L’UDC revient occuper son terrain électoral favori, le sentiment d’insécurité des Suisses et la responsabilité des étrangers dans la montée de la criminalité. Alors qu’aucune statistique ne corrobore les accusations selon lesquelles l’entrée de la Suisse il y a un an dans l’espace Schengen, qui a aboli les contrôles aux frontières, aurait aggravé la situation en matière de criminalité, l’UDC veut que le Conseil fédéral dénonce cet accord. Samedi, à Näfels, ses quelque 400 délégués ont voté une résolution dans ce sens. Mais sans afficher trop de convictions.

Explications avec Hans Fehr, directeur de l’Association pour une Suisse indépendante et neutre (ASIN) et conseiller national UDC.

Le Temps: Votre assemblée des délégués charge la direction du parti de présenter avant la fin de l’année un bilan des conséquences de l’adhésion de la Suisse à Schengen. Et si les craintes sont avérées « la Suisse devra examiner les moyens de résilier cet accord ». N’est-ce pas un peu mou comme résolution ? L’UDC nous avait habitués à plus d’intransigeance.

Hans Fehr: Non, non. Le retrait de l’accord de Schengen est une affaire très sérieuse dont il faut examiner toutes les conséquences. Nous chargeons nos députés aux Chambres fédérales d’exiger du Conseil fédéral un bilan sérieux, avec tous les avantages, s’il y en a, et tous les désavantages de notre participation à l’espace Schengen. Nous voulons procéder en deux étapes. D’abord exiger un moratoire dans les six mois qui viennent pour la reprise du droit communautaire. Ne plus adapter automatiquement le droit suisse à l’évolution du droit européen. Préserver notre marge de souveraineté. Ensuite, si nous considérons qu’il y a trop de désavantages, nous lancerons une initiative pour exiger le retrait de la Suisse de l’accord Schengen.

– Cela risque de heurter les Européens, car l’espace de libre circulation est hautement symbolique pour eux. Ne craignez-vous pas des rétorsions?

– Absolument pas, car nous avons aussi des offres à mettre dans la balance, comme l’achèvement des nouvelles transversales alpines qui serviront en premier lieu aux Européens, ou l’accord sur la fiscalité de l’épargne par lequel nous reversons des centaines de millions de francs aux Etats partenaires. Nous devons fermement signaler à l’UE que si nous sommes prêts à collaborer pour améliorer la sécurité du continent, nous ne sommes pas disposés à accepter l’intégration politique insidieuse par le biais de l’accord Schengen. On peut collaborer techniquement, par l’échange de données au sein du système d’information Schengen (SIS) nous ne voulons pas renoncer à la surveillance de nos frontières.

– La Suisse ne peut pas se transformer en forteresse. Rien qu’à Genève, il y a toujours eu une centaines de points d’entrée non surveillés.

– Nous ne voulons pas une forteresse, mais rétablir le niveau de sécurité qui existait avant Schengen en permettant aux garde-frontières d’opérer des contrôles aux limites territoriales.. Schengen n’est eut-être pas à l’origine de tous les problèmes de criminalité en Suisse, mais l’application de cet accord a aggravé les problèmes.

– Le peuple a voté pour adhérer à l’espace Schengen. L’UDC était jusqu’ici plus respectueuse des décisions populaires.

– Le Conseil fédéral n’a pas dit la vérité au peuple. Il a prétendu que nous aurions davantage de sécurité. Or, nous n’avons que des désavantages, plus de criminalité, moins de souveraineté, et quand nous croyons avoir un avantage, comme le blocage des visas pour des citoyens libyens, les autres pays nous obligent à faire marche arrière pour préserver leurs intérêts. Nous avons été trompés. Ce que le peuple a accepté, le peuple peut le défaire.

– Mais aucune statistique ne prouve qu’il y a eu une dégradation de la situation en Suisse à cause de Schengen.

– C’est vrai, on ne peut pas comparer car les bases statistiques ont changé l’an dernier. Mais chacun sent bien au quotidien que l’insécurité s’est aggravée. Chacun en fait l’expérience quotidiennement autour de lui.