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A Neuchâtel, les apparentements agitent la course au Conseil des Etats

Le Centre et le POP demandent au Grand Conseil de réintroduire en urgence les apparentements de listes en vue de l’élection au Conseil des Etats d’octobre. Trop tard, répondent plusieurs partis, sans nier la nécessité d’une discussion

Le château et la collégiale de Neuchâtel, le 18 avril 2019.  — © Jean-Christophe Bott/KEYSTONE
Le château et la collégiale de Neuchâtel, le 18 avril 2019. — © Jean-Christophe Bott/KEYSTONE

Changer les règles de l’élection neuchâteloise au Conseil des Etats à quelques mois de sa tenue, en réintroduisant en urgence les apparentements de listes supprimés il y a six ans: le POP et Le Centre ont soumis récemment au Grand Conseil une modification de loi en ce sens. Elle a déjà obtenu le soutien de la majorité de la commission législative, par sept voix contre quatre et deux abstentions. Le plénum devra se prononcer lors de sa prochaine session.

Pour les auteurs du projet, il s’agit de «réparer une erreur parlementaire». En supprimant les apparentements pour les élections au Grand Conseil en 2017, le législatif aurait négligé le fait que cette décision toucherait également l’élection au Conseil des Etats, qui dépend du droit cantonal et se joue à la proportionnelle. Evoqué en commissions à l’époque, cet effet secondaire aurait ensuite été «oublié». Estimant que les petits et moyens partis sont «largement défavorisés» par cette situation, le POP et Le Centre veulent la corriger avant le scrutin d’octobre prochain.

Le PLR fera tout pour retarder les débats

De quoi faire bondir le président du PLR Neuchâtelois Fabio Bongiovanni. Il rappelle que l’élection au Conseil des Etats s’est déjà déroulée selon ce régime en 2019: «Si l’absence d’apparentements était si problématique, pourquoi attendre le dernier moment pour rouvrir ce débat dans l’urgence, avec un mépris complet pour la démocratie et les institutions? Ce n’est ni cohérent, ni sincère!» Selon lui, la manœuvre vise surtout à permettre à la gauche de rafler le siège du conseiller aux Etats PLR Philippe Bauer, «qu’elle ne peut pas gagner autrement».

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Le PLR – qui a déposé un amendement demandant qu’un changement de loi ne puisse intervenir qu’au 1er janvier 2024 – utilisera «tous les moyens législatifs possibles» pour retarder les débats, prévient Fabio Bongiovanni. Il rappelle que la Commission de Venise recommande de ne pas procéder à des modifications du système électoral moins d’un an avant une élection. «Nous souhaitons rediscuter du mode d’élection des conseillers aux Etats neuchâtelois, mais pas dans ces conditions», conclut-il.

Aligné derrière le POP et Le Centre, le PS concède que la démarche aurait pu être entreprise plus tôt, tout en insistant sur la nécessité de ne pas laisser, dans la loi, une erreur qui empêche de respecter les quorums naturels inférieurs à 10% fixés par la jurisprudence du Tribunal fédéral. Le parti dément par ailleurs une stratégie de la gauche visant uniquement à évincer Philippe Bauer. Il rappelle que la proposition émane notamment du Centre et que l’UDC soutient la réintroduction des apparentements, qui pourraient aussi servir à la droite.

Pas d’urgence

Alors certes, le parti agrarien se dit favorable à ce retour en arrière, mais en aucun cas avant les élections fédérales d’octobre. A gauche, Les Vert·e·s font, quant à eux, part d’un certain embarras face à cette urgence. «Elle est non conforme au code de bonne conduite de Venise, relève leur présidente Christine Ammann Tschopp. Par contre, l’oubli des apparentements doit être réparé pour respecter la Constitution. Nous n’avons pas encore de position officielle, mais une partie d’entre nous pourrait entrer en matière sur l’amendement du PLR.»

Les vert’libéraux, enfin, se disent clairement opposés à cette modification. «Les apparentements ne nous semblent pas utiles et nous ne comprenons pas cette urgence», indique leur cheffe de file, Sarah Pearson Perret. Elle s’inquiète surtout de voir bâclé un débat sur une thématique qui devrait être traitée sereinement: «Le vrai problème, ce serait de ne pas avoir une discussion de fond sur les avantages et inconvénients de différents systèmes.»

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