L’assurance invalidité (AI) s’est, au fil des années, transformée en cauchemar politique. Très endettée – le découvert a grimpé jusqu’à 14,9 milliards –, elle a fait l’objet de plusieurs réformes visant à concilier deux objectifs: intégrer les bénéficiaires dans le marché du travail et assainir les finances. Certaines réformes ont réussi, d’autres pas.

Dans la première catégorie entre la cinquième révision, qui a mis l’accent sur la réinsertion professionnelle. De même, le recours temporaire à la TVA pour réduire la dette a été accepté en votation populaire en 2009. Le relèvement de 0,4%, dont les recettes sont versées à l’AI, est cependant limité à fin 2017. Dans la colonne des échecs se range la seconde partie de la sixième révision, qui visait notamment à remplacer les rentes par paliers par un système linéaire, à renforcer la réinsertion professionnelle, à adapter les rentes pour enfants et à équilibrer les finances sur le long terme.

Un travail plutôt qu’une rente

Le nouveau projet adopté par le Conseil fédéral mercredi reprend une partie de ce dispositif, en particulier les rentes linéaires ainsi que des incitations à la réinsertion ciblées sur les jeunes et les adultes atteints dans leur santé psychique. Les deux mesures sont liées: elles visent toutes deux à rendre l’exercice d’une activité professionnelle plus attractive que le versement d’une rente, souligne le conseiller fédéral Alain Berset.

Les rentes linéaires suppriment les effets de seuil qui pénalisent une partie des bénéficiaires. Comme c’est le cas aujourd’hui, le taux d’invalidité minimal sera fixé à 40%. Il donnera droit à un quart de rente. Au-dessus, la rente sera proportionnelle au taux d’invalidité jusqu’à 70%, seuil à partir duquel une rente complète sera octroyée. Le Conseil fédéral avait initialement proposé de relever ce seuil à 80%. Cette idée a été soutenue par la droite et les milieux patronaux, mais, assure Alain Berset, une majorité s’est dégagée en faveur du maintien à 70%.

Pour mieux intégrer les jeunes moins de 25 ans et les adultes souffrant d’un trouble psychique, la révision prévoit de soutenir le passage de la scolarité obligatoire à la formation professionnelle et d’intensifier l’encadrement et le conseil. Sur la base de projets pilotes tels que Job Passerelle, les employeurs pourront tester de futurs collaborateurs potentiels en recourant à la location de services, ce qui les déchargera de tâches administratives. Par ailleurs, les risques d’accident et de responsabilité civile seront couverts pendant la durée de la réadaptation.

Milieux patronaux très critiques

La réforme ambitionne d’augmenter les chances des enfants de suivre une formation professionnelle. Le suivi médical et le soutien seront renforcés et la liste des infirmités congénitales sera mise à jour. Certaines maladies rares comme le syndrome de Hurler, qui affecte la colonne vertébrale, le cœur, l’audition et la vue, seront inscrites sur cette liste.

La réforme ne prévoit pas de mesures d’économies nouvelles. Alain Berset ne les juge pas nécessaires. La dette a été réduite de 14,9 à 12,2 milliards et la situation devrait rester stable après la fin du relèvement temporaire de la TVA. Depuis 2012, les comptes de l’AI affichent un excédent annuel de 600 à 900 millions. Alain Berset attend des résultats équilibrés en 2018 et continue de penser que la dette pourra être intégralement remboursée d’ici à 2030. L’Union suisse des arts et métiers (USAM) et l’Union patronale suisse ne partagent pas cet avis. Elles réclament des économies supplémentaires et exigent que la rente complète ne soit versée qu’à partir d’un taux de 80%.


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