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22 Romands font leur entrée sous la Coupole. Voici leurs petits portraits, et le point sur les six échecs enregistrés en Suisse romande

Jamais le parlement suisse n’aura été si féminin et si jeune. Un nombre record de femmes siégera au Conseil national lors de la prochaine législature: 84, soit 20 de plus que lors de la précédente période.
La proportion d’élues se monte désormais à 42%, contre 32% en 2015. Il s’agit du saut le plus notable enregistré depuis l’introduction du suffrage féminin, en 1971.
Au Conseil des Etats, cinq femmes passent la rampe dès le premier tour. Dans plusieurs cantons, le jeu reste ouvert et quelques candidates ayant fait des scores très honorables au premier tour devront décider si elles maintiennent leur candidature.
Le Conseil national, qui comptera près d’un tiers de nouvelles têtes, s’est aussi rajeuni. Ce sera même le plus jeune de l’histoire, même si le saut n’est pas spectaculaire: l’âge moyen des parlementaires pour 2019-2023 est de 49 ans, contre 50,3 ans lors de la précédente législature. Ce rajeunissement doit beaucoup aux succès des Verts, qui ont la moyenne d’âge la plus basse du parlement (44 ans), suivis par les Vert’libéraux (48 ans).
Le plus jeune membre du Conseil national est le nouvel élu PLR zurichois Andri Silberschmidt, 25 ans. Chez les Romands, la plus jeune est la Verte vaudoise Léonore Porchet (30 ans), le plus âgé l’UDC vaudois Jean-Pierre Grin (72 ans). (LT/ATS).
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Les 22 nouveaux Romands
■ Michel Matter (Vert’libéral, Genève)
Nouveau venu en politique, Michel Matter offre aux Vert’libéraux genevois un premier siège à Berne. Président de l’Association des médecins genevois et vice-président de la Fédération des médecins suisses, cet ophtalmologue jouit d’une solide assise dans les milieux de la santé. Après avoir été le porte-voix des médecins par exemple pour défendre le secret médical en prison, il a rejoint le parti ce printemps. Ce qui ne l’a pas empêché de rafler la tête de liste. A Berne, Michel Matter compte se profiler sur les questions de santé. Sans oublier bien sûr le climat. (Sylvia Revello)
■ Delphine Klopfenstein Broggini (Les Verts, Genève)
Un pur produit de l’appareil de parti. Elue au Grand Conseil en 2013, Delphine Klopfenstein Broggini est également la cosecrétaire générale des Verts genevois. Sociologue de formation, cette mère de famille de 43 ans s’est beaucoup engagée sur les questions de mobilité douce en tant que vice-présidente de la Commission des transports au parlement genevois. Très profilée à gauche, elle compte parmi les Verts qui rejettent l’accord-cadre avec l’Union européenne par crainte d’une précarisation des salaires. Sa priorité à Berne? La lutte pour l’égalité salariale. (S. Ro.)
■ Nicolas Walder (Les Verts, Genève)
A Genève, le nouvel élu est partout. Il préside la section cantonale des Verts, il est aussi maire de Carouge. Il a conduit son parti à beaucoup de visibilité, prenant parfois le pas sur les socialistes. Avec des positions très à gauche – comme sur la loi sur la laïcité ou le volet cantonal de la réforme de l’imposition des entreprises –, les positions dites pragmatiques ne sont pas sa tasse de thé. Ce que regrette une partie de sa formation, minorisée. Outre la transition écologique, la redistribution des richesses et la solidarité sont des credos qu’il portera à Berne. (Laure Lugon)
■ Vincent Maitre (PDC, Genève)
A 38 ans et une troisième législature au Grand Conseil, le fils de Jean-Philippe Maitre n’est pas un bleu. Président de la section cantonale du PDC, il affiche une volonté de moderniser, de rajeunir et de féminiser son parti, même si c’est lui toutefois qui l’aura emporté. Il assume la tendance sociale du PDC genevois et n’a pas non plus hésité, dimanche soir, à remettre sur le tapis l’adhésion de la Suisse à l’Europe. Même imaginée dans un futur lointain, la position n’est pas banale. Avocat, féru de windsurf, Vincent Maitre admet avoir besoin de pauses pour décompresser. (L. L.)
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■ Stefanie Prezioso (Ensemble à gauche, Genève)
Voici celle qui remplacera Jocelyne Haller à Berne, après le retrait de cette dernière, élue malgré elle. Historienne, professeure à l'Université de Lausanne, membre de Solidarités, Stefanie Prezioso, 50 ans, n’a pas grande expérience politique, mis à part quelques mois au Conseil municipal de la Ville de Genève en 2014, comme vienne-t-ensuite. Femme de mobilisation d’abord, siéger à Berne sera un défi. Représentante d’un mouvement politique curieux pour la Coupole fédérale, elle jouera sans doute la mouche du coche des socialistes et des Verts, et fera du travail propagandiste pour la mobilisation sociale. (L. L.)
■ Simone de Montmollin (PLR, Genève)
La faible présence médiatique de la libérale-radicale de 51 ans est inversement proportionnelle à sa popularité. L’ingénieure œnologue siège depuis deux législatures au parlement genevois et elle s’est déjà fait les dents en 2011 lors de sa première campagne au National. Sensible à la question des conditions-cadres de l’agriculture et à la défense des produits locaux, très ancrée dans les milieux agricoles, elle fait un carton plein dans la campagne genevoise, bénéficiant du corporatisme des agriculteurs, elle plaît aussi à une droite sensible aux questions environnementales. (L. L.)
■ Christian Dandrès (PS, Genève)
Avec une longue expérience de député au Grand Conseil – il y siège depuis 2009 – à 38 ans seulement, Christian Dandrès appartient à l’aile gauche du parti. Si les Genevois envoient à Berne ce pur et dur, c’est peut-être aussi parce qu’il est le meilleur ami des locataires. Avocat à l’Asloca, il a contribué à propulser cette association sur la scène politique, l’Asloca ne manquant jamais une occasion de lancer initiatives ou référendums concernant la politique du logement. Défenseur aussi des salariés, des assurés et de la fonction publique – comme pour la Caisse de prévoyance de l’Etat –, il ratisse large. (L. L.)
■ Léonore Porchet (Les Verts, Vaud)
A 30 ans, elle est la plus jeune élue romande. La mobilisation du 14 juin lui aura donné des ailes. Cette conseillère communale lausannoise s’est fait remarquer par son activité comme membre du collectif vaudois de la grève des femmes. Ancienne présidente des Verts lausannois, elle connaît bien son canton, puisqu’elle a passé son enfance dans le Nord vaudois entre Baulmes et Yverdon-les-Bains. En plus de l’environnement, cette spécialiste en communication se mobilise pour la culture ainsi que contre le harcèlement de rue. (Guillaume Carel)
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■ Sophie Michaud Gigon (Les Verts, Vaud)
Les consommateurs ont une nouvelle représentante au Conseil national. La secrétaire générale de la FRC veut porter les thèmes qui lui sont chers: un meilleur accès à l’information et moins d’obsolescence programmée. Avec ses 32 205 voix, elle est la troisième meilleure élue de sa section, alors qu’elle était 6e sur la liste. En plus de l’environnement, cette mère de deux enfants veut faire de l’égalité homme-femme une de ses priorités. Cette conseillère communale lausannoise est bien outillée pour faire avancer ses dossiers puisqu’elle parle très bien l’allemand. (G. C.)
■ Pierre-Yves Maillard (PS, Vaud)
Le meilleur élu de Suisse romande, c’est lui. Dimanche, Pierre-Yves Maillard a obtenu 59 514 voix, récoltant des suffrages bien au-delà de la gauche. Il brûle ainsi la politesse à la candidate aux Etats Ada Marra et à son chef de groupe Roger Nordmann. A 51 ans, il retrouve le Conseil national qu’il avait quitté en 2004 après une législature et demie. L’ancien ministre qui a marqué le canton de Vaud par les aides de l’Etat au service de la classe moyenne est depuis le mois de mai 2019 le nouveau président de l’Union syndicale suisse. Il promet d’y renforcer le pouvoir d’achat des travailleurs. (Aïna Skjellaug)
■ Jacqueline de Quattro (PLR, Vaud)
Elle passe sans transition du Conseil d’Etat au Conseil national. La ministre du Territoire et de l’Environnement du canton de Vaud a été élue dimanche en quatrième position de son parti, avec près de 45 000 suffrages. Elle devra rapidement démissionner de sa fonction exécutive pour permettre à son parti d’organiser des élections complémentaires. Avec Jacqueline de Quattro et la Genevoise Simone de Montmollin élues, le poids des femmes PLR romandes à Berne passe soudain de 1 à 3. Née à Zurich, la Vaudoise est parfaitement trilingue allemand, français et italien. (A. SK.)
■ François Pointet (Vert’libéral, Vaud)
Son élection ne tenait qu’à un fil dimanche soir à 22h00, alors que son parti attendait, le souffle coupé, les résultats définitifs concernant son deuxième siège qui aurait aussi pu filer à l’UDC ou au PDC. Au final,
c’est donc bien lui, encore relativement inconnu bien que député et président des Vert’libéraux vaudois, qui profitera de la locomotive Isabelle Chevalley pour se hisser au Conseil national, avec deux fois moins de voix qu’elle. Cet ingénieur informaticien est âgé de 50 ans. (G. C.)
■ Fabien Fivaz (Les Verts, Neuchâtel)
Il y a quatre ans, Fabien Fivaz n’avait pas réussi à sauver le siège des Verts neuchâtelois, qui avait été successivement occupé par Fernand Cuche et Francine John-Calame. Pour ces élections fédérales 2019, on disait le Chaux-de-Fonnier concurrencé à l’interne par la montée en puissance de Céline Vara. Mais sérieux et combatif, chef du groupe PopVertSol au Grand Conseil neuchâtelois, le biologiste de 41 ans, collaborateur scientifique au Centre suisse de cartographie de la faune, réussit l’exploit d’être le mieux élu de son canton au Conseil national. (Yan Pauchard)
■ Céline Vara (Les Verts, Neuchâtel)
Encore inconnue du grand public romand au printemps 2018 lorsqu’elle accède à la vice-présidence du parti des Verts suisse, Céline Vara est aujourd’hui le visage de cette vague verte. Femme, jeune, avocate ambitieuse et fille d’immigré italien, elle a littéralement dynamité l’élection dans son canton. Alors qu’elle espérait juste pouvoir reprendre le siège perdu en 2015 par les Verts neuchâtelois au National, elle réussit le tour de force d’être élue directement au Conseil des Etats, à la stupéfaction générale, prenant au passage le siège qui semblait promis au Parti socialiste. (Y. P.)
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■ Damien Cottier (PLR, Neuchâtel)
Durant une dizaine d’années, Damien Cottier a été un homme de l’ombre, œuvrant dans les coulisses de la Berne fédérale au titre de collaborateur personnel d’un autre PLR neuchâtelois, Didier Burkhalter. Son retour sur la scène politique en début d’année a été tonitruant, avec notamment un coming out remarqué le jour de la Saint-Valentin et une omniprésence durant la campagne, en particulier sur les réseaux sociaux. Un activisme qui a pu agacer, mais qui lui permet, à 44 ans, de revenir à Berne, mais cette fois à la lumière, dans les travées du Conseil national. (Y. P.)
■ Baptiste Hurni (PS, Neuchâtel)
A 33 ans, le CV de ce jeune avocat est déjà impressionnant. Membre de l’exécutif de Noiraigue durant quatre ans, député depuis 2007, actuel chef de groupe socialiste au Grand Conseil neuchâtelois et ancien président du parti cantonal, Baptiste Hurni était le grand favori pour remplacer Jacques-André Maire, dont il était le successeur désigné et dont il fut également l’assistant parlementaire. Le socialiste a confirmé les espoirs placés en lui en faisant son entrée au Conseil national. Son élection demeure ternie par la déroute de son parti au Conseil des Etats. (Y. P.)
■ Sidney Kamerzin (PDC, Valais)
Vingt-huit ans, jour pour jour, après l’élection de Simon Epiney, l’un de ses mentors en politique, Sidney Kamerzin, 44 ans, l’imite et décroche un siège à Berne, où, comme son prédécesseur, il entend défendre les régions de montagne. Pour une voix, l’actuel chef de groupe du PDC du centre au parlement cantonal a obtenu le meilleur score des démocrates-chrétiens valaisans, devant le sortant Benjamin Roduit. Mais pour la première fois de l’histoire, cette position ne lui permet pas d’être le meilleur élu du canton, devancé par Mathias Reynard (PS) et Philippe Nantermod (PLR). (Grégoire Baur)
■ Christophe Clivaz (Les Verts, Valais)
Il est l’écologiste valaisan qui multiplie les candidatures, à tous les échelons, qu’ils soient communaux, cantonaux ou fédéraux. Pour le National, la quatrième tentative fut la bonne pour ce professeur, spécialisé dans la politique du tourisme, de 50 ans. Et ce malgré une campagne discrète, qui lui aura coûté moins de 1000 francs. Sa victoire n’est pas personnelle, c’est celle d’un parti, longtemps raillé. Au moment de la célébrer, il l’a d’ailleurs dédiée à ses prédécesseurs, les pionniers de l’écologie en Valais, qui ont évolué dans des contextes plus difficiles. (G. B.)
■ Marie-France Roth Pasquier (PDC, Fribourg)
Longtemps considérée comme une outsider, Marie-France Roth Pasquier s’est finalement imposée sur le fil au terme d’une campagne solide. Députée au Grand Conseil depuis 2016 et membre de l’exécutif de sa ville de Bulle, très engagée dans sa région de la Gruyère, la PDC de 51 ans succédera à l’une des figures de la politique fribourgeoise, Dominique de Buman. L’élection de cette mère de trois enfants permet pour la première fois à son canton de compter une majorité féminine dans sa députation au Conseil national. (Y. P.)
■ Gerhard Andrey (Les Verts, Fribourg)
Gerhard Andrey n’avait jusqu’ici jamais eu de mandat politique. A 43 ans, il entre aujourd’hui par la grande porte, décrochant, un peu à la surprise générale, le premier siège des Verts fribourgeois au Conseil national. Ecologiste et entrepreneur, l’homme était soutenu par le mouvement citoyen progressiste Opération Libero. Fils de paysan, menuisier de formation avant de créer une société active dans le développement de solutions internet employant près de 200 personnes, parfaitement bilingue, Gerhard Andrey incarne les mutations de son canton, de plus en plus ouvert et progressiste. (Y. P.)
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■ Elisabeth Baume-Schneider (PS, Jura)
Avec son entrée au Conseil des Etats, la socialiste franc-montagnarde Elisabeth Baume-Schneider signe son grand retour en politique. Femme de combats, ministre remarquée de son canton durant treize ans (2002-2015), l’ancienne assistante sociale s’était ensuite éloignée de la vie publique jurassienne en reprenant le poste de directrice de la Haute Ecole de travail social et de la santé du canton de Vaud, à Lausanne. Son élection n’aura finalement été qu’une formalité. Elle succède à une autre figure du socialisme jurassien, Claude Hêche. (Y. P.)
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■ Charles Juillard (PDC, Jura)
La volonté de Charles Juillard d’aller au Conseil des Etats était un secret de polichinelle depuis longtemps. L’élection sous la coupole fédérale de l’actuel homme fort du gouvernement jurassien, grand argentier, a toujours semblé une évidence, la stature du démocrate-chrétien dépassant déjà les frontières de son canton. Président de la Conférence des directeurs cantonaux des finances, l’Ajoulot a accédé en 2018 à la vice-présidence du PDC Suisse. La Constitution jurassienne n’autorisant pas le cumul des mandats, Charles Juillard va devoir quitter le gouvernement. (Y. P.)
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Six candidats romands n’ont pas été réélus au Conseil national
Syndic de Montreux, figure familière de la politique romande depuis des années, le PLR Laurent Wehrli rate de peu sa réélection au Conseil national. L’arrivée de Jacqueline de Quattro a bouleversé le classement des libéraux-radicaux vaudois et son propre résultat est en net recul par rapport à 2015. Il peut toutefois sauver son siège, pour autant qu’Olivier Français soit élu aux Etats le 10 novembre ou que le même, en cas d’échec, renonce à retourner au Conseil national.
Deux autres Vaudois chutent. Claude Béglé, ancien directeur de La Poste, était le seul représentant à Berne du PDC vaudois. Son équipée en Corée du Nord l’a décrédibilisé et son parti enregistre le pire score de son histoire. Nicolas Rochat Fernandez, élu socialiste de la vallée de Joux entré en cours de législature, n’a pas pu confirmer par la grande porte.
La veste fribourgeoise est celle de Jean-François Rime, une non-réélection dont l’UDC gruérien, ce pilier de la politique fédérale, semble avoir été le premier surpris. L’entrepreneur quittera aussi bientôt la présidence de l’Union suisse des arts et métiers (USAM), son mandat arrivant à échéance. Il était, avec le Neuchâtelois Yvan Perrin, qui a raté lui son retour sous la Coupole, l’une des figures romandes de l’UDC triomphante.
Roger Golay quitte aussi la scène fédérale. Il y détenait l’unique siège du Mouvement Citoyen Genevois (MCG), dans lequel il avait succédé au conseiller d’Etat Mauro Poggia. Ce parti, qui avait connu son apogée en 2013 (19% des suffrages aux élections cantonales), est depuis abonné aux pertes et aux crises internes, sans que son seul élu soit en mesure de compenser par un rayonnement particulier. Last but not least dans cette série noire, l’UDC Manfred Bühler. Avec sa non-réélection, le Jura bernois est privé de son seul représentant au parlement fédéral. L’élu aura fait les frais de la perte d’un siège par son canton et de l’érosion de son parti. (Y.R.)
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