Electricité
Selon qu’ils consomment beaucoup d’électricité ou espèrent profiter des innovations, les milieux économiques ont des avis divergents sur le vote du 21 mai

L’économie se déchire autour du tournant énergétique. L’Union suisse des paysans (USP) est favorable à la réforme. A une majorité de deux tiers, la Chambre de l’Union suisse des arts et métiers (USAM) recommande de soutenir la Stratégie énergétique 2050 (SE 2050) le 21 mai. Incapable de dégager une majorité, le comité directeur d’Economiesuisse laisse ses membres mener campagne comme bon leur semble. Et ils ne s’en privent pas. Selon qu’ils consomment beaucoup d’électricité ou espèrent retirer de cette nouvelle stratégie de nouvelles activités ou des soutiens financiers, les branches économiques et les entreprises se répartissent en deux camps opposés.
Alors que le vote n’a lieu que dans deux mois, alors que la conseillère fédérale Doris entre en scène ce mardi, c’est le comité de l’économie contre cette réforme qui a ouvert les feux lundi. Il réunit quelques poids lourds de l’industrie et du tourisme: Swissmem (industrie des machines), Scienceindustries (chimie, pharma, biotechnologie), Swissmechanic (PME de la machinerie, équipements électriques et métaux), Swissplastics, Swissoil, Gastrosuisse, la Société suisse des entrepreneurs (SSE) considèrent que la réforme leur coûtera beaucoup trop cher et la jugent aventureuse.
Ne pas dépendre des importations
Ils y voient une menace pour la sécurité de l’approvisionnement énergétique, surtout en hiver. Président de Swissmem, Hans Hess reconnaît que le livre du nucléaire finira bien par se refermer et qu'«aucune nouvelle centrale ne sera construite». Mais il estime que les énergies renouvelables ne sont pas mûres, que leur subventionnement sera ruineux et que les possibilités de les stocker pour compenser le nucléaire font défaut. En d’autres termes, la SE 2050 rendra l’industrie suisse tributaire des importations. Or les principaux fournisseurs, l’Allemagne et la France, risquent de ne plus pouvoir apporter assez de courant à la Suisse.
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Le comité réuni autour de Swissmem refuse d’étendre les subventions comme le prévoit la SE 2050. «Ne commettons pas la même erreur que l’Allemagne en subventionnant le solaire et l’éolien par des taxes plus élevées sur l’électricité», s’emporte Hans Hess, qui craint que la limitation temporelle de ces subventions ne soit qu’une chimère. Enfin, le comité juge les objectifs de réduction de consommation d’énergie, qui sont en fait des valeurs indicatives, peu réalistes. De son côté, le président de Gastrosuisse Casimir Platzer estime le relèvement de la taxe sur l’électricité «hostile aux PME, au commerce et au tourisme».
Centrales à gaz?
Il s’en prend aux branches économiques favorables à la réforme: selon lui, il s’agit de celles qui «se sont assuré des subventions considérables» et des «mandats lucratifs». Ce reproche sera au cœur de la campagne du 21 mai. Il s’appuie sur le fait que le comité de l’économie favorable à la SE 2050 réunit les associations faîtières du bâtiment, les paysans – intéressés par la pose de panneaux photovoltaïques sur leurs toits – l’économie énergétique – des aides financières sont prévues pour les barrages –, les services industriels ou les transports publics. Mais on y trouve d’autres poids lourds comme l’Association des entreprises électriques suisses (AES), Landis & Gyr, Axa Winterthour ou les BKW.
La seconde question qui marquera la campagne sera de savoir par quoi on va remplacer les 38% d’électricité d’origine nucléaire. Interrogé à ce sujet, Hans Hess reste assez évasif. «Nous devrons produire de l’électricité autrement. Il est décevant que, en cinq ans de travaux, le parlement n’ait pas répondu à cette question», répond laconiquement Hans Hess, qui imagine encore de pouvoir construire des centrales à gaz à cycle combiné pour compenser la production nucléaire. Mais la population n’en veut pas et les projets sont au point mort.