Le rapport de force entre blocs neuchâtelois se lit en priorité sur la carte des 115 sièges du Grand Conseil. Avec une évolution régulière et constante en faveur de la gauche. En 1993, le monolithe libéral-radical régnait avec 67 sièges, contre 48 à gauche. L’écart s’est d’abord réduit: 62-53 en 1997 et 60-55 en 2001. Puis a basculé en 2005, la gauche est passée en tête: 58-57. Dimanche, la gauche a creusé l’écart, disposant de 60 parlementaires, contre 55 à la droite.

Cette évolution s’explique en priorité par l’érosion des forces bourgeoises. En 1993, les cousins radicaux et libéraux pesaient 56,2%, puis à peine plus de 50% en 2001, 48,3% en 2005 et 44,7% seulement en 2009. Pendant ce temps, les alliés de gauche n’ont pris que 2 à 3 points. Et ils sont même en recul en 2009 par rapport à 2005 (et ce malgré leur progression de 2 sièges au Grand Conseil), passant de 50,5 à 49,9%. Ceci en raison des suffrages glanés par le PDC (3,5%), l’Entente cantonale et le PEV (5,4% au total), n’entrant pas en considération dans la répartition des sièges, car inférieurs au quorum de 10%.

Si sa progression avait permis d’arracher la majorité en 2005, le Parti socialiste multiplie les déconvenues depuis quatre ans. Il a lâché un siège au Conseil national et un aux Etats en 2007, puis a perdu des plumes aux communales de 2008. Dimanche, le PS a dû abandonner 5 de ses 41 sièges et plus de 3 points en pourcentage, passant sous la barre des 30%. Le PS neuchâtelois s’inscrit dans une tendance défavorable nationale.

A Neuchâtel, le recul socialiste est compensé par la progression des alliés verts et popistes. Il y a d’évidents vases communicants entre PS et Verts, qui connaissent une ascension forte, de 7,4% en 2001 à 13%. Ils sont désormais le troisième parti du canton, derrière les mammouths PS et PLR, mais devant l’UDC. Avec 14 députés (+4), les Verts devraient s’émanciper du groupe d’extrême gauche PopVertsSol.

La régression de la droite s’explique surtout par la décrue de l’UDC. Alors qu’elle n’existait pas encore en 2001, l’UDC a d’emblée fait un tabac à Neuchâtel: plus de 20% aux fédérales de 2003 et 2007, 15,8% aux cantonales de 2005. En 2009, elle régresse pour la première fois, perdant 3 points et 3 sièges.

Plusieurs observateurs relèvent que les mécontents de la politique cantonale votaient pour l’extrême gauche avant 2003, puis sont pour certains passés à l’UDC, et seraient «revenus» dans les rangs POP et SolidaritéS cette fois (+3 sièges), le POP ayant été la principale voix critique envers le Conseil d’Etat.

Avec ses cinq candidats au Conseil d’Etat classés parmi les sept premiers, en passant de 40 à 41 fauteuils au parlement, le Parti libéral-radical a donné l’illusion d’être dans le camp des vainqueurs dimanche. Or, le PLR n’a fait que ralentir l’érosion qui mine le camp bourgeois depuis douze ans. En 2005, radicaux et libéraux totalisaient 32,5% des suffrages. Quatre ans plus tard, le PLR en est à 32,2%. Et, en 2005, libéraux et radicaux avaient été délestés de 18 points, culbute attribuée alors à l’apparition de l’UDC.