Environnement
Le plus grand lac de Suisse romande abrite quelque 14 millions de débris plastiques, selon une étude de l’association genevoise Oceaneye. Soit un taux de pollution semblable, en proportion, à celui des océans

Quelque 14 millions de particules microplastiques flottent à la surface du Léman. L’étude de l’association genevoise Oceaneye fait voler en éclat un cliché répandu: non, le lac Léman n’est pas plus propre que les autres, il est même presque aussi pollué, en proportion, que les océans. Pour parvenir à de tels résultats, les scientifiques d’Oceaneye ont effectué une série de quatorze prélèvements en août et septembre 2018. Ils s’apprêtent à mener une seconde expédition cette semaine puis une troisième en septembre afin de confirmer leurs hypothèses. Avec cinquante prélèvements prévus au total, il s’agit de l’étude la plus ambitieuse jamais menée.
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Au-delà des bouteilles en PET et autres objets insolites dont l’Association pour la sauvegarde du Léman repêche chaque année plusieurs tonnes, le Léman renferme une pollution moins visible: les microplastiques. Compris entre 1 et 200 mm, les débris prélevés par Oceaneye proviennent à 23% d’emballages. Les 71% restants sont des fragments non identifiables. De 1 à 5 mm, on parle de microplastiques, de 5 à 200 mm de mésoplastiques. Au total, le lac Léman présente une concentration en plastique de 129 gr/km2, soit presque autant que les océans qui affichent, eux, une pollution moyenne d’environ 160 gr/km2.
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Des microplastiques dans les entrailles des crustacés
Les dommages sur la faune et la flore océaniques sont considérables. Si certaines particules restent en suspension dans l’eau et servent de support aux bactéries ou aux microalgues, beaucoup sont absorbées par les oiseaux ou les poissons. En début d’année, des chercheurs de l’Université britannique de Newcastle ont découvert des microplastiques dans les entrailles de minuscules crustacés vivant à près de 11 km de profondeur.
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Egalement soumises à l’analyse, les eaux du Rhône présentent un niveau de pollution plastique d’un ordre de grandeur équivalent. Sur les 8 échantillons prélevés en août 2018 entre Genève et les Bouches-du-Rhône par l’association Precious Plastic Léman, participant à l’étude, la concentration moyenne de particules plastiques entre 1 et 200 mm a été mesurée à 2,12 mg/m3. En tenant compte du débit du fleuve, les scientifiques estiment qu’au minimum 5 tonnes de plastique transitent par Genève chaque année pour se déverser ensuite dans la mer Méditerranée.
Pollution en aval
«La comparaison des données de terrain concernant la pollution du lac et le flux de déchets transportés par le Rhône nous laisse penser qu’une part importante des plastiques flottants dans le lac sont évacués par le fleuve, souligne Gaël Potter, responsable scientifique d’Oceaneye. En polluant le lac, on pollue également tout ce qui se trouve en aval.»
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