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Architectes et artistes proposent des solutions pour occuper les espaces commerciaux. A Renens, ils exposent des prototypes d’habitations minimales

Maison nomade contre la crise du logement
Exposition Architectes et artistes proposent des solutions pour occuper les espaces commerciaux
Ils exposent des prototypes d’«habitat minimal»
Lorsqu’une ville manque de logements abordables, pourquoi ne pas investir les espaces laissés vacants dans des locaux commerciaux à l’abandon? La question agite les cités estudiantines comme Genève, qui disposent d’une pléthore de bureaux mais manquent d’appartements. L’Association pour le logement des jeunes en formation (ALJF) s’en empare dans l’exposition Les Garages, à voir jusqu’en mai à Renens (VD), dans le local d’un ancien concessionnaire automobile.
Artistes et architectes y dévoilent le fruit de leurs réflexions sur «l’architecture d’urgence». «Nous proposons des solutions pour occuper des espaces commerciaux vides de manière temporaire et nomade», explique Christoph Holz, du studio Whood, à Lausanne. Objectif: prouver par l’exemple qu’il est possible de trouver à peu de frais et rapidement des solutions ephémères face à la crise du logement. Six groupes ont conçu chacun un micro-habitat sur la base de deux contraintes: occuper un volume pas plus grand que 7 mètres carrés, pour un coût ne dépassant pas 1000 francs.
Le module «Kasa», développé par Christoph Holz, son associée Jeanne Wéry et Regis Widmer, s’articule autour d’un matelas déposé dans une boîte. Des meubles de récupération – placard, commode, secrétaire – se greffent en étoile sur la structure centrale pour former une «chambre inversée». «Plutôt que d’installer des meubles dans un volume fermé, nous voulions exploiter l’espace libre autour du cocon central», explique l’architecte Jeanne Wéry. Prix total des matériaux: 380 francs. Temps de déménagement estimé: 40 minutes.
Le «cube russo-japonais», inspiré à la fois des matriochkas et des maisons traditionnelles japonaises – les Shoji, assemblées sans clous –, est composé de six pièces dont les dimensions ne dépassent pas l’encadrure d’une porte. Emboîtée à l’intérieur de la structure, une couchette installée en hauteur évoque les hôtels-capsules tokyoïtes. Installés contre les parois, des cubes en escaliers servent de rangement.
La Bifanas conçue par le collectif d’architectes de l’EPFL Sapin, sous la forme d’une cabane triangulaire, rappelle une hutte ou un bungalow. Entièrement formées de lambourdes, longues pièces de bois reliées entre elles par des cordes, les parois s’ouvrent à la manière d’un store.
Mattia Pretolani et Grégoire Guex Crosier ont inventé quant à eux un «lit rangé dans une bibliothèque». Les étagères s’empilent autour d’une structure triangulaire pour rationaliser l’espace.
Pour leurs concepteurs, ces prototypes préfigurent un nouveau mode d’habitat, qui s’adapte aux évolutions urbanistiques et démographiques des villes. «On commence par montrer que c’est possible. L’étape suivante est de concevoir un cadre légal dans lequel ce type d’habitation peut s’insérer», souligne Christoph Holz. «On se greffe dans les interstices du marché immobilier. Tout ce qui permet de créer de nouveaux logements à moindre coût nous intéresse», explique de son côté Gabriel Gonzalez, membre de l’ALJF et socio-anthropologue urbain.
L’association a derrière elle vingt-cinq ans d’expérience dans la quête de logements temporaires pour étudiants modestes, dans des appartements ou des maisons inoccupés. Elle négocie avec leur propriétaire, le plus souvent une commune, un contrat de «prêt à usage», qui permet d’habiter les lieux pour une durée déterminée, allant de six mois à plusieurs années.
Les locataires éphémères ne paient pas de loyer, mais chacun alimente à hauteur de 100 francs par mois un fonds tenu par l’association, destiné aux travaux nécessaires à l’entretien des lieux prêtés. «Nous contribuons ainsi à éviter le délabrement des logements vides», souligne Christoph Holz.
Actuellement, 200 étudiants ont trouvé un toit sur l’Arc lémanique de cette manière. Mais la liste d’attente s’allonge: 300 étudiants espèrent encore obtenir un logement auprès de l’ALJF.
Exposition «Les Garages», Rue du Mont 2, Renens. Portes ouvertes le 01.04 de 17h à 19h/le 24.04, de 17h à 21h et le 22.05, de 17h à 21h. Conférence sur le thème de l’habitat minimal le 16.04 à 18h, au Bourg, à Lausanne.
«On se greffe dans les interstices du marché immobilier»