La Ville de Neuchâtel s’est fait un nom en Suisse grâce à sa politique énergétique. Elle n’est pas la seule, mais elle peut se targuer d’avoir été pionnière et, comme le fait remarquer son délégué à l’énergie Christian Trachsel, «elle n’a jamais fléchi depuis 25 ans. Au contraire, elle est toujours partante pour en faire davantage.»

Elle clame fièrement vouloir accélérer sa révolution énergétique, se dote d’une stratégie en 17 mesures, y consacrera des moyens financiers et, originalité, effectuera un état des lieux des progrès réalisés tous les cinq ans. «Les programmes et les belles déclarations, c’est bien, confie le conseiller communal Olivier Arni. L’action et le partenariat, c’est mieux.»

Ville bardée de labels

Neuchâtel rappelle qu’elle fait des efforts pour limiter sa consommation d’énergie depuis 25 ans. Elle fut, en 1995, la deuxième ville de Suisse à décrocher le label «cité de l’énergie», après Schaffhouse. Il y a aujourd’hui 420 cités de l’énergie.

En 2006, elle passe au palier supérieur et est de nouveau la deuxième ville de Suisse à obtenir le label Gold européen, après Lausanne. En 2009, avec un millier de villes européennes et seulement trois autres cités suisses (Lausanne, Martigny et Zurich), Neuchâtel signe la «convention des maires» qui exige, d’ici à 2020, la réduction de 20% de la consommation de chauffage dans les bâtiments, la diminution de 20% des émissions de CO2 et l’augmentation à 20% de la part des énergies renouvelables.

Moins 25% en vingt ans

Le chef-lieu neuchâtelois devrait satisfaire à ces exigences, car en vingt ans, alors que le bilan énergétique national augmentait de 5%, le patrimoine communal (collèges, musées, installations sportives, stations d’épuration, bâtiments administratifs) constatait une réduction de 25% de ses besoins énergétiques. L’éclairage public consomme 40% d’électricité en moins qu’il y a huit ans. Le soutien à l’installation de panneaux solaires a permis de multiplier par 23 la production photovoltaïque.

Ce bon bilan ne suffit pas, décrètent les autorités locales, capables malgré les divergences partisanes de s’entendre sur la nécessité d’accélérer la stratégie énergétique. La ville veut rester exemplaire et s’appliquera à fédérer la population locale autour de sa révolution énergétique. «Le partenariat est la clé de la réussite», dit Olivier Arni. La ville peut déjà compter sur l’engagement de la société neuchâteloise de production et de distribution d’électricité Viteos, très impliquée pour produire de l’énergie renouvelable.

Autre particularité neuchâteloise: elle compte sur son territoire nombre d’entreprises et d’instituts de recherche dans le domaine énergétique. «Plus de cent chercheurs sont à l’œuvre ici», confirme Christophe Baillif, directeur au CSEM, le Centre suisse d’électronique et de microtechnique, convaincu que le bon climat énergétique neuchâtelois contribue à stimuler l’innovation. Et d’annoncer de prochains gros progrès dans le photovoltaïque, le stockage électrique ou la mobilité électrique.

Pour faire bonne mesure, Neuchâtel associe à son action l’écoexplorateur Raphaël Domjan, initiateur de l’aventure «SolarStratos» qui consiste à démontrer qu’un avion solaire peut aller bien plus haut qu’un avion conventionnel.

Un monitoring

L’accélération de la stratégie neuchâteloise vise la société à 2000 watts entre 2035 et 2050. Elle s’appuie sur dix-sept mesures, qui vont de la thermographie aérienne (la ville avait déjà testé l’état thermique des bâtiments en 2008, elle espère qu’au moins 100 toits désormais isolés auront changé de couleur lors de la prochaine mesure), à une facture d’électricité détaillée pour chaque ménage, la comparant à la moyenne et précisant quelles activités consomment beaucoup d’électricité, en passant par un prix local de l’énergie pour «nourrir une dynamique citoyenne», dit Olivier Arni, à un dimanche sans voiture, idée proposée par le parlement des jeunes.

L’originalité du programme neuchâtelois, c’est l’instauration d’un monitoring avec un état des lieux établi tous les cinq ans pour mesurer les effets des actions engagées. «Notre politique s’appuie sur quatre piliers, conclut Olivier Arni: l’exemplarité des autorités, la sensibilisation, le partenariat et les mesures incitatives. A ce titre, nous avons aux budgets 2017 et 2018 deux fois 200 000 francs pour soutenir l’assainissement des bâtiments privés, en complément aux soutiens fédéraux. Nous escomptons un effet de levier.»

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