Le scrutin sur la loi Covid-19 constitue une première à plus d’un titre. C’est la première fois que l’on vote sur une loi urgente limitée dans le temps, avec, comme particularité supplémentaire, le fait que, si elle est rejetée, les mesures qu’elle comprend tomberont trois mois avant l’échéance prévue pour la plupart d’entre elles, sans possibilité de les remettre en route aussi vite que les opposants ne l'imaginent.

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C’est aussi la première fois que l’on vote sur une loi qui a été modifiée après coup. Le référendum a été lancé après l’adoption de la version initiale de la loi Covid-19, le 25 septembre 2020. Or, comme elle a pris le relais du droit de nécessité auquel a recouru le Conseil fédéral durant les premiers mois de la pandémie, elle a été modifiée deux fois par la suite, en décembre 2020 puis en mars 2021. Une nouvelle adaptation est actuellement en discussion au parlement.

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Cela explique pourquoi le texte publié dans la brochure du Conseil fédéral n’est pas identique à celui qui est en vigueur. La loi Covid-19 a été adaptée pour répondre à différents besoins nés des restrictions décidées par le gouvernement et du dispositif mis en place pour sortir de la crise. Les ajouts concernent la stratégie de dépistage et de délivrance d’un certificat vaccinal, les aides financières pour la culture, le sport, les manifestations publiques, les entreprises, ainsi que les «cas de rigueur».

Pointée du doigt par les Amis de la Constitution à l’origine du référendum, cette situation est évidemment gênante et la Chancellerie devra tout faire pour qu’elle ne se présente plus à l’avenir. Mais c’est le seul point où l’on peut donner raison aux opposants.

Le reste de leur argumentaire est un tissu de spéculations, d’approximations trompeuses et d'inepties. Contrairement à ce qu’ils prétendent, la loi Covid-19 n’a jamais servi de base légale aux restrictions décidées par le Conseil fédéral. Elle ne lui confère pas davantage la compétence d’obliger la population à se faire vacciner. Toutes les décisions prises au printemps 2020 par le gouvernement reposaient sur un autre texte législatif: la loi sur les épidémies, approuvée par le peuple en 2013.

Diffusé en version choc sur les réseaux sociaux, l’argumentaire des opposants trouve un certain écho auprès des esprits rebelles de tout poil et des contestataires qui estiment que le Conseil fédéral a outrepassé ses pouvoirs, et sont rétifs aux vaccins et aux certificats censés relancer une vie plus normale. Ce référendum est cependant inutile et contre-productif.

Si la loi Covid-19 devenait caduque le 25 septembre, comme l’espèrent ses adversaires, il y aurait un vide d’au moins plusieurs mois, car l’ancrage dans les lois ordinaires des mesures de soutien nécessaires (chômage, perte de gain, etc.) prendrait du temps en raison des délais référendaires. Céder au discours excessif des auteurs du référendum, c’est succomber au chant des sirènes, c’est se lancer dans une odyssée homérique et prendre le risque d’aller se fracasser contre de dangereux récifs.