Dernier variant en date du coronavirus, Omicron n’a pas encore livré tous ses secrets et incite le Conseil fédéral à la prudence. Très contagieux (quelque 38 000 nouveaux cas mercredi), il semble cependant moins virulent que son prédécesseur Delta, au vu de la baisse des alitements aux soins intensifs des hôpitaux sur l’ensemble de la Suisse. Dans le même temps, il déclenche des formes de Covid-19 qui ne sont pas sans impact sur la santé et sur les autres types de soins cliniques, comme les soins aigus.

Ainsi, dans le canton de Neuchâtel, le Réseau hospitalier relève mercredi une hausse de 40% des patients covid depuis fin décembre à cause d’Omicron. Subissant aussi les absences du personnel, conséquence notamment de la multiplication des quarantaines, l’institution se dit contrainte de réduire drastiquement les opérations décrites comme non urgentes.

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«Certains hôpitaux rapportent des augmentations de patients, d’autres des diminutions», glisse brièvement Alain Berset. Au sortir d’une séance extraordinaire du Conseil fédéral, le ministre de la Santé est venu annoncer une prolongation des mesures en vigueur, avec quelques perspectives d’allègements. Le gouvernement penche toujours plus pour un retour à la normalité, mais avance prudemment. «Nous observons une réelle amélioration dans les soins intensifs: aujourd’hui, 247 patients y sont soignés dans toute la Suisse, contre 325 à la fin décembre», fait valoir Alain Berset.

Télétravail obligatoire moins longtemps

Au rang des menus adoucissements, le télétravail obligatoire durera moins longtemps, jusqu’à fin février et non fin mars comme souhaité initialement par le gouvernement. La même échéance vaudra pour les quarantaines des personnes ayant été en contact avec des malades. Ici, le but est de faciliter la tâche des entreprises et services publics, mis à mal par des absences en série. «Ce serait un tournant, puisque ces quarantaines nous accompagnent depuis deux ans», commente Alain Berset. Ce tournant s’associe à la fin de l’enregistrement des contacts pour le traçage. Il satisfait les demandes des ministres UDC.

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Plus loin, les vaccinés et guéris pourront à nouveau entrer sur le territoire suisse sans test PCR. Le second dépistage, obligatoire entre le quatrième et le septième jour suivant le retour, tombe même pour tout le monde. «Il s’agit d’une bonne nouvelle pour le tourisme, réagit Véronique Kanel, porte-parole de Suisse Tourisme. Les gens se décident de plus en plus au dernier moment, a fortiori en période de crise. Mais l’abandon des tests va leur permettre de voyager plus rapidement, plus librement et sans coûts supplémentaires.»

Restaurants, culture et sport toujours en 2G

Le corps principal des restrictions demeure néanmoins bien en place, et jusqu’à fin mars. De nombreux cantons, qui réclamaient des ouvertures plus rapides, ressortent donc les mains vides de la séance du gouvernement fédéral.

On parle ici de la règle des 2G ou 2G+. Les lieux intérieurs de loisirs, de culture et de sport restent réservés aux personnes vaccinées et guéries. Les autres en sont exclus. Dans les discothèques et autres endroits plus propices à la transmission du virus, l’entrée est toujours conditionnée à un test négatif. Dans les espaces intérieurs fréquentés, pas touche au masque obligatoire. De même, les rencontres et fêtes privées sont limitées à 30 personnes à l’intérieur, voire 10 si un des invités n’est ni vacciné ni guéri (les moins de 16 ans ne comptent pas).

«On ne sait pas encore si le zénith de cette cinquième vague épidémique est dépassé, fait valoir Alain Berset. On n’observe pas encore d’évolution trop négative sur les hôpitaux. Mais je ne suis pas du tout en train de vous dire: «La pandémie est finie.» Sinon le Conseil fédéral n’aurait pas prolongé ces mesures, des mesures dures et entravantes.»

Soutien dans les cantons romands

Dans les cantons, le conseiller d’Etat jurassien responsable de la santé Jacques Gerber juge les annonces du Conseil fédéral prudentes: «Il n’est pas certain que nous ayons atteint le pic de la cinquième vague. En Suisse romande, nous observons un tassement des cas à un niveau très élevé, mais ce n’est pas encore une chute. Or, le Conseil fédéral ne veut pas reproduire les erreurs du passé en relâchant les mesures trop rapidement.»

«Rien de révolutionnaire», commente pour sa part le ministre genevois de la Santé Mauro Poggia. Il souligne toutefois la nécessaire adaptation qu’engendrera, à fin janvier, le raccourcissement de la validité du certificat covid à 270 jours, soit neuf mois, à la place d’une année actuellement. «Cela entraînera sûrement une certaine pression sur les demandes de vaccins, et de booster en particulier.» Cette décision a été motivée par le besoin de reconnaissance des certificats suisses à l’égard de l’Union européenne. De quoi pousser les hésitants à faire le pas de la troisième dose.

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Président de la Société médicale de la Suisse romande, Philippe Eggimann soutient le relâchement des quarantaines, mais appelle à la prudence: «Omicron a un impact moins sévère. Mais nous n’en avons pas fini avec Delta, qui semble dominant parmi les personnes aux soins intensifs. Et, vu le nombre d’infections, nous n’avons pas encore atteint le pic de la vague.»

Des priorités pour l’accès aux tests

La forte contagiosité d’Omicron pèse lourdement sur les laboratoires et infrastructures de dépistage. L’Office fédéral de la santé publique propose donc aux cantons de fixer des priorités pour l’accès aux tests. Ceux-ci seront dorénavant accordés avant tout aux personnes à risque, aux établissements de soins, aux infrastructures critiques et aux personnes symptomatiques. Pour les écoles, entreprises et vacanciers, se faire tester pourrait s’avérer plus compliqué.

Pour la suite, la réalité du terrain hospitalier dictera le rythme futur des assouplissements ou des durcissements. Le 2 février, le Conseil fédéral en discutera en profondeur. Si la situation le permet, il pourrait lever les restrictions plus tôt que prévu.

Collaboration: Céline Zünd et Vincent Nicolet