Un collectif de citoyens, les syndicats, des députés, des représentants des communes… Votre réforme de la protection de l’enfance suscite une rare levée de boucliers (lire: Neuchâtel a mal à sa protection de la jeunesse). Que répondez-vous à toutes ces craintes concernant le futur de la prise en charge des enfants?

Il faut rappeler en préambule que la politique neuchâteloise de protection de l’enfance date d’un demi-siècle. Nous n’avons pour l’heure pratiquement pas d’alternative au placement. Ce qui a pour effet que nous plaçons trois fois plus d’enfants en institutions que les autres cantons romands. Je peux rassurer les citoyens: si le dispositif actuel peut prendre en charge 310 enfants, le futur pourra toujours le faire, mais cette fois non plus avec une solution unique, mais avec des réponses multiples, notamment davantage de suivis individuels en ambulatoire. Cependant, je suis consciente qu’il s’agit d’un changement de paradigme majeur, une modification des pratiques professionnelles profonde.

Justement, pour un tel changement, n’êtes-vous pas allée trop vite, de manière trop brusque?

Au contraire. Dès 2017 déjà, nous avons informé les conseils de fondation et les directions d’institution concernés. Nous avons négocié une période transitoire avec chacun d’eux jusqu’en 2021, pour une réforme finalement lancée le 1er janvier 2019. Quatre ans est une durée tout à fait raisonnable.

Mais cette réforme ne cache-t-elle pas en réalité une volonté d’économies?

J’ai toujours été transparente. Cette réforme est le fruit de deux réflexions: la première est la nécessité de faire évoluer le système, et la seconde d’intégrer une diminution de budget de 3 millions de francs par année. Compte tenu des difficultés financières du canton, le Conseil d’Etat a été contraint de mettre sur pied un programme d’économies. Mais nous accompagnons le processus, notamment par la mise sur pied d’une bourse d’emploi pour soutenir les personnes qui seront licenciées. En parallèle, nous développons de nouvelles prestations dans l’ambulatoire, à l’exemple d’un accompagnement à la parentalité en collaboration avec la Croix-Rouge, ce qui permet de créer de nouveaux postes. Nous améliorons enfin la collaboration avec les structures d’accueil extrafamilial, créons un réseau de familles d’accueil et développons des prestations de soutien à la famille et à l’enfant en difficulté, qui n’existaient pas jusqu’ici.

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Les familles d’accueil seront-elles suffisantes pour pallier la diminution du nombre de places en foyer?

Nous avons pour l’heure 30 familles d’accueil reconnues. Il nous en faudrait 60. Ce n’est certes pas encore assez, mais nous partions de zéro.

Un postulat déposé mi-mai demande un rapport sur cette nouvelle politique, afin de mieux définir les besoins avant sa mise en œuvre. Pourquoi proposer de le refuser?

Je me suis engagée devant le plénum du Grand Conseil à la session de mars de dresser un bilan à mi-chemin de la réforme, soit à la fin de l’année 2020, avec les partenaires concernés, en assurant que, le cas échéant, il y aurait des adaptations. Le postulat est donc superflu.