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«On pourra toujours construire suffisamment»

La Société suisse des ingénieurs et architectes (SIA) soutient la révision de la loi sur l’aménagement du territoire. Laurent Vulliet, son vice-président, s’en explique

La Société suisse des ingénieurs et des architectes (SIA), qui réunit 15 000 professionnels de ces branches, s’engage dans la campagne politique sur l’aménagement du territoire en soutenant la révision soumise au vote le 3 mars. Laurent Vulliet est depuis 2008 le PDG de BG Ingénieurs Conseils, avec 600 collaborateurs l’un des plus grands bureaux d’ingénieurs de Suisse. Il précise la position de la SIA, dont il est le vice-président.

– Le Temps: Qu’est-ce qui pousse la SIA à prendre position dans ce débat?

– Laurent Vulliet: Fallait-il s’engager?, c’était la première question. La SIA reste en général plutôt discrète sur les objets politiques. Mais celui-ci a paru suffisamment important pour notre profession et pour la qualité du bâti, qui nous tient à cœur. Notre milieu, qui a participé à la révision de la loi, est très majoritairement favorable à ce projet. Il comble des lacunes là où la loi actuelle est inefficace et apporte une clarification bienvenue. Les plans directeurs cantonaux, qui devront être précisés, permettront de résoudre au mieux les contradictions entre les objectifs parfois concurrents que sont le logement d’une population croissante, les besoins de mobilité et la préservation de la qualité de vie.

– L’Initiative du paysage fait-elle peur?

– Elle serait fermement combattue, car elle est absurde. Avec le gel des terrains à bâtir pour vingt ans, les cantons qui ont zoné de manière excessive pourraient continuer de construire et ceux qui ont été plus mesurés seraient complètement bloqués dans leur développement. Nous avons là un bon contre-projet. Ce n’est pas la révolution, mais la planification est indispensable pour lutter contre le mitage du territoire et encourager le bâti «vers l’intérieur».

– Dans les régions où le logement manque, comme dans le basin lémanique, les adversaires de la révision brandissent la menace d’une réduction des zones à bâtir…

– C’est un argument fallacieux! On ne réduit pas les possibilités de construire. Au contraire, les cantons doivent planifier des surfaces pour les besoins de quinze ans. Certains d’entre eux devront augmenter leurs zones. Il y a aussi une volonté claire de densifier le bâti existant. Ce qui ne veut pas dire construire des tours, mais utiliser au maximum le potentiel des surfaces déjà légalisées, quand elles sont bien situées. Dans certains celles-ci sont sous-exploitées à 50%. Le développement du bâti doit aussi être lié au développement des transports régionaux, avec des économies d’énergie à la clé.

– Il n’y aurait donc aucune incidence à craindre sur le prix du sol et des loyers?

– Nous avons discuté de cet élément, mais nous n’y croyons pas du tout. Cela ne pourrait se produire que si les surfaces constructibles subissaient une réduction excessive, or on en sera loin. Nous ne croyons pas non plus à un renchérissement dû à la taxe sur la plus-value foncière, ce sera tout au plus un bénéfice moindre pour les vendeurs. La révision n’apporte pas de contrainte supplémentaire pour la construction, et même un assouplissement pour la pose de panneaux photovoltaïques. Pensez-vous que la SIA soutiendrait ce projet s’il compromettait le gagne-pain de ses membres?

– Cette prise de position pose-t-elle un problème à vos affiliés valaisans?

– Je ne le pense pas. L’année dernière, à l’occasion des 175 ans de la SIA, j’ai eu beaucoup de contacts avec nos membres valaisans, juste après la votation sur les résidences secondaires. Ils admettent que la situation d’aujourd’hui est l’expression d’un manque de planification générale dans le développement du territoire. Eux aussi pensent qu’on peut faire mieux.