«Et si c’était lui?» se demandait jeudi à la «une», tout frétillant, le gratuit Lausanne Cités. Et si c’était ce Bursinois – tout de même présent sur Facebook, hein!? – «à la fois confiant et lucide», qui «se sent prêt pour le combat»? «Sans forfanterie», parce que «beaucoup à Berne le considèrent comme un des leurs». On dit que «le temps semble jouer en sa faveur». Qu'«il apparaît de plus en plus comme le candidat du sérail apte à rassurer et rassembler une majorité du parlement». Il est «sous-estimé», dit même la Neue Zürcher Zeitung.

Lire aussi: Guy Parmelin: «Il faut maîtriser la croissance de l’Arc lémanique»

Ses «compétences en allemand ne prétéritent-elles pas [sa] candidature?» se demande l’hebdomadaire lausannois. Et il répond: «Franchement, en bon allemand, je me débrouille pas mal. En tout cas, on me comprend [rires]!» A vrai dire, ce sont plutôt celles dans la langue de Shakespeare qui posent problème. Ou font rire, c’est selon. Surtout ceux qui n’ont pas la langue dans leur poche comme le reporter au Tages-Anzeiger Jean-Martin Büttner, auteur d’une pochade féroce qui se termine ainsi: «I raise my glass in the tradition of your canton Vaudois and salute you and wünsch you viel Erfolg next week.»

Les compétences linguistiques. Celles de Guy Parmelin, semble-t-il, auraient paru assez faibles lors des auditions des groupes parlementaires, particulièrement en schwyzerdütsch. D’ailleurs, ce vendredi matin, presque vingt-quatre heures après sa publication, l’article en question, qui parle de cet anglais – véhiculaire, comme on le sait, quand on connaît mal les autres langues nationales – a déjà été partagé près de 1000 fois sur Facebook. C’est dire son succès. Et voilà le «big Vorteil of being provinziell», écrit Büttner. Donc no soucy, «your chances sont intact», M. Parmelin.

Lire aussi: On recherche homme d’Etat, désespérément

Dit-on qu’il a la rage lorsqu’on veut noyer son chien? «L’English of Guy Parmelin fait réagir a lot», titrent aussi 24 Heures et la Tribune de Genève. Lors des fameux hearings, «questionné en anglais et en allemand, il a répondu, la plupart du temps, en français. Interrogé ensuite par la télé alémanique, il a fait le buzz avec cette phrase: «I can English understand but je préfère répondre en français pour être plus précis.» «Die Quote des Tages» pour Watson, «la citation du jour». Depuis, les médias et les réseaux sociaux se déchaînent.» Et le Blick adore.

Bon, «l’anglais est un atout, mais ne pas le maîtriser n’est pas forcément rédhibitoire», nous rassure un PLR valaisan. «Guy Parmelin ne serait pas le seul ministre en délicatesse avec la langue de Churchill. On se souvient du tollé provoqué par Ueli Maurer lorsqu’il avait reconnu ne pas avoir lu le contrat d’acquisition du Gripen… parce qu’il était en anglais. Mais les réponses en français […] à des questions posées en allemand ont aussi jeté un certain froid. Il y a des convenances dans la Berne fédérale.»

Sur son site internet, il dit pourtant que «cette expérience est unique», le candidat que des langues de vipère ont lâchement tenté de déstabiliser en disant qu’il était prompt à lever le coude. On connaît ça, avec les Vaudois, hein? «Ces gens qui prennent deux heures de pause à midi et boivent du vin blanc», comme le veut le cliché «weltwochien», démenti à raison et avec énergie à l’Aargauer Zeitung: «Ich bin doch kein Alkoholiker». Pour s’en convaincre, il n’y à qu’à jeter un coup d’œil, sur Twitter, au compte GuyParmelin (@GuyParmelin), dit «amateur de la cuisine de terroir, parle aussi Parmelinglish».

Donc, cette expérience, «elle présente tout simplement l’opportunité de mieux se faire connaître auprès des élus parlementaires, même en quelques minutes. J’espère surtout qu’ils comprennent ma légitimité à être l’un des 7 Conseillers fédéraux. Après avoir franchi toutes ces étapes, y inclus médiatiques, et quelle que soit la décision des partis, je suis prêt à entamer cette nouvelle vie intensive au cas où le scrutin me désigne.»

Au cas où. Mais l’improbable Monsieur Parmelin, notons-le au passage, est conscient de la noblesse de la tâche: il met une capitale à «Conseillers fédéraux». Et pour ce qui est de l’apprentissage des langues, il fait confiance à son épouse, Caroline, cette Zurichoise d’origine avec qui il trinque sur la photo de L’Illustré, cette Zurichoise qui est professeur d’allemand à Gland: «J’essaie parfois de parler un peu allemand avec mon mari, mais il me dit que, après trois semaines de session, il ne peut plus entendre le suisse allemand…»

«Guy Parmelin, la force tranquille», titre le magazine romand, à propos de cet homme qu’on ne trouve guère mitterrandien sur le fond. Quoique. Dans l’attitude? dans cette assise? Alors Guy sourit. «Je comprends et pratique correctement l’allemand, en tout cas bien mieux que certains de mes collègues ne parlent le français! Mais c’est vrai qu’en rentrant de Berne je suis content de retrouver ma langue… et quelques habitudes, tout comme la cuisine familiale!» Car Caroline veille au grain: «Je le surveille. Tous ces repas au restaurant, ce n’est pas bien pour lui. Quand je lui demande ce qu’il voudrait manger en rentrant, il me répond toujours: des légumes!»

Suspense à J – 5. Et retour à la question liminaire: si c’était lui, donc? On laissera la conclusion au média qui le connaît le mieux, le quotidien des Vaudois: et si c’était «notre affable vigneron vaudois? Intelligent, cordial, aux compétences linguistiques limitées certes, mais doté de ce bon sens qui vaut tous les rapports et les études lorsqu’il s’agit de convaincre. L’image même du conseiller fédéral à l’ancienne, fiable à défaut d’être visionnaire. […] Après huit ans de crise, l’heure est à la normalisation des rapports avec le plus grand parti de suisse. C’est juste et bien.»