement de compétences au profit du Gouvernement et de l’administration cantonale. Ils ont ainsi suivi la majorité de la Commission de l’environnement et de l’équipement.

Son rapporteur, le PDC Bernard Studer a regretté à la tribune la confusion entre ce fonds, «un instrument comptable qui ne rend pas le canton plus riche» , et le Plan climat, «indispensable et au cœur des préoccupations politique». Il a rappelé que le canton du Jura n’avait pas attendu ce débat pour agir en faveur du climat, et qu’il était possible de prendre des mesures efficaces sans ce fonds. Dans le débat, la droite et le centre ont d’ailleurs refusé d’être qualifiés de climatosceptiques.

Indispensable et urgent pour la gauche

Ces arguments ont suscité la colère de la gauche. «Cette fois, nous avons assez attendu», a déclaré le député socialiste Fabrice Macquat, appelant à se prononcer en faveur de l’entrée en matière. «C’est un autogoal», a lancé le Vert Baptiste Laville après le résultat, ajoutant, en colère, que l’on perdait du temps dans la course contre le dérèglement climatique.

«La droite tient un double discours que nous ne pouvons entendre. On ne peut pas dire qu’on est pour prendre des mesures en faveur du climat, mais qu’on ne veut pas les financer», réagit ce dernier auprès du Temps. Il ajoute que le Plan climat est élaboré depuis deux ans pour être mis en œuvre grâce à ce fonds: «Sans lui, tout le projet devient caduc!»

Le ministre de l’Environnement, David Eray, s’est quant à lui montré un peu désabusé à la tribune. «Notre planification financière des investissements adoptée en décembre dernier prévoyait ce fonds climat dès 2023. Ce point n’a suscité aucune discussion. Le Gouvernement était confiant dans le fait d’avoir apporté une bonne réponse aux instructions que lui avait données le législatif.» De quoi rappeler que le parlement a refusé mercredi la création d’un fonds climat qu’il avait lui-même demandé, en acceptant une motion.

Initiative cantonale en réflexion

Bien qu’enterré par le Grand Conseil, ce projet pourrait ressurgir prochainement devant le peuple. La gauche et les vert’libéraux avaient déjà laissé entendre lors de la première lecture qu’ils envisageraient de lancer une initiative cantonale en cas de non-entrée en matière. Une décision sera prise la semaine prochaine, au terme d’une réunion interpartis. Jusqu’à ce que la question soit définitivement tranchée, la mise en œuvre du futur Plan climat sera financée par le budget ordinaire de l’Etat.