A quelques heures du coup de sifflet de la rencontre Espagne-Russie à Innsbruck, cinq jeunes filles bariolées de jaune et de rouge sont assises sur le pied de David Villa, l'attaquant de leur équipe. Plutôt satisfaites. Depuis samedi, onze joueurs géants occupent en cercle (33 mètres de diamètre) le hall de la gare de Zurich, la tête dans les nuages. Ces sept tonnes de matériel synthétique ont nécessité dix jours de montage intensif 24 heures sur 24. Les statues gargantuesques de 17 mètres de haut - les têtes des footballeurs atteignent à elles seules trois mètres - ont des profils aisément reconnaissables qui permettent d'occuper chaque poste clé sur le terrain. Sont sélectionnés: Ballack, Lahm (Allemagne), van Persie (Hollande), Cech (Tchéquie), Charisteas (Grèce), Villa (Espagne), Benzema, Vieira (France), Chivu (Roumanie), Ivanschitz (Autriche) et Barnetta (Suisse). Ces figures sont posées sur le sol avec des pieds de presque trois mètres de long. Trois câbles les relient au plafond, lui-même recouvert du bleu du ciel légèrement voilé. Autant dire qu'il est préférable d'aimer le foot pour passer du temps dans la gare de Zurich.

Les sponsors avant tout

Cette installation sportive est avant tout une opération marketing lancée par Adidas, qui a également imposé sa présence dans les rues viennoises en accrochant à la Riesenrad de Vienne les bras et le visage démesurés du gardien tchèque Cech. Les protagonistes ont été choisis en fonction de leur célébrité, de leur talent et surtout... de leur sponsor.

Les passants, les pendulaires et les supporters effrénés déambulent donc par dizaines entre les jambes des sportifs dans la HB zurichoise et se retrouvent au cœur du cercle. Photos, lectures de cartes signalétiques, dégustation de bières: les statues sont cernées du matin au soir et le spectacle est parfois burlesque. Quand on interroge Ursula Bayer, responsable presse chez Adidas sur le prix de la construction, elle se contente de préciser que 50 personnes ont été engagées sur ce projet durant une année. Elle est plus loquace si on lui demande pourquoi Tranquillo Barnetta est le seul joueur avec la bouche ouverte. Réponse: il est le capitaine et motive ses ouailles... Les amateurs d'ambiance apprécieront de savoir que les onze joueurs synthétiques s'encouragent deux fois par jour (8 heures/18 heures) à haute voix dans chacune de leurs langues maternelles: «Allez, les jeunes, on va y arriver!» Enfin, les passants auront une pensée - si ce n'est un regard - pour «L'Ange protecteur» signé Niki de Saint Phalle, suspendu depuis 1997 dans le même hall, d'ordinaire triomphant avec ses couleurs foisonnantes et qui soudain doit rivaliser avec des carrures de footballeurs.