Crise économique
Le Conseil fédéral assouplit les critères donnant droit à une aide pour les cas dits de «rigueur». Mais certains cantons sont à la traîne. GastroSuisse se dit en partie satisfaite, mais juge la situation «alarmante» dans la branche

Pour être considéré comme un «cas de rigueur», il n’est plus nécessaire, dès ce jeudi, de justifier une baisse de son chiffre d’affaires d’au moins 40% par rapport aux années précédentes. Le Conseil fédéral a entendu, du moins en partie, l’appel lancé par la branche de l’hôtellerie-restauration. Un établissement ou un commerce qui aura dû rester fermé sur décision des autorités pendant au moins 40 jours depuis le 1er novembre 2020 est automatiquement considéré comme un «cas de rigueur».
Il peut ainsi prétendre à une indemnisation sans devoir justifier le recul de son chiffre d’affaires. Cela concerne en particulier les restaurants, les bars, les centres de fitness, les discothèques. Par ailleurs, la part de l’indemnité versée à fonds perdu est relevée de 10 à 20% du chiffre d’affaires, jusqu’à concurrence de 750 000 francs au lieu des 500 000 francs initialement prévus. Les cantons peuvent relever ce plafond à 1,5 million de francs à condition que les propriétaires apportent des fonds propres frais d’un niveau équivalent ou que les bailleurs de fonds abandonnent leurs créances.
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«La situation reste alarmante»
Par ailleurs, pour les commerces ayant subi une perte de chiffre d’affaires de 40%, le Conseil fédéral adapte la période prise en compte pour estimer celle-ci. La référence se fera sur les douze derniers mois et non sur l’année civile 2020. Cela permet de prendre en compte les résultats de la saison hivernale 2020-2021, qui sont mauvais pour toutes les activités touristiques.
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Président de GastroSuisse, Casimir Platzer se montre en partie satisfait: «La décision du Conseil fédéral est importante pour la restauration. Elle va dans la bonne direction. La prise en compte d’une durée de fermeture de 40 jours pour avoir automatiquement droit aux indemnités pour cas de rigueur aidera de nombreux restaurateurs. Mais la situation reste alarmante dans notre branche. Et nous continuerons à nous battre, notamment pour que les cantons fassent en sorte que les indemnités parviennent rapidement à leurs destinataires», a-t-il déclaré mercredi après l’annonce du Conseil fédéral.
Plusieurs cantons ont du retard
Sur ce dernier point, il y a du pain sur la planche. Certes, plus de la moitié des cantons se sont organisés pour que les premières aides puissent être fournies dès janvier. Mais plusieurs autres ont du retard, soit parce que les bases légales manquaient, soit parce que les administrations ont tardé à se mettre au travail.
La Conférence des directeurs cantonaux de l’économie publique (CDEP) a établi la liste des mesures disponibles dans chaque entité géographique. «Les cantons font ce qu’ils peuvent. Les situations sont différentes d’un endroit à l’autre. Certains sont privilégiés parce qu’ils disposent déjà d’une base légale, d’autres doivent la créer, la faire accepter par le parlement cantonal et tenir compte des délais référendaires», résume le conseiller d’Etat bâlois Christoph Brutschin, président de la CDEP.
Les 2,5 milliards ne suffiront pas
L’enveloppe financière, elle, ne bouge pas pour l’instant. C’est toujours une somme de 2,5 milliards de francs qui est à disposition pour indemniser les «cas de rigueur». Elle est financée à hauteur de 1,9 milliard par la Confédération et de 600 millions par les cantons. Le Conseil fédéral a par ailleurs décidé que la réserve de 750 millions prévue dans la loi Covid-19 en faveur des cantons particulièrement touchés par la pandémie serait aussi affectée aux «cas de rigueur».
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«Mais cela ne suffira pas», prévient le ministre des Finances, Ueli Maurer. Principalement parce que les décisions de mercredi élargissent le cercle des entreprises et commerces qui se trouvent dans l’incapacité de travailler et d’accueillir des clients. Les magasins qui devront fermer leurs portes du 18 janvier au 28 février appartiendront eux aussi au cercle des «cas de rigueur».
Cent mille demandes attendues
S’ils ne remplissent pas le critère des 40 jours de fermeture, ils pourront tout de même toucher une aide si la diminution de leur chiffre d’affaires atteint 40% au minimum. «Le nombre de demandes va doubler. Au lieu de 50 000, nous nous attendons à ce que 100 000 demandes d’aide soient déposées», estime Ueli Maurer.
Le Conseil fédéral envisage dès lors de demander une rallonge au parlement lors de la session de mars. «Nous sommes en train de calculer avec les cantons le montant supplémentaire qui sera nécessaire», ajoute-t-il. Il précise que son département est aussi en train d’évaluer la possibilité de lancer une deuxième tranche de prêts-relais remboursables cautionnés par la Confédération. Entre mars et juillet 2020, 17 des 40 milliards prévus avaient été sollicités auprès des banques.
Les dépenses supplémentaires de la Confédération sont financées par le budget ordinaire. Elles sont soumises à la règle du frein à l’endettement, qui exige le remboursement de la dette lorsque la situation financière sera meilleure. «Nous soutenons aujourd’hui l’économie pour qu’elle puisse redémarrer le plus vite possible. Mais la dette devra être remboursée. On en a pour quinze à vingt ans», résume le grand argentier fédéral.