Les pressions augmentent sur le Conseil fédéral pour assouplir les restrictions visant à lutter contre le Covid-19. Le gouvernement doit fixer sa ligne mercredi et prévoit ensuite une consultation auprès des cantons. «Nous devons permettre à la population d’entrevoir le bout du tunnel car, pour l’instant, la politique du Conseil fédéral n’offre aucune prévisibilité», amorce Cristina Gaggini, la directrice romande d’Economiesuisse, qui signe un plan de déconfinement en quatre étapes avec d’autres faîtières économiques.

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Le secteur économique avait déjà agi de la sorte durant la première vague, là, il brandit le vaccin comme sésame libérateur en exigeant des autorités qu’elles changent de paradigme et fondent ses décisions sur la couverture vaccinale de la population. Mais vu le rythme de vaccination des cantons, n’a-t-il pas peur de se tirer une balle dans le pied? «En effet, la vaccination avance relativement lentement car les doses arrivent moins rapidement que prévu, mais les autorités continuent de nous assurer que la majorité des gens disposés à se faire vacciner le seront avant l’été», répond Cristina Gaggini.

Le groupe – constitué d’Economiesuisse et de l’Union patronale suisse, ainsi que des Chambres de commerce cantonales et d'un grand nombre d’associations de la branche – ne s’est pas doté d’avis d’épidémiologistes ou de médecins pour rédiger son plan. Mais il n’a «en aucun cas l’impression d’aller à contre-courant des recommandations du milieu de la santé, selon sa directrice. Le but est de maintenir la santé physiologique de la population en limitant la propagation du virus, tout en assurant sa santé psychologique et en prévenant les multiples faillites économiques.» «Merci aux milieux économiques pour leurs réflexions, nous n’y avions pas pensé», répond avec ironie le conseiller d’Etat genevois Mauro Poggia.

Faire éclater la limite de cinq personnes

Dans un premier temps, il s’agirait d’assouplir les restrictions pour les activités «à faible risque d’infection», dès le 1er mars. «C’est-à-dire la majorité des activités en plein air telles que le patin à glace, le vélo ou la randonnée. La limite de cinq personnes pour les rassemblements dans les espaces publics devrait être assouplie, voire supprimée», demandent les faîtières. Selon elles, les restaurants devraient également être autorisés à ouvrir leurs terrasses. Les magasins vendant des produits «non essentiels» devraient pouvoir rouvrir à cette date. Le télétravail ne doit plus être obligatoire, mais recommandé.

Une fois les groupes à risque vaccinés, d’autres assouplissements s’imposent dans une deuxième phase, selon les organisations économiques: «Les restaurants, les cinémas ou les espaces de bien-être doivent pouvoir rouvrir avec des concepts de protection appropriés. L’enseignement en présentiel doit aussi reprendre dans les hautes écoles.» Pour cela, des dépistages intensifs sont nécessaires, afin d’identifier les personnes asymptomatiques à un stade précoce.

Lorsque les vaccins seront disponibles pour tous, toutes les manifestations pourront avoir lieu «sans concept de protection si tous les visiteurs et prestataires sont immunisés». L’Etat ne devrait pas pouvoir imposer de restrictions aux personnes vaccinées. Lorsque l’immunité collective sera atteinte, toutes les restrictions devront être levées. «La Confédération doit se doter d’une stratégie claire en cas de nouvelles vagues causées par des variants malgré la couverture vaccinale.» Economiesuisse, l’Union patronale suisse, conjointement avec les autres faîtières, demandent enfin la création d’un certificat de vaccination «numérique, infalsifiable et reconnu à l’échelle internationale».

Enfoncer des portes ouvertes

Pour le ministre de la Santé genevois, ce plan de déconfinement ne «fait qu’enfoncer des portes ouvertes. Toutes les mesures sanitaires mises en place l’ont été dans le but de maintenir un niveau supportable pour les hôpitaux, alors évidemment que les mesures vaccinales sont décisives pour leur assouplissement.» Mauro Poggia s’étonne qu’il n’y ait, dans le plan promu par les faîtières économiques, aucun indicateur précisant comment passer d’une phase à une autre. «Nous sommes encore dans l’inconnu, notre situation épidémiologique peut changer d’une semaine à l’autre», ajoute-t-il.

Néanmoins, l’ordre de marche que préconise la Conférence des directeurs cantonaux de la santé, dont le comité se réunit ce jeudi, correspond aux premiers points évoqués par les milieux économiques. «Nous devrions pouvoir envisager certaines ouvertures prochainement, à commencer par les commerces et certaines activités sportives. Le 1er mars, cela fait sens. Mais pour les restaurants, c’est encore l’inconnu», déclare Mauro Poggia. Les décisions d’assouplissements ne devraient pas intervenir cette semaine, selon le conseiller d’Etat, plutôt la semaine prochaine, avec un petit délai pour permettre aux diverses branches de se préparer.