#LeTempsAVélo

Durant six semaines, plusieurs équipes de journalistes du Temps et d’Heidi.news se relaient pour parcourir la Suisse à vélo et raconter ses transformations. Suivez leur odyssée grâce à notre carte interactive et retrouvez leurs articles écrits au fil du chemin.


Cette semaine, trois relais prennent la route à un jour d’écart:

  • De Bellinzone à Brigue: Célia Héron, Virginie Nussbaum et Sylvia Revello;
  • De Brigue à Martigny: Alexandre Demidoff, Mathilde Farine et Anouch Seydtaghia; 
  • De Martigny à Bulle: Grégoire Baur, Boris Busslinger, Séverine Chave et Yan Pauchard.

Jeudi 7 octobre

■ Grégoire Baur, Bulle, 17h

Comme le dit le vieil adage gruérien: «Ce qu’on reçoit de Fribourg, ce sont la bise et les impôts.» En ce qui concerne la fiscalité, aucun membre de notre équipe ne peut confirmer. En revanche, pour la bise, le doute n’est plus permis.

Après une pause bien méritée à Châtel-Saint-Denis, le temps de manger croûtes au fromage et autres papets vaudois – étonnant d’ailleurs qu’un restaurant de la Veveyse serve un plat typiquement vaudois, mais passons –, la dernière ligne droite nous tendait les bras. Un chemin vallonné au cœur de la campagne fribourgeoise. Sur le papier, rien de bien difficile. Extrêmement facile même, au vu de la première partie de journée entre Vevey et le chef-lieu de la Veveyse. C’était compter sans ce vent froid, perçant et venant bien évidemment de face. Et moi qui pensais qu’en période de pandémie de covid, la bise n’était plus réellement d’actualité… Pas dans le canton de Fribourg visiblement.

«Même dans les descentes, tu dois pédaler pour avancer», n’a cessé de répéter le vaillant Yan Pauchard. On ne peut que lui donner raison. Et Boris Busslinger d’ajouter: «J’ai préféré les dénivelés de ce matin à ce vent de face.» Encore une fois, on approuve. Mais les efforts finissent toujours par payer. Et, après plus de 120 kilomètres en deux jours à la force du mollet (on compte évidemment les 14 kilomètres réalisés sur le vélodrome d’Aigle), nous voilà arrivés à Bulle. Le point final de notre étape. Avec un jour d’avance sur le programme. Pas le temps de s’étendre plus sur cette aventure. La fondue nous attend…


■ Mathilde Farine, Viège, 14h30

La ville des nains de jardins

Des constructions flambant neuves. D’autres commencent à sortir de terre. De nouveaux bâtiments pour Lonza dont l’expansion semble illimitée. Encore de nouvelles constructions pour absorber, là aussi, l’afflux d’employés du groupe chimique. Le tour guidé qu’a proposé René Imoberdorf, ancien président de la commune de Viège, nous en met évidemment plein la vue.

Mais dans ce ballet de grues, pelles mécaniques et ouvriers, c’est un détail peut-être un peu insignifiant qui attire notre attention: qu’est-ce que c’est que tous ces nains de jardin à chaque giratoire? Et ces nains géants (oui, encore plus bizarre) à l’entrée de la ville? L’ancien édile éclate de rire. «Viège est la ville des nains de jardin!» Et cela se confirme, à de nombreux coins de rue. La question du pourquoi, elle, restera sans réponse.


■ Anouch Seydtaghia, Rarogne, 11h

Tout juste trente minutes de vie

De loin, c’est une petite tache noire dans un pré. Alors que nous passons à côté de Rarogne, notre attention est attirée par cette petite boule de poils, par terre, à côté d’une vache. Ce veau semble minuscule. Nous posons nos vélos, je m’approche lentement pour ne pas provoquer la vache qui m’observe d’un œil noir. C’est bien un nouveau-né à côté d’elle. Depuis combien de temps est-il né? «Toute juste trente minutes», me répond l’agriculteur.

Au sol, le petit veau tremble, habitué pendant de longs mois à la chaleur de sa mère. Pour lui, l’adaptation est brutale, avec ce vent qui souffle fort dans la plaine du Rhône. Un si joli moment… Le soir, au restaurant, j’observe avec circonspection le menu. Non, je ne mangerai pas de veau… Mais de là à devenir végétarien – mon but depuis des années –, non je ne suis pas certain de franchir encore le pas.


■ Alexandre Demidoff, entre Sierre et Rarogne, 10h30

En coup de vent, je me suis invité chez Rainer Maria Rilke. Par snobisme? Non. Par fétichisme? Allons, allons. Par affection? Disons ainsi. Une halte à Sierre, avant de reprendre les chemins tempétueux du Rhône. L’écrivain des Carnets de Malte Laurids Brigge m’attend dans une maison patricienne. Il n’y a jamais habité, il avait sa tour pas loin sur les hauteurs, au château de Muzot, son verger et ses rosiers, ses élégances, ses chapeaux et ses flâneries. Mais il est partout présent, grâce à Brigitte Duvillard, traductrice aux yeux azur ardents qui dirige la Fondation Rilke. C’est elle qui me guide. Je traverse les salles qui sont autant de stations valaisannes dans la vie d’un cosmopolite qui dans l’infime révélait l’infini.

En romantique, je m’arrête devant la photo d’une danseuse. C’est son crépuscule farouche qui m’appelle. Le noir et blanc d’une irréductible. Elle s’appelait Wera Ouckama Knoop, elle était ballerine à Munich, elle est morte à 19 ans d’une leucémie. L’écrivain, qui connaissait sa mère, l’avait rencontrée quand elle était enfant. Quand il apprend sa disparition, il est bouleversé. Pour elle, au nom de cette infante trop vite emportée, il écrira Sonnets à Orphée.

Le hasard a des politesses. Brigitte Duvillard organise ce soir-là une promenade poétique dans le Petit Bois à Sierre. Plutôt que d’enfourcher mon destrier mécanique, je me glisse dans le cortège, une dizaine de pèlerins en anorak venus écouter l’oracle rilkéen. Il pleut, les parapluies poussent comme des champignons et la forêt s’échancre, amadouée par nos torches. Au côté de Brigitte, un entomologiste merveilleux évoque le destin des lucanes cerf-volant qui ont leurs habitudes ici. Notre cicérone, elle, lit des lettres de Rilke. Dans l’une, il déplore que son ami, le sculpteur Auguste Rodin, se soit vanté d’appréhender la nature comme un chasseur. Il revendique, lui, la contemplation, cet art de faire corps avec la matière du monde.

Sur ma selle, le lendemain, j’ai ma foucade. J’impose à mes camarades, Anouch et Mathilde, un crochet par Rarogne, là où Rainer Maria Rilke repose. «RilkeDorf» indique d’ailleurs le panneau. Pas âme qui chante pourtant sur le chemin de croix qui conduit à l’église plantée sur la colline comme une épée dans le granit. Le décor n’a pas changé, jurerait-on, depuis ce 2 janvier 1927 où il était inhumé ici même à 51 ans. La même bâtisse hostile veille sur le cimetière, le même clocher abrite du diable et de ses bourrasques. Je cherche la tombe de Rilke au milieu d’autres ordonnées et coquettes comme il se doit. Elle ne figure pas au répertoire. Je fais le tour de l’église et je la découvre adossée au mur, désarmante avec sa croix de bois et sa poignée de boutons de rose. Sur la pierre, une épigramme à moitié effacée. Pas de génuflexion ici, de gloire de pacotille. Mais le vent mauvais et des sentiers escarpés qui cisaillent la montagne. L’enfance des poètes.


■ Boris Busslinger, Vevey, 10h

Du labeur, des larmes et de la sueur. Le programme de cette deuxième journée de vélo est épique. Après avoir dompté le plat chablaisien de Martigny à Vevey, les braves attaquent la montée: 450 mètres de dénivelé positif pour atteindre Châtel-St-Denis. De quoi (très) rapidement se réveiller. Les braquets cliquettent, les vélos craquent, les hommes soufflent. Séverine, elle, sifflote. Sur son vélo électrique.

La pente est raide, la température fraîche. Le vent siffle dans les branches des arbres et les pâles du drone, qui nous suit haut dans le ciel. Chacun serre les dents en menant sa barque – toutes battues par les flots. Un dernier coup de pédale et le sommet est atteint, événement salué d’un grand soupir et de quelques mots fleuris.

Les préalpes fribourgeoises se dévoilent dans la brume. Châtel est en vue, notre repas de midi aussi. Impossible de faire escale dans ce haut lieu fromager sans s’arrêter au Tivoli. Croûtes au fromage, papet, et… pas de meringues à la crème. Il reste encore 25 kilomètres à tirer pour rejoindre la capitale de la Gruyère. Restons modeste.


Mercredi 6 octobre

■ Mathilde Farine, entre Brigue et Sierre, 16h

«Je vais vous dire ce qui n’a pas changé!»

«Vous voulez savoir ce qui a changé ces vingt dernières années en Valais? Je vais vous dire ce qui n’a pas changé!»

Inutile de vous dire qui m’a dit cela. Ils sont plusieurs. Et leur réponse à cette question que je n’ai jamais posée est toujours la même: l’absence de tronçon autoroutier entre Sierre et Brigue, un tel serpent de mer qui suscite autant d’agacement que de dérision. Notamment parce qu’il semble finalement plus facile de creuser un tunnel ferroviaire au Lötschberg que de construire une autoroute pour rallier le Haut-Valais.

Le sujet est pourtant à l’agenda depuis une éternité. Depuis les années 1960, ce bout de route fait partie du plan du réseau autoroutier en Suisse, souligne un de nos interlocuteurs qui ne cache pas son étonnement devant les complications qu’a suscité (et suscite toujours) ce tronçon.

Certains morceaux ont déjà été construits, certains sont même utilisables. Quelques-uns, comme on a pu le constater aux environs de Rarogne, sont en train d’être bâtis. Mais la planification a changé plusieurs fois, faisant passer le projet d’un côté puis de l’autre de la vallée plusieurs fois. Des oppositions de privés ou d’organisations environnementales ont aussi ralenti le processus, tandis que des aspects techniques et géologiques – beaucoup de tunnels sont nécessaires – ont aussi complexifié les constructions.

«Un jour, peut-être dans 20 ans, tout sera construit. Ou pas!», conclut en rigolant un Valaisan.


■ Yan Pauchard, Aigle, 12h30

Le Temps entre en piste

Il a la septantaine fringante. «Pierrot», pistard à la chevelure d’argent, est notre guide pour les premiers pas (tours de roue) de notre équipe sur la piste du vélodrome du Centre mondial du cyclisme à Aigle, Mecque du deux-roues et, donc, passage obligé du Temps à vélo.

Au programme, une heure et demie à dompter l’ovale aiglon de 200 m et ses virages à 45 degrés. Il a fallu surtout commencer à dompter les montures, des vélos sans freins avec pignon fixe et gros braquets. Après une chute initiale de votre serviteur – sans mal, car à l’arrêt –, l’équipe a plus qu’assuré.

Malgré les premières appréhensions, les trois compagnons ont aligné les tours à plus de 30 km/h de moyenne, avec des pointes à 45 km/h, en plongée en sortie de virage. Le tout en écoutant religieusement les précieux conseils de «Pierrot» qui rappelait que «la vitesse est ton amie» et que «c’est quand tu ralentis que tu guidonnes et que ton vélo glisse comme sur de la glace». Au final, le plus téméraire d’entre nous, Grégoire, a tenté le chrono, sur un tour lancé. Il a tout donné. Son temps: 14,60 secondes. «Un résultat costaud» selon notre guide. Le record du monde: 9,1 secondes…


■ Grégoire Baur, Martigny, 9h

De l’importance du prologue

Chaque grand tour a le sien. Du coup, nous, on a fait le nôtre, de prologue. Une étape, pas prévue au programme, mais nécessaire pour se mettre en jambes. Etant donné qu’on part de Martigny ce mercredi 6 octobre et que mes collègues Boris Busslinger, Séverine Chave et Yan Pauchard connaissent peu le mythe de la Foire du Valais, il fallait y faire un passage.

Aucun cliché n’a été épargné: blanc à l’apéro, raclette au menu et sucre du Grand-Père Cornut en guise de digestif. Et pour agrémenter tout ça, un tube à plus de 450 millions de vues sur internet. Nomcebo Zikode, la chanteuse de Jerusalema, était de passage à Martigny et a mis le feu. Le reste de la soirée appartient à ses acteurs principaux, qui eux-mêmes ne sauraient le raconter. Mais ceux qui connaissent la Foire du Valais savent.

Ce matin, c’est le départ de notre première étape. Une étape de plat promise aux sprinters. Le peloton devrait profiter pour se refaire une santé.


Mardi 5 octobre

■ Célia Héron, Andermatt (UR), 16h30

Ni train, ni bus. «Risque de glissements de terrain». Les débordements des cours d’eau tessinois auront carrément détourné le cours de notre voyage: après avoir fait le deuil du périple à vélo de Locarno jusqu’à Domodossola et nous être résolues à prendre un bus d’urgence faute de trains, les CFF ont douché nos derniers espoirs en milieu de journée: même les bus de remplacement sont annulés par sécurité.

Action/réaction. Google Maps dessine notre seule alternative pour rendre à temps les vélos à l’équipe qui prendra le relais mercredi à Brigue: s’y rendre directement. Soit 4h30 de train dont le trajet raye définitivement de la carte notre étape frontalière. La déception est (un peu) compensée par les paysages d’automne entre Göschenen et Andermatt et leurs folles rivières.

A noter: avec trois changements et trois vélos électriques de 20 kilos à suspendre aux crochets du train, le voyage n’est pas forcément beaucoup moins sportif. Enfin, c’est ce qu’on se dit.


■ Sylvia Revello, Locarno, 8h30

En ouvrant la fenêtre ce matin, nous espérions une accalmie. Le rideau de pluie sur ciel désespérément gris a douché nos ambitions. Dire que nous avions délibérément choisi de pédaler au Tessin pour sa douceur et son soleil. Nous voilà servies. Recluses dans notre auberge non loin du lac, nous tentons de faire sécher nos vêtements et autres baskets copieusement essorés. La pluie, elle, ne cesse pas. Durant les dernières 48 heures, 161 mm d’eau ont été relevés à Mogogno, dans le val de l’Onsernone, 125 mm à Cevio, dans la vallée de la Maggia, 120 mm à Airolo, au sud du col du Gothard et 92 mm à Locarno Monti.

L’application MétéoSuisse indique les «comportements à adopter en cas de fortes pluies»: «Etre vigilant sur les rives des cours d’eau et des plans d’eau ainsi que sur les terrains en pente mais aussi sur la route.» Or, l’itinéraire prévu pour rejoindre notre prochaine étape, Domodossola (Italie), longe précisément la rivière Melezza. De guerre lasse, nous nous rendons à l’évidence: le train risque bien de remplacer le vélo. Un petit tour sur le web achève de nous plomber le moral. «En raison du danger d’inondation, la liaison ferroviaire entre Locarno à Domodossola, est interrompue pour une durée indéterminée», indique le centre d’information du trafic ferroviaire à l’ATS. Heureusement, des bus de remplacement ont été mis en place. Reste à voir si nos vélos pourront faire partie du voyage.


Lundi 4 octobre

■ Virginie Nussbaum, Locarno, 19h

La route jusqu’à Locarno est agréable, si ce n’est la pluie qui continue de tomber sans discontinuer. Nous longeons des routes de campagne quasi désertes en tentant d’éviter les flaques de boue. De temps à autre, un éclair.

Finalement, on aperçoit le lac et, enfin, la Piazza Grande. Pas d’écran géant, mais la promesse d’aller se sécher – nos chaussures ont des airs de piscine à débordement. Et l’espoir que mardi, le ciel offre quelques accalmies: la route sera longue jusqu’à Domodossola.




■ Virginie Nussbaum, Lugano, 14h

Comme prévu, l’arrivée à Lugano est humide, le clocher de la cathédrale Saint-Laurent se perd dans la brume. «C’est tellement rare», rient ceux qu’on croise en chemin – c’est vrai, les Suisses viennent habituellement chercher ici la douceur, un air du Sud à la Nino Ferrer. Et une offre culturelle, aussi. En particulier depuis 2015, année où le LAC (Lugano Arte e Cultura) est sorti de terre sur la place Berardino-Luini, les pieds dans l’eau: un centre pluridisciplinaire qui, derrière ses imposantes baies vitrées, accueille une salle de théâtre et de concert de 1000 places et le Musée d’art de la Suisse italienne.

Le LAC est fermé les lundis mais son directeur, Michel Gagnon, nous accueille dans ses bureaux. Il y a sept ans, ce Québécois a pris les rennes d’une institution XXL que la population voyait d’un mauvais œil. Combien de temps lui a-t-elle fallu pour s’approprier les lieux? «Une minute.». Pour preuve, derrière le directeur, une photo du soir de l’inauguration où se sont pressées 35 000 personnes. La clé pour Michel Gagnon: «en faire un projet artistique mais aussi social, qui s’adresse à tout le monde». Ainsi au LAC, les grands orchestres côtoient les animations pour enfants et les opéras sont projetés gratuitement en direct sur l’esplanade.


Outre les retombées économiques, le LAC a «replacé Lugano sur la carte politique», estime Michel Gagnon. Et créé un appel d’air culturel: les artistes locaux se professionnalisent, tournent davantage… «Au point où je commence à manquer de place. On pourra bientôt inaugurer un nouveau théâtre!»

Avant de reprendre la route direction Locarno, petite visite sur l’ancien site d’Il Molino, rare espace autogéré culturelo-alternatif au Tessin, démoli en juin dernier sous hautes tensions politiques. Les gravats sont encore là, les appels à la résistance aussi.


■ Sylvia Revello, Cadenazzo, 8h30

Après une courte nuit dans un hôtel de Bellinzone, voici déjà l’heure de prendre la route direction la ferme Ramello, à quelques kilomètres de là. La route serpente le long de la rivière Tessin. Sous la pluie battante, on distingue à perte de vue des champs de courgettes, choux, laitues ou encore épis de maïs. Au loin, les nuages ont envahi les montagnes dont les sommets se détachent à peine.

A mi-parcours, un petit autel dédié à la vierge agrémenté de fleurs multicolores.

Après une petite heure d’aqua-biking, on rejoint l’exploitation familiale d’Adrian et Rosa Feiknecht, active depuis trois générations dans l’élevage de vaches laitières, la culture céréalière et, tout récemment, la production de malt.


■ Virginie Nussbaum, Bellinzone, 1h

C’est sur des fracas de verre brisé que s’ouvre cette étape tessinoise. L’écran du téléphone indique 1h du matin et des bruits étranges montent du rez-de-chaussée. Le vacarme continue pendant une dizaine de minutes, par à-coups: on dirait que quelqu’un saccage la salle à manger. Les trois coéquipières de l’étape se sont réveillées et tendent une oreille inquiète. L’une d’elles a la présence d’esprit d’appeler la police, l’autre vérifie que la porte est bien fermée à double tour. Puis le silence.

Les officiers qui finissent par arriver, lampe de poche en main, confirment ce pressentiment: notre petit hôtel bellinzonais a été cambriolé, une porte vitrée fracassée. Serait-ce l’œuvre des «baby gangs», ces bandes organisées de mineurs qui préoccupent les autorités du canton depuis plusieurs mois? Nous ne saurons pas s’il s’agit d’un casse ou de représailles. Après avoir répondu aux questions de la brigade, nous tentons de retrouver le sommeil. La route a ses aléas – celle du lendemain sera longue et pluvieuse.