Les deux ressortissants syriens, repérés et arrêtés vendredi sur la route de Thonon, à la hauteur de la Pallanterie, ont été placés en détention provisoire. Le procureur général Olivier Jornot, qui a tenu une conférence de presse urgente ce samedi à Genève, a confirmé que des traces d'explosifs ont été découvertes dans le véhicule et que celui-ci a donc «servi à un moment donné à en transporter».

A lire aussi: Les deux Syriens sont soupçonnés de lien avec l'EI

C'est le seul élément à charge pour l'instant. Les deux hommes, qui viennent d'arriver en Suisse et qui ne parlent pas le français, affirment avoir acquis cette voiture que récemment. Olivier Jornot n'a pas donné d'autres détails sur leurs déclarations. Ce sera désormais au Ministère public de la Confédération (MPC), qui a repris cette enquête, d'investiguer sur les raisons de leur présence et leurs liens éventuels avec l'islamisme radical.

Deux autres enquêtes

«Faire le point et planter le décor» après ces quelques jours d'intense déploiement policier sur fond de vigilance accrue et de craintes d'attentats. C'est ainsi qu'Olivier Jornot, accompagné du chef de la police judiciaire François Schmutz, a expliqué les raisons de cette soudaine communication.

Les énormes efforts d'investigation et la vérification de tous les renseignements parvenus à la centrale- des levées de doute dans le jargon policier- ont finalement mené à des perquisitions ainsi qu'à l'ouverture de deux autres enquêtes. Celles-ci n'ont pas de lien avec les fameux quatre suspects, membres présumés de l'Etat islamique, recherchés depuis que leur signalement a été transmis mercredi par les services américains.

Un survivaliste armé jusqu'aux dents

La première enquête, déclenchée sur la base d'un appel, concerne un ressortissant suisse. La police a découvert à son domicile un «immense arsenal». Armes de poings et de guerre, AK47, fusils M16, mitrailleuse, pistolets Glock, mousquetons en grand nombre et une hache. L'enquête a finalement révélé que cet individu est bien radicalisé mais dans une mouvance d'extrême-droite.

A lire: Le coup de chance qui a permis l’arrestation de deux terroristes présumés

Partisan du survivalisme, croyant qu'il faut se préparer à un hypothétique conflit, il arborait chez lui un drapeau du Troisième Reich et disposait d'une abondante littérature. Son combat reste obscur. Genève hérite de cette procédure car celle-ci ne concerne en rien le djihad et la menace terroriste dont il est question ces jours.

Explosifs particuliers

La deuxième enquête est celle qui concerne les deux ressortissants syriens. Le procureur général a précisé que leur comportement- un arrêt inexpliqué sur la route- avait attiré l'attention d'une patrouille de gendarmerie. Celle-ci a décidé de procéder à un contrôle approfondi une fois leur nationalité découverte. Olivier Jornot n'a pas voulu préciser si ces hommes disposait d'un visa Schengen, ni quelles étaient les plaques du véhicule.

Des traces d'un explosif particulier- «pas celui qu'on utilise pour creuser des carrières»- ont été découvertes dans la voiture. Une infraction qui relève de la compétence fédérale, de même que le soutien ou l'appartenance à une organisation islamiste radicale. Olivier Jornot a encore précisé qu'aucune autre substance dangereuse- comme par exemple du gaz toxique- n'a été mise en évidence.

«Le fait de trouver de telles traces dans ce véhicule ne signifie pas encore que ces personnes ont elles-mêmes transporté des explosifs», a nuancé le magistrat.  Les prévenus affirment qu'ils viennent d'arriver en Suisse, ce qui semble se confirmer. Les enquêteurs fédéraux devront encore établir si ces deux Syriens ont des liens avec une quelconque organisation terroriste et si ce sont eux qui ont manipulé ou transporté les explosifs en question.

Querelle de compétences?

Pour le moment, les quatre personnes, initialement recherchées sur la base du renseignement américain, n'ont pas été localisées. L'enquête se poursuit et le parquet genevois continuera à donner son appui aux autorités fédérales.

Et cela même si le MPC, dans un communiqué diffusé plus tôt dans la journée, se limite à mentionner des contacts étroits entre le procureur général de la Confédération Michael Lauber et le conseiller d'Etat Pierre Maudet sans dire mot du parquet genevois. Un signe de tension sur fond de conflit de compétences? «Il faut poser la question au MPC et à son chargé de communication», rétorque Olivier Jornot.

A lire aussi: Olivier Jornot sur l'enquête genevoise: «Notre proximité avec le terrain justifie qu'on soit actif»

Ce dernier précise aussi qu'il y aura certainement d'autres perquisitions et interpellations en raison de l'avalanche de signalements reçus par la police. Cela ne veut pas encore dire, ajoute Olivier Jornot, «qu'on a mis la main sur un terroriste». Le procureur général genevois a lancé un appel «pour ne pas confondre contrôles ordinaires avec évènements extraordinaires». Pas sûr qu'il soit entendu.