Le temps fort du raout autonomiste: l’intervention de Jean-Daniel Ruch, citoyen d’Eschert, dans le Jura bernois, village voisin de Moutier, actuel ambassadeur de Suisse en Serbie et au Monténégro. Et de rappeler qu’en 1975, lors des plébiscites qui avaient vu le Jura bernois et Moutier décider de rester bernois, «un gamin d’Eschert saisissait le drapeau bernois trônant dans sa tanière et s’élançait à toutes jambes fêter la victoire à Moutier. Le succès du «non» à l’adhésion de Moutier au canton du Jura signifiait moins le bonheur de rester dans le canton de Berne qu’une victoire contre l’intolérance et la violence.»
En vue du scrutin du 24 novembre, Jean-Daniel Ruch fait une tout autre appréciation et appelle ses concitoyens du Jura bernois à «réfléchir»: «La question n’est plus de coller une étiquette séparatiste ou antiséparatiste. La question est: où est notre meilleur intérêt, dans le statu quo ou dans un nouveau canton?» Pour le citoyen-diplomate, «le canton, comme cadre institutionnel, est un instrument indispensable pour promouvoir la prospérité. Le canton est comme une entreprise. Voulons-nous fonder notre propre entreprise ou parier que, en tant qu’employés, nous serons bien traités?» Et d’asséner «qu’une occasion pareille de décider de son destin est rarissime dans l’histoire». Jean-Daniel Ruch interpelle ses concitoyens du Jura bernois: «Quel esprit l’emportera le 24 novembre, l’entrepreneur ou le sur-assuré?» Il tord encore le cou à une idée véhiculée par les partisans du maintien du Jura bernois dans le canton de Berne, qui refusent de passer sous le joug des séparatistes. «Dans la négociation pour créer un nouveau canton, les Jurassiens bernois tiendront le couteau par le manche. Autrement, ils auront choisi, et c’est leur droit, de remettre leur destin et celui de leurs enfants entre les mains de la majorité de 95% qui dirige le canton de Berne, sans garantie que sa mansuétude un peu paternaliste durera toujours.»
Comme le maire de Delémont, Pierre Kohler, affirmant que si le «non» l’emporte le 24 novembre, «le Jura bernois va ensuite souffrir», Pierre-André Comte estime que «l’Etat de Berne, géant aux pieds d’argile, ne sera plus en mesure d’assurer des prestations spécifiques dont bénéficie aujourd’hui sa communauté francophone, qui sera considérée sur un pied d’égalité avec la communauté germanophone», laissant entendre que le vaste plan d’économies cantonales touchera aussi le Jura bernois.
La Fête du peuple jurassien 2013 à Delémont devait illustrer la mobilisation des partisans du nouveau canton des Juras. L’impression est mitigée. Il y a certes eu davantage de monde que lors des fêtes précédentes, mais bien moins que lors des rassemblements du même type dans les années 70. Pour titiller les Jurassiens bernois, le Groupe Bélier a mené une opération symbolique samedi à Berne: il a déposé une chaise devant le Musée d’histoire, «le siège que la Berne cantonale a parfois laissé au Jura bernois», rappelant que, depuis 2011, il n’y a plus de représentant du Jura bernois au parlement fédéral, l’UDC Jean-Pierre Graber n’ayant pas été réélu.
«Quel esprit l’emportera le 24 novembre, l’entrepreneur ou le sur-assuré?»